Le litige autour du Blausee se poursuit
Un homme d'affaires suisse condamné pour violation de domicile

Depuis cinq ans, le conflit autour de la mort des poissons du Blausee fait rage. La dernière tentative d’accord, en août, a échoué: les célèbres propriétaires ont fait capoter la table ronde en déposant une plainte et réclament plusieurs millions.
Publié: 20:57 heures
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L'idylle est trompeuse: une bataille acharnée fait rage depuis des années autour de la mort de nombreux poissons dans le Blausee.
Photo: IMAGO/Zoonar
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Lino Schaeren

Stefan Linder est un homme d’action. Ce Bernois de l'Oberland a cofondé le Swiss Economic Forum (aujourd’hui rattaché à la «NZZ») et le Swiss Innovation Forum. Il dirige l’Initiative Suisse en tant que président et exploite une pisciculture au bord du Blausee avec le vice-président de Blackrock Philipp Hildebrand et le patron de Globetrotter André Lüthi. En 2020, Stefan Linder s’est même brièvement glissé dans le rôle d’enquêteur privé – avec des conséquences juridiques.

Une hécatombe de poissons au Blausee

En 2018 et 2019, le Blausee a connu une hécatombe: des dizaines de milliers de truites sont mortes. Les propriétaires autour de Stefan Linder soupçonnaient un scandale environnemental: ils pointaient du doigt des matériaux contaminés provenant du tunnel de faîte du Lötschberg et des boues toxiques stockées dans la carrière de Mitholz, située en amont. La carrière appartient à Vigier; le matériau contient notamment des déblais de voies ferrées de la BLS.

En juin 2020, Stefan Linder et son fils ont installé de nuit une caméra camouflée près de la carrière. Ils ont aussi filmé la carrière avec des drones et tenté de pousser une conductrice de camion à coopérer.

Violation de domicile et contrainte

Cette semaine, le Tribunal régional de l’Oberland à Thoune a reconnu Stefan Linder coupable de violation de domicile, de violation du secret et de la sphère privée, ainsi que de contrainte. Le verdict: une peine pécuniaire avec sursis de 91’520 francs, assortie d’une amende de 22'880 francs. Stefan Linder a nié toutes les accusations, affirmant que la caméra ne se trouvait pas sur le terrain de l’entreprise, mais sur un terrain voisin. Le tribunal a jugé ses déclarations peu crédibles. Son fils s’en est tiré avec une amende de 60 francs pour simple violation de domicile. Mais le jugement n’est pas définitif.

L’échange de coups à Thoune n’était qu’un épisode secondaire dans le scandale du Blausee – mais il s’agissait de la première rencontre publique des parties devant le tribunal. Et ce ne sera probablement pas la dernière.

Des revers et un litige civil à venir

Certes, les propriétaires du Blausee ont essuyé un revers en août: le Ministère public bernois a clos une procédure centrale contre la BLS après cinq ans. Les analyses d’eau n’ont révélé aucune pollution significative. Mais le litige principal, du point de vue de Stefan Linder et de ses partenaires, ne fait que commencer.

La société Blausee AG réclame sept millions de francs à la BLS, à Vigier et à Marti par la voie civile. En juin, les pisciculteurs avaient demandé au directeur des travaux publics Christoph Neuhaus d’organiser une table ronde pour tenter de régler le conflit. Le rendez-vous était fixé au 18 août et toutes les parties et l’Office fédéral des transports avaient donné leur accord.

Demande de plusieurs millions

Mais presque simultanément, début juillet, les propriétaires du Blausee ont déposé une demande de plusieurs millions auprès de l’office de conciliation de l’Oberland. Christoph Neuhaus a annulé la table ronde, estimant que cette demande civile représentait une escalade plutôt qu’une tentative de désescalade.

Interrogé, André Lüthi, copropriétaire du Blausee, défend la démarche: depuis 2020, la Blausee AG a cherché à plusieurs reprises des solutions extrajudiciaires – sans succès. Au printemps, il a de nouveau contacté Christoph Neuhaus. Selon lui, la demande n’a pas torpillé la rencontre prévue: «En cas de succès à la table ronde, nous aurions retiré notre demande, nous l’avons d’ailleurs communiqué». Fin septembre, une négociation devant l’office de conciliation s’est soldée par un échec. Tout semble désormais se résumer à un grand procès civil.

Le géologue Hans-Rudolf Keusen s’excuse

Parallèlement, de nombreuses autres procédures pénales et civiles sont en cours. Plusieurs camionneurs ont déjà été jugés. La procédure contre le géologue renommé Hans-Rudolf Keusen est également terminée. Il avait apporté son soutien technique aux exploitants du Blausee et, comme Stefan Linder, avait été dénoncé par Vigier pour violation de domicile.

En décembre 2020, Hans-Rudolf Keusen est arrivé avec une demi-heure d’avance à un rendez-vous sur la carrière de Mitholz et, au lieu d’attendre à l’entrée comme convenu, il s’est rendu directement sur la place de transbordement. L’exploitant a considéré cela comme une intrusion non autorisée et a entamé des démarches juridiques.

«L’affaire était absolument ridicule», confie Hans-Rudolf Keusen. En mars 2025, il a néanmoins accepté un accord devant l’office de conciliation de Thoune: il s’est excusé et a versé 2500 francs de dédommagement aux parties. «C’est un jardin d’enfants», ajoute-t-il, mais il voulait éviter de faire appel à toutes les instances pour une broutille.

L’avenir de Stefan Linder reste incertain

Pour Stefan Linder, la situation pourrait être différente. Immédiatement après le verdict, le copropriétaire du Blausee n’a pas voulu préciser s’il comptait faire appel de la décision.

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