Beaucoup de questions en suspens
Apeurée par la guerre en Ukraine, l'armée veut le retour des bunkers

Plus de 100 bunkers de combat ont été construits en Suisse, puis démantelés en 2018. L'armée souhaite aujourd'hui en remettre certains en service, mais de nombreuses questions restent sans réponse.
Publié: 09:50 heures
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Le chef de l'armée Thomas Süssli prévoit de réactiver des bunkers de combat.
Photo: keystone-sda.ch
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Daniel Ballmer

La guerre en Ukraine a tout changé. La Suisse se réarme et l'armée veut remettre en service d'anciens bunkers de combat équipés de mortiers. Au total, 112 installations de ce type ont été construites entre 1960 et 2003. En cas d'urgence, elles devaient bombarder les frontières nationales ou les axes de circulation importants. 

En 2018, le Parlement a décidé de mettre hors service les mortiers de forteresse. Le ministre de la Défense de l'époque, Ueli Maurer, a évoqué la «fin du concept de réduit». Depuis, certains bunkers ont été vendus à des particuliers. Mais la guerre en Ukraine a mis un terme à ces ventes.

L'armée cherche des conseils

L'armée s'engage désormais dans un retour en force des bunkers. L'Office fédéral de l'armement (Armasuisse) a lancé un appel d'offres public pour une étude de projet sur la plateforme d'acquisition Simap. L'armée espère recueillir des conseils sur la manière de transformer les fortifications désaffectées en «nœuds de défense difficiles à attaquer», équipés d'une électronique de pointe, mais nécessitant le moins de travaux structurels possible.

Le public cible de cette appel d'offres comprend les PME innovantes, les start-ups et les spin-offs. L'objectif est de renforcer la coopération entre l'industrie et l'armée, explique un porte-parole de l'armée.

L'objectif initial est clair: il faut une solution capable de tirer sur des cibles terrestres blindées et souples à une distance d'au moins 10 kilomètres et idéalement 30, ainsi que sur des cibles aériennes volant à basse altitude jusqu'à 10 kilomètres. Le système devrait être opérationnel en quelques heures et avec le moins de soldats possible.

Cette solution permettra-t-elle d'effectuer des reconnaissances depuis un emplacement pour tirer depuis un autre? Le tube de mortier existant pourra-t-il toujours être utilisé, ou un système entièrement nouveau sera-t-il nécessaire? Quelle sera l'option la plus efficace et la plus rentable? Voilà les questions qui taraudent le Département fédéral de la Défense (DDPS). L'objectif final est de sonder les possibilités d'une remise en service judicieuse et rentable des fortifications, explique l'armée. 

Après réflexion, Berne change d'avis

Mi-2022 encore, le Conseil fédéral s'opposait à la réouverture des fortifications et avait rejeté une motion du conseiller national UDC Bruno Walliser. «Actuellement, le Conseil fédéral estime que la réactivation de fortifications ou de troupes fortifiées est inappropriée», avait déclaré la ministre de la Défense de l'époque, Viola Amherd.

Mais le Conseil fédéral a vite changé d'avis. En 2023, le chef de l'armée Thomas Süssli a annoncé qu'une étude était en cours pour déterminer si une partie de l'artillerie de la forteresse devait être conservée. En mai, il a exposé ses intentions de remettre en service certains bunkers: « Bon nombre d'entre eux sont en très bon état et pourraient être réparés rapidement avec l'autorisation du Parlement.»

D'un point de vue militaire, cette décision semble logique. Dans certaines zones, les mortiers de forteresse sont les seules installations militaires présentes. Même dans une guerre moderne, les bunkers sont difficiles à détruire, car ils sont bien protégés. «Il suffit d'un coup direct sur l'installation pour la détruire», a déclaré Thomas Süssli.

Dans un premier temps, ces installations serviront de dépôts de munitions ou pour loger les troupes. Pour les réarmer, il faudra que le Parlement donne à nouveau son feu vert.

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