Les finances de l’assurance-invalidité se dégradent, principalement en raison d’une forte hausse du nombre de nouvelles rentes ces deux dernières années. Alors que la part des nouveaux bénéficiaires dans la population active était encore de 2,6 pour 1000 personnes en 2013, elle atteignait 3,7 l’an dernier.
Cette progression est surtout liée aux maladies psychiques. Aujourd’hui, une nouvelle rente sur deux est accordée pour ce motif. Chez les jeunes adultes, cette proportion grimpe à près de deux tiers. Les spécialistes parlent déjà d’une «énorme vague». Rien qu’en 2023, environ 12'000 personnes âgées de 13 à 24 ans se sont annoncées à l’AI et 2800 d’entre elles ont obtenu une rente.
La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider entend inverser la tendance avec sa nouvelle révision de l’AI. Le principe selon lequel la réadaptation prend le dessus sur la rente est déjà en vigueur, mais il doit être renforcé, notamment dans l’intégration au marché du travail.
Empêcher le glissement vers la rente
La priorité est donnée aux jeunes. Selon les documents internes de l’Office fédéral consultés, il est prévu de proposer une «prestation d’intégration» au lieu d’une rente, afin d’éviter que de jeunes assurés ne «glissent» prématurément vers la rente. Une «rente d’intégration» est également évoquée.
L’idée consiste à attribuer un nouveau statut aux jeunes dont le diagnostic laisse entrevoir une possibilité de traitement. L’indemnité versée pourrait être inférieure à une rente AI et serait limitée dans le temps. Elle serait en outre liée à des mesures d’accompagnement, comme un plan de traitement médical.
Elisabeth Baume-Schneider s’est rendue dans plusieurs offices AI pour évaluer la situation sur le terrain. A ses yeux, il faut «changer de paradigme pour les personnes de moins de 25 ans en prenant un ensemble de mesures». L’objectif est de réduire le nombre de nouvelles rentes, par exemple en créant des incitations qui «rendent la rente moins attractive ou encouragent son abandon».
Les économies avant tout
Lors des consultations, le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) a proposé de relever la limite d’âge des mesures à 30 ans. L’administration fédérale des finances a, de son côté, insisté pour que la prestation d’intégration soit strictement limitée dans le temps, ou que l’âge minimal d’ouverture du droit à la rente soit relevé, avec la possibilité de n’appliquer cette règle qu’à certaines pathologies.
Les mesures envisagées devraient, selon les fonctionnaires, «entraîner une réduction nette de la charge pesant sur le système d'assurance invalidité au plus tard dans les cinq ans». Leurs recommandations insistent sur des dispositifs de mise en œuvre peu coûteux, capables de générer des économies rapides.
Les experts externes évincés
La réforme ne se limite pas aux jeunes. L’accompagnement des assurés doit être renforcé, avec une gestion de cas plus suivie et un recours accru aux services internes. «Enfin, il s’agit d’éviter autant que possible les expertises externes», précise encore le document. Une orientation qui sonne comme une mise à l’écart des experts privés, régulièrement critiqués.
Elisabeth Baume-Schneider envisage aussi d’adapter certaines règles de l’AI pour en réduire les coûts. Aujourd’hui, une rente entière est octroyée dès un taux d’invalidité de 70%. Demain, elle pourrait être liée à l’absence de revenu professionnel. La conseillère fédérale prévoit de présenter ses propositions concrètes début 2026.