La scène est historique. A Pékin, Vladimir Poutine, Xi Jinping et Kim Jong Un avancent côte à côte mercredi 3 septembre, lors du défilé géant marquant les 80 ans de la capitulation du Japon. Les caméras de la télévision d’Etat chinoise captent leurs sourires, leurs échanges. Un moment presque décontracté.
Grâce à des micros restés ouverts, une partie de la conversation a été enregistrée. Et le sujet a de quoi surprendre: l’immortalité. Il est fort probable que les dirigeants n'étaient pas au courant qu'un micro les enregistrait, rapporte Reuters.
«A 70 ans, on est encore un enfant»
Au début de la conversation, le président chinois s'adresse à son homologue nord-coréen: «Moi aussi, je suis très heureux. Ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vus.» Kim Jong Un rappelle, par l'intermédiaire de son interprète, qu’ils ne s’étaient pas rencontrés depuis six ans.
Plus tard Xi Jinping, agé de 72 ans, se tourne vers Vladimir Poutine: «Autrefois, les gens vivaient rarement jusqu’à 70 ans, mais aujourd’hui, à 70 ans, on est encore un enfant.» Le patron du Kremlin, âgé du même âge, renchérit: «D’ici quelques années, avec le développement de la biotechnologie, les organes humains pourront être continuellement transplantés, permettant aux gens de rester toujours plus jeunes, voire d'atteindre l’immortalité.»
Xi Jinping déclare ensuite: «La prédiction, c’est que, dans ce siècle les humains pourraient vivre jusqu’à 150 ans.» Du haut de ses 41 ans, Kim Jong Un passe alors, selon ses pairs, pour un gamin. Il ne prend pas la parole, mais semble écouter attentivement. Tout laisse penser que cette conversation n’était pas destinée au public: la caméra se détourne rapidement vers la place Tian’anmen et le son est aussitôt coupé.
Poutine assume
Interrogé après coup, Vladimir Poutine a confirmé l’échange. Selon lui, les progrès médicaux, chirurgicaux et biotechnologiques rendent crédible une espérance de vie portée à 150 ans: «La vie active ne se poursuivra plus comme aujourd’hui.» Même si, reconnaît-il, tout dépendra des pays, l’avenir sera marqué par une «hausse considérable» de la longévité.
Le maître du Kremlin n’en est pas à son premier intérêt pour ces sujets. Proche de Mikhaïl Kovalchuk, un haut fonctionnaire russe obsédé par la jeunesse, il aurait déjà demandé à ses scientifiques d’étudier la bio-impression 3D pour créer des organes de remplacement à partir de cellules cultivées en laboratoire.
En Chine, la transplantation est un secteur sensible: le pays est accusé d’utiliser les organes de prisonniers exécutés pour approvisionner ses hôpitaux.
Une conversation lourde de sens
Si la scène amuse par son côté inattendu, elle n’est pas anodine. Ni Poutine ni Xi Jinping ne préparent ouvertement leur succession. Quant à Kim Jong Un, il a encore des décennies devant lui avant qu’un héritier ne prenne la relève. Une perspective qui n’a rien de rassurant pour leurs opposants.