Un fils en quête de vérité
11 ans après le MH370, les familles réclament toujours des réponses

Onze ans après la disparition du vol MH370, Jiang Hui, fils d'une passagère, continue sa quête de vérité. La Malaisie annonce la reprise des recherches en eaux profondes, mais les familles restent frustrées par le manque de transparence des autorités.
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La mère de Jiang Hui a disparu dans le vol MH370.
Photo: AFP
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AFP Agence France-Presse

La dernière image que Jiang Hui garde de sa mère, c'est leur au revoir quelque temps avant qu'elle ne disparaisse avec 238 autres occupants du vol MH370 de Malaysia Airlines entre Kuala Lumpur et Pékin.

«C'est la dernière fois que nous nous sommes vus. Qui peut imaginer qu'une chose aussi improbable arrive à sa propre famille?», se demande Jiang Hui 11 ans après. C'était chez lui à Pékin. Jiang Cuiyun avait 72 ans et partait en voyage, sac en tissu en bandoulière, en promettant de rapporter des souvenirs et des friandises.

Manque de transparence

Jiang Cuiyun était enregistrée sur le vol de retour qui a disparu des écrans radar le 8 mars 2014 après son décollage de l'aéroport international de Kuala Lumpur. Les recherches les plus importantes de l'histoire de l'aviation n'ont jamais rien donné, et la disparition du Boeing 777 reste l'un des grands mystères aéronautiques. La Malaisie vient d'annoncer que les recherches en eaux profondes reprendraient le 30 décembre avec le concours d'une société britannique d'exploration maritime dans une zone jugée comme la plus probable pour une éventuelle localisation.

La décennie écoulée a été un calvaire pour Jiang Hui et les proches des autres passagers, dont les deux tiers étaient Chinois. La reprise annoncée des recherches est une nouvelle bienvenue, mais Jiang Hui et ses compagnons de douleur restent frustrés par ce qu'ils considèrent comme le manque de transparence du gouvernement malaisien et de Malaysia Airlines.

Les familles ont demandé des précisions, par exemple les coordonnées précises de la zone de recherche, «mais nous n'avons toujours reçu aucune réponse à ce jour», se désole Jiang Hui. Certaines familles craignent «une simple mise en scène», dit Jiang Hui, qui gère un groupe de messagerie instantanée pour se soutenir mutuellement et partager les informations entre proches des disparus. Les recherches ont été suspendues en 2017. «Je crois que ça a été la période la plus difficile», se rappelle Jiang Hui.

Des accords avec Malaysia Airlines

Son appartement du nord-est de Pékin est rempli du souvenir de la tragédie. Les livres sur la catastrophe remplissent ses étagères, sur lesquelles trône aussi un modèle réduit de Boeing 777 qui l'a aidé à comprendre les structures de l'appareil.

Jiang Hui montre la collection des T-shirts qu'il a portés lors de rassemblements des familles de victimes, ainsi qu'une accumulation de papiers parmi lesquels des lettres adressées au ministère chinois des Affaires étrangères, des documents de justice et des cartes. «Des archives historiques», dit-il.

Un tribunal de Pékin a annoncé lundi avoir ordonné à Malaysia Airlines de verser plus de 2,9 millions de yuans (410'000 dollars) à huit familles de passagers, légalement déclarés décédés. Quarante-sept autres cas ont été réglés par des accords extrajudiciaires avec la compagnie, a ajouté le tribunal sans rien divulguer des termes des accords ni d'éventuelles indemnités.

Le but d'une vie

Des ressortissants de 14 pays différents se trouvaient dans l'avion, dont 50 passagers et membres d'équipage malaisiens. Il n'y a pas de recours de la part de ces derniers devant la justice malaisienne, selon les vérifications de l'AFP. Sur 78 dossiers dont a été saisie la justice chinoise, 23 restent en suspens parce que les proches n'ont pas demandé d'acte de décès ou n'ont pas encore mené à bien la procédure de demande.

Jiang Hui fait partie de ces 23. Le communiqué du tribunal suggère qu'il ne recevra jamais de compensation s'il ne déclare pas sa mère décédée, s'émeut-il. «J'ai l'impression qu'on me demande de déclarer ma mère décédée sans aucune preuve, ce qui est très difficile à accepter pour moi, dit-il. Je trouve cela inhumain.»

«Retrouver l'avion, retrouver ma mère et découvrir la vérité, je crois c'est un des buts de ma vie», dit-il. Il invoque le «lien profond» qui l'attachait à sa mère, une femme chinoise comme les autres, mais forte, qui a travaillé dur pour pourvoir aux besoins de la famille. «J'imaginais que quand les enfants seraient plus grands, nous voyagerions ensemble en famille et qu'elle pourrait profiter de ses vieux jours. Après cet événement, je pense que la retrouver et découvrir la vérité est la meilleure façon de lui témoigner ma piété filiale». 

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