«VIVE LA LIBERTE, BORDEL»
Javier Milei, l'irrépressible présidence «troll»

Javier Milei, ou le président à l'allure d'un influenceur «troll». Avec sa communication incessante sur les réseaux sociaux, le président argentin se comporte de manière burlesque et sarcastique sur les plateformes. Florilège.
Publié: 06.03.2024 à 08:22 heures
Le président argentin le confirme: il utilise les réseaux sociaux "au petit-déjeuner, au déjeuner, et le soir" de préférence.
Photo: AFP

Sarcastique, belliqueux, pontifiant, prompt à l'auto-célébration... le président ultralibéral argentin Javier Milei, investi il y a trois mois, inonde les réseaux sociaux de commentaires, retweets, likes, mèmes, dans une communication en avalanche non-stop, à mi-chemin entre tribune, défouloir et journal de bord, qui n'est pas sans rappeler celle de Donald Trump en son temps.

«BONJOUR A TOUS...!!! JE SUIS LE LION... Je suis de retour sur le sol argentin. VIVE LA LIBERTE, BORDEL.» Par ce message allègre et tout en capitales, emblématique de son style, Javier Milei saluait de bon matin son retour d'un voyage aux Etats-Unis avant son investiture le 10 décembre, à l'orée d'une nouvelle semaine hyperactive sur les réseaux X et Instagram.

Adepte des réseaux sociaux

Durant les deux premiers mois de sa présidence, l'économiste et ancien polémiste de plateaux TV, déjà grand adepte des réseaux sociaux lors de sa campagne, a lâché quelque 14'000 «J'aime» et posté près de 4400 publications, dont 111 de sa plume, selon un décompte minutieux du quotidien La Nacion au 10 février.

Que ce soit dans ses mots à lui, par un mème, ou en retweetant des commentaires, il y en a pour tout le monde: députés qui se sont opposés à son train de réformes dérégulatrices, gouverneurs de provinces en rébellion contre les économies, journalistes dont l'article ou la chronique lui a déplu...

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Avec des messages frôlant parfois le burlesque, comme lorsqu'il relaie un mème le présentant en lion ceint de l'écharpe présidentielle, ou une photo de la statue de la Liberté avec son visage. Il n'hésite pas non plus à publier les photos et noms des députés qui ont voté contre sa loi, ou à «liker» un photomontage représentant un gouverneur récalcitrant en trisomique. L'Association Syndrome de Down Argentine a officiellement protesté.

Un «influenceur troll»

Javier Milei «incarne le profil de l'influenceur troll en phase avec la culture numérique actuelle», estime le sociologue Silvio Waisbord dans un essai «Le président troll» dans la revue universitaire Anfibia.

«Les trolls humilient les autres, les adversaires et ceux qu'ils trouvent en travers de leur chemin. (...) Ils jouent de l'ironie et du sarcasme qui reflètent un sentiment de supériorité par rapport à leurs cibles», rappelle-t-il.

Le président «est une personne super respectueuse, qui défend la liberté d'expression comme personne», assure le porte-parole de la présidence, interrogé sur les tweets peu amènes de Milei. Mais «ce sont ses réseaux (sociaux) et il les gère comme bon lui semble».

1100 retweets en 4 jours

Dans une interview à la chaîne conservatrice LN+, l'intéressé a confié utiliser les réseaux sociaux «au petit-déjeuner, au déjeuner, et le soir» de préférence. «Et quand je voyage, c'est un peu plus intense.»

Lors de son voyage à Washington fin février, Javier Milei retweeté pas moins de 1100 messages en quatre jours, parmi lesquels des photos de sa rencontre avec Donald Trump, selon un décompte de la cellule de vérification numérique de l'AFP.

Une communication à «la Trump»

«Sa relation avec les réseaux sociaux est très semblable au style d'activation frontale et agressive vu chez Trump», relève pour l'AFP Ernesto Calvo, politologue argentin spécialiste en communication de l'université du Maryland. Mais avec «une communication un peu plus erratique» que l'ex-président américain, candidat à un deuxième mandat.

Le porte-parole présidentiel assure que Javier Milei gère ses réseaux sociaux seul, pour «avoir un contact direct avec les gens». Une affirmation dont Ernesto Calvo doute, «étant donné le volume d'activité».

Sur le réseau X d'Elon Musk – un sympathisant avoué de Milei –, à la modération toute relative, le nouveau président alterne considérations économiques techniques et invectives contre «qui ne pense pas comme lui», analyse Silvio Waisbord.

Popularité intacte

Sans perdre le contrôle de son narratif: les tweets de Milei sont scrutés, commentés, font réagir, amusent ou scandalisent... et dominent l'agenda, des médias notamment, comme naguère ceux de Donald Trump. Avec à la clé une popularité intacte, supérieure à 50%, malgré le caractère drastique des réformes qu'il a lancées.

Mais sa virulence contre la classe politique pourrait s'avérer un jour à double tranchant, estime Ernesto Calvo. «Si sa popularité venait à baisser, si à un moment donné il avait besoin» de soutiens, «alors le coût politique sera amplifié».

(AFP)

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