Une France ingouvernable
Emmanuel Macron rejoue «moi ou le chaos»

Le président français s'est exprimé mercredi soir sur le résultat des législatives. Une courte intervention destinée, avant tout, à mettre les députés au pied du mur. Son objectif: obtenir à l'arraché une majorité.
Publié: 22.06.2022 à 20:47 heures
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Dernière mise à jour: 22.06.2022 à 21:07 heures
Emmanuel Macron a tenté son coup de bluff. À ses adversaires de dévoiler leurs intentions.
Photo: DUKAS
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Richard WerlyJournaliste Blick

Ecouter sans céder. Changer sans lâcher prise. Se montrer à l'écoute tout en restant le patron. En moins d’une dizaine de minutes, le président Français a joué son premier va-tout post-législatives. Une courte allocution. Et une grande absente: pas un mot, dans son intervention, sur la première ministre Elisabeth Borne, supposée être la cheffe de cette majorité qu’il a promis d’essayer de constituer à son retour du sommet européen de Bruxelles, jeudi et vendredi.

Surmonter le blocage institutionnel

Au menu: une invitation à prendre ou à laisser lancée aux députés de l’opposition pour parvenir à gouverner et surmonter le blocage institutionnel qui se dessine dans le pays. Avec un chiffre en guise d’objectif: «il a manqué une trentaine de députés», a expliqué le chef de l’État – alors que sa majorité ne compte que 245 élus sur 577 –, pour qui il demeure possible de gouverner «en bâtissant un contrat de coalition ou en obtenant une majorité texte par texte».

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Les jours qui viennent testeront sa formule, à l’évidence basée sur la recherche de débauchages pour faire voter les deux premiers projets de loi annoncés: l’un sur le pouvoir d’achat et l’autre sur la santé, sur lequel aucun détail n’a été donné. La seule indication concrète glissée par Emmanuel Macron a porté sur son refus de financer ces futures mesures par «plus d’impôts ou plus de dette». Ce qui, à priori, devrait davantage plaire à la droite et au camp conservateur, au sein duquel le président compte plusieurs alliés, dont son prédécesseur Nicolas Sarkozy.

Il rejoue «moi ou le chaos»

S’il a pris acte des «fractures et des divisions profondes qui traversent le pays», ainsi que du risque d’aboutir à un blocage institutionnel, Emmanuel Macron a rejoué ce soir «moi ou le chaos». Comme au billard, il renvoie la balle aux députés. Il estime que les 58,5% d’électeurs qui l’ont désigné le 24 avril ont validé son projet, ce qui est très discutable. Pas question non plus d’union nationale, ce qui n’est pas surprenant vu le poids des extrêmes au sein de la nouvelle Assemblée.

Le locataire de l’Elysée compte pour parvenir à ses fins sur le rapport de force présidentiel toujours réel, sur sa capacité à obtenir des soutiens, et sur les deux atouts qu’il garde en réserve: l’éventuelle révocation de sa première ministre utilisée comme fusible, et dans quelques mois une possible dissolution de l’Assemblée qui verrait les députés renvoyés devant leurs électeurs.

Au poker, le bluff est toujours une arme. Ce soir, Emmanuel Macron, désireux de «bâtir des compromis à ciel ouvert» a décidé d’en faire usage. A ses adversaires, maintenant, d'assumer leurs intentions. Et d'abattre leurs cartes.

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