Elon Musk n’a pas (encore) rompu avec Donald Trump. Et vice-versa. Même s’il s’éloigne pour de bon de Washington et de son Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE), l’homme le plus riche du monde reste indispensable au président des Etats-Unis, en particulier pour son financement électoral.
Le véritable divorce est en fait intervenu, ces derniers jours, entre le milliardaire et trois hommes qui ont aujourd’hui la confiance de Trump. C’est dans les échanges avec eux que Musk aurait dérapé, au point que certains médias américains affirment qu’il en est venu aux mains avec le plus influent du trio, l’idéologue Stephen Miller, chef de cabinet adjoint du chef de l’Etat.
Histoire de femme
Une histoire de femme est évoquée. Miller, dont le tempérament fougueux contraste avec le physique très austère, aurait «punché» Elon Musk, lui causant un œil au beurre noir visible lors de l’ultime conférence de presse de ce dernier dans le Bureau ovale, vendredi 30 mai.
Une autre raison de ce dérapage physique entre ces deux hommes obsédés par leur puissance et leur relation avec Trump serait l’article du New York Times publié ce même vendredi, affirmant que le propriétaire de Tesla, Space X et X abuserait de drogues au point que son entourage familial s’en est alarmé. Stephen Miller, connu pour son implication dans la rédaction du «Projet 2025» de l’Heritage Foundation – considéré comme la bible de l’administration Trump, même si celle-ci le dément – aurait accumulé des preuves de la toxicomanie croissante de Musk, et il voulait lui interdire l’accès au président devant les caméras.
Quitter Washington
Or quitter Washington et le DOGE sans avoir été de nouveau remercié publiquement par le «Commander in chief» était inacceptable pour Musk, qui a investi au total 284 millions de dollars dans la campagne présidentielle victorieuse de celui-ci.
Deux autres protagonistes ont été à la fois spectateurs et acteurs du dérapage fatal d’Elon Musk, largement responsable de son éloignement géographique de la capitale fédérale.
Le premier est le Secrétaire d’Etat Marco Rubio, avec lequel Musk a plusieurs fois échangé des insultes en réunion, devant Donald Trump. Ancien sénateur, déjà marginalisé en partie par l’émissaire personnel du président Steve Witkoff, Rubio a compris que son administration est sa meilleure garantie de survie politique, malgré la colère des diplomates devant les initiatives trumpistes.
Rubio le protecteur
«Rubio veut apparaître comme le protecteur du Département confesse un ancien conseiller d’ambassade américain. C’est sa meilleure carte pour exister». Résultat: Rubio a ordonné que les agents du DOGE soient interdits d’accès dans son ministère. Il a aussi récupéré la tutelle de l’US AID, l’agence fédérale de coopération internationale fermée par le DOGE dès le mois de janvier.
Le second proche de Donald Trump à avoir poussé Elon Musk dans les cordes est le très influent Secrétaire au Trésor Scott Bessent. Ce dernier sait, depuis le début, que Musk ne voulait pas de lui à ce poste. Le milliardaire défendait la candidature d’un autre financier, Howard Lutnick, nommé Secrétaire au Commerce. Or Bessent est l’architecte du projet de loi économique baptisé «Big, Beautiful Bill» par Trump, et actuellement examiné par le Congrès à majorité républicaine. Voté par la Chambre des Représentants le 22 mai, le texte est maintenant au Sénat, où Elon Musk aurait commis la faute impardonnable de s’en désolidariser publiquement.
Grande et belle loi
«La grande et belle loi» de Trump trébuche devant les Sénateurs, alors que Musk multiplie les tentatives pour la tuer» titre ce jeudi 5 juin le magazine Time. En cause: le coût de ce budget très électoraliste. Il ajouterait 2400 milliards de dollars aux déficits fédéraux au cours de la prochaine décennie, tout en privant près de 11 millions d’Américains de leur couverture médicale, en grande partie grâce à des réductions importantes de Medicaid et à l’imposition de nouvelles exigences en matière d’emploi.
Elon Musk a-t-il conscience d’avoir franchi ces «lignes rouges»? Un expert le pense. L’ancien avocat et universitaire Seth Abramson a publié une biographie de l’homme le plus riche du monde «Proof of destruction: The Musk insurrection as it happened». Or il le croit aujourd’hui trop instable pour prendre de bonnes décisions. Selon lui, Musk est «aux prises avec des difficultés importantes, notamment des problèmes de santé mentale, des problèmes de toxicomanie et une pression énorme.
En train de devenir fou
«Je crois vraiment qu’Elon Musk est en train de devenir fou». a déclaré Abramson dans un tweet. «Je suis un biographe de Musk qui a suivi son comportement en ligne au cours des deux dernières années – et étant donné qu’il a admis toutes les maladies mentales, une forte consommation de drogues et un stress paralysant, il est maintenant raisonnable de craindre qu’il soit profondément malade.»