Photo: Anadolu via Getty Images

Une mère décrit l'horreur à Rio
«On l'a égorgé et sa tête a été placée sur un arbre, comme un trophée»

A Rio, Raquel Tomas retrouve son fils Iago Ravel, 19 ans, décapité après une opération policière. Elle accuse la police d’exécution et décrit des scènes d’horreur. «On l’a égorgé et exposé comme un trophée», dit-elle. ONG et ONU réclament une enquête.
Publié: 04:18 heures
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Dernière mise à jour: 04:22 heures
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AFP Agence France-Presse

Au milieu d'une place jonchée de cadavres, la tête d'un jeune homme aux cheveux teints en rouge est déposée dans un sac à dos. Le reste du corps est emballé dans un sac mortuaire. Cette scène glaçante s'est déroulée mercredi, dans une favela de Rio de Janeiro.

Les familles cherchaient leurs proches parmi les dizaines de corps entreposés là par les habitants eux-mêmes, au lendemain d'une opération policière antidrogue ayant fait au moins au moins 132 morts selon les services du Défenseur public. Le jeune homme décapité s'appelait Iago Ravel, il avait 19 ans.

Venue trouver la dépouille de son fils, sa mère Raquel Tomas décrit des «scènes d'horreur». «C'est un massacre. Des familles désespérées, des mères qui s'agrippent à leurs fils (morts), des épouses qui cherchent leurs maris», raconte à l'AFP cette femme de 34 ans. «Mon fils a été assassiné. On l'a exécuté, sans qu'il ait le droit de se défendre. On l'a égorgé et sa tête a été placée sur un arbre, comme un trophée», poursuit-elle, la voix étranglée.

Accompagnée de membres de sa famille attendant de pouvoir reconnaître le corps à l'institut médico-légal, Raquel Tomas raconte avoir passé la nuit à parcourir les hôpitaux et les commissariats pour tenter de retrouver son fils. Le cadavre décapité a finalement été récupéré par des habitants dans la forêt qui surplombe la colline du Complexo da Penha, un des plus grands ensembles de favelas de Rio.

Une «exécution» des forces de l'ordre

La famille accuse les forces de l'ordre et parle d'une «exécution». Le père de Iago Ravel, Alex Rosado da Costa, désigne des agents du Bope, unité d'élite de la police locale. «Ils lui ont arraché la tête. D'après ce qu'on m'a dit, il n'y a aucun impact de balle sur son corps», déclare-t-il.

«Lors d'une opération, ils doivent faire leur travail, arrêter les suspects, mais pas les exécuter», renchérit Raquel Tomas en évoquant les policiers. «Ils l'ont assassiné, résume-t-elle. Malheureusement, ça fait longtemps que la police de Rio est corrompue», ajoute sa soeur, Dayane Tomas, 36 ans.

Plusieurs ONG dénoncent l'horreur

Certains habitants n'ont toujours pas de nouvelles de leurs proches. Ana Beatriz Adorno, 24 ans, cherche son mari. «On ne sait plus où il est. Il n'y a pas de corps, pas d'information, rien», déplore-t-elle, près de l'institut médico-légal.

Déclenchée à l'aube, l'opération policière de mardi, qui a mobilisé 2500 agents, a été considérée comme un «succès» par le gouverneur l'Etat de Rio, Claudio Castro, allié de l'ancien président d'extrême droite Jair Bolsonaro. En dehors de quatre policiers tués, les personnes retrouvées mortes sont des criminels, a-t-il affirmé, jugeant «négligeable» le risque que des innocents aient été ciblés par les forces de l'ordre.

Plus de 30 ONG, dont Amnesty International, ont dénoncé la brutalité de l'intervention. Le Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'homme s'est dit «horrifié» et a demandé des «enquêtes rapides». 

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