«On a le sentiment d'être abandonné»
Des milliers de personnes manifestent un mois après les inondations en Espagne

«Rien n'avance!» Un mois après les inondations tragiques qui ont fait 230 morts et des milliards d'euros de dégâts dans le sud-est du pays, les sinistrés ont exprimé vendredi soir leur fatigue et leur lassitude.
Publié: 29.11.2024 à 21:50 heures
Des rassemblements pour rendre hommage aux victimes ont eu lieu dans plusieurs communes touchées par les inondations.
Photo: KEYSTONE
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ATS Agence télégraphique suisse

Un mois jour pour jour après la catastrophe causée par des pluies diluviennes, des rassemblements de plusieurs milliers de sinistrés et de leurs soutiens ont eu lieu dans plusieurs des communes touchées, à l'appel d'organisations locales, de syndicats et d'associations. Ils ont notamment rendu hommage aux victimes. Des actions symboliques ont été menées dans certaines d'entre elles à 20h11 précises, soit l'heure à laquelle les autorités de la région de Valence – de loin la plus touchée avec 222 victimes – avaient fini par lancer une alerte sur les portables de la population pour l'informer du danger, plus de douze heures après l'alerte de l'Agence nationale de météorologie.

«Paiporta, unie, ne sera jamais vaincue!», ont crié des riverains, avant d'observer une minute de silence à 20h11 précises. A Paiporta comme dans les autres villes touchées par la tragédie, où des rassemblements similaires ont eu lieu, la gestion chaotique de la catastrophe est le principal grief des sinistrés, dont certains disent se sentir «abandonnés».

Catarroja, au sud de Valence, porte encore les stigmates de la catastrophe. Des dizaines de véhicules s'entassent à l'entrée de la ville dans des cimetières d'épaves improvisés. «Nous remercions les bénévoles, mais nous sommes très fatigués car rien n'avance», confie Amparo Peris, 35 ans. «Parfois nous avons l'électricité, parfois non... Certains jours, à l'heure des repas, vous êtes sans électricité et vous vous dites 'maintenant, qu'est-ce qu'on mange?' (...) Nous n'aimons pas cette situation, nous espérons que cela passera bientôt», poursuit cette auxiliaire de vie.

«Encore énormément de travail»

«Nous devons être très compréhensifs (...) face aux manifestations», a reconnu le président de la région de Valence Carlos Mazón, dont de nombreux manifestants ont à nouveau réclamé la «démission» vendredi soir. Il faut en outre «que nous soyons efficaces», a ajouté le dirigeant conservateur, très critiqué pour sa gestion de l'alerte et des secours.

«Il reste encore énormément de travail à faire, il y a des centaines de garages et de sous-sols inondés, des bâtiments endommagés, des entreprises fermées, des voies coupées, des villages entiers qui n'ont pas encore retrouvé une vie normale», avait reconnu de son côté mercredi le premier ministre socialiste Pedro Sánchez devant les députés. Jeudi, son ministre de l'Economie, Carlos Cuerpo, a énuméré les dommages causés par les inondations à partir de données des assurances: 69'000 habitations, 125'000 véhicules et 12'500 commerces ont été touchés. Les dégâts pourraient coûter jusqu'à 0,2 point de croissance au pays au quatrième trimestre, selon le gouverneur de la banque d'Espagne, José Luis Escrivá.

Peu à peu, la situation s'améliore toutefois dans les villes sinistrées, où les routes principales ont été dégagées. Mais, même si une fine couche de poussière rougeâtre a remplacé la boue qui recouvrait tout après la tragédie, le retour à la normale n'est pas encore acquis pour de nombreux habitants.

L'argent ne suffit pas à faire taire les critiques

En tout, le gouvernement a promis 16,6 milliards d'euros d'aide et de prêts, et des milliers de soldats, pompiers et policiers sont déployés pour les opérations de nettoyage et de reconstruction, sans parvenir à faire taire totalement les critiques visant les politiques depuis la tragédie.

Cette colère, visant aussi bien le retard dans le lancement de l'alerte avant la catastrophe que la gestion des secours, avait culminé le 3 novembre lors d'une visite à Paiporta du couple royal, Felipe VI et Letizia, accompagnés de Pedro Sánchez et de Carlos Mazón. Accueillis par des insultes et des jets de boue et d'objets divers, les deux politiciens avaient dû rebrousser chemin, tandis que le roi et la reine avaient été contraints d'écourter leur déplacement.

Signe que le mécontentement reste vif, une nouvelle manifestation doit avoir lieu samedi à Valence, la capitale régionale, où quelque 130'000 personnes avaient déjà défilé au début du mois pour réclamer la démission de Carlos Mazón et dénoncer la gestion jugée chaotique des secours par le gouvernement Sánchez.

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