Des sirènes retentiront jeudi dans les rues généralement animées de Taipei, mais celles-ci se retrouveront vides: en raison d'un exercice visant à simuler une attaque chinoise à Taïwan, les habitants devront se réfugier dans des abris souterrains. Cet exercice civil annuel est organisé cette semaine dans plusieurs villes de Taïwan, parallèlement à des entraînements militaires, afin de préparer l'île à une éventuelle invasion de Pékin.
La Chine considère Taïwan comme l'une de ses provinces, qu'elle n'a pas encore réussi à unifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. A 13h30 (7h30, heure suisse), des sirènes commenceront à retentir dans tout Taipei, paralysant la capitale de 2,5 millions d'habitants pendant environ une demi-heure.
La circulation sera interrompue et les habitants seront dirigés vers des abris, notamment des parkings souterrains et des stations de métro. Depuis son entrée en fonction l'année dernière, le président taïwanais Lai Ching-te s'efforce de sensibiliser le public à la menace que représente, selon lui, la Chine. «Je pense que c'est nécessaire car les tensions entre les deux rives du détroit sont très vives en ce moment», confie à l'AFP Oscar Wang, 25 ans.
Un entraînement pour la population
«Il est donc important pour nous, les citoyens lambdas, de se familiariser avec les itinéraires d'évacuation.» Taïwan a donné la semaine dernière le coup d'envoi de ses exercices militaires annuels, qui se terminent vendredi. En plus des troupes taïwanaises, 22.000 réservistes sont mobilisés – le plus grand nombre jamais convoqué lors de ces manoeuvres qui se déroulent depuis 1984, lorsque Taïwan vivait encore sous le joug de la loi martiale.
«Il s'agit autant d'un entraînement que d'une sensibilisation de la population taïwanaise à la réalité de la guerre moderne», observe Kitsch Liao, membre de l'Atlantic Council, un groupe de réflexion américain. Des troupes lourdement armées, équipées de missiles antiaériens Stinger fournis par les Etats-Unis, ont pris d'assaut le métro de Taipei lors d'un exercice nocturne.
Des lance-missiles mobiles de haute technologie provenant des Etats-Unis ont également été déployés autour de la capitale et ailleurs, à la vue de tous. Et les clients d'un supermarché de Taipei ont récemment participé à un exercice simulant une frappe de missile chinois sur la ville. «Je ne savais pas qu'il y aurait un exercice», a déclaré à l'AFP Yang Shu-ting, 70 ans, après y avoir pris part.
«Mon guère bâtait très fort»
«Mon coeur battait très fort et j'étais inévitablement nerveux. Je pense que le but est de vous faire savoir où vous devez vous cacher si quelque chose arrive.» Les troupes ont également simulé divers scénarios, notamment du harcèlement dit «de zone grise» – un concept de relations internationales désignant des tactiques hostiles mais ne relevant pas de la guerre ouverte.
Plusieurs collisions mineures impliquant des véhicules militaires pendant les exercices ont mis en évidence la difficulté de manoeuvrer dans les rues étroites de Taïwan. L'expert en défense Chieh Chung, chercheur au Strategic Foresight, un think tank établi à Taipei, estime que de tels incidents sont «difficiles à éviter» dans les zones urbaines.
«A Taïwan, de nombreuses routes et ponts constituent des obstacles importants pour les véhicules blindés qui circulent», explique-t-il. «Cela devient donc un problème et un obstacle tant pour les forces attaquantes que pour les forces défensives.»