Images insoutenables
Famine à Gaza: le plan terrifiant de Trump et Netanyahu?

Le silence des Etats-Unis sur la tragédie humanitaire à Gaza, où la famine menace plus que jamais, relance le débat sur la volonté réelle de Donald Trump, de retour d'une tournée dans le Golfe. Et si l'expulsion des Palestiniens du territoire demeurait son objectif?
Publié: 05:55 heures
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Dernière mise à jour: 08:54 heures
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Une mère palestinienne s'occupe de sa fille paralysée de 6 ans, Renda Jihad Muhammad al-Falouji, en essayant de la maintenir en vie malgré le manque de nourriture à Gaza.
Photo: Anadolu via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

Et si les Etats-Unis et Israël orchestraient la famine à Gaza, pour imposer définitivement leurs vues sur l’avenir de l’enclave? Dans les campus des universités américaines où le soutien à la Palestine est un mot d’ordre très mobilisateur, les affiches et les posters dénonçant la responsabilité de Donald Trump dans la tragédie humanitaire actuelle sont de plus en plus nombreux. Pour tous les étudiants acquis à la cause palestinienne, la menace de famine dénoncée par l’UNRWA, l’agence des Nations unies qui opère sur le territoire, n’a rien d’un accident causé par une pression militaire insupportable.

Impossible de l’ignorer

Le sujet de la famine à Gaza est désormais incontournable. Impossible de ne pas voir les images de la situation désespérée dans laquelle se trouvent plus de 65'000 enfants selon l’ONU. Et impossible de ne pas comprendre la colère qu’elle suscite au festival de Cannes, ou au concours de l’Eurovision à Bâle. Voici quelques heures, l’UNRWA – décriée par les gouvernements israélien et américain – a d’ailleurs de nouveau publié un communiqué poignant de son directeur médical, le Dr Akihiro Seita.

«L’interdiction totale de l’aide imposée par les autorités israéliennes depuis mars de cette année signifie que nous avons épuisé ce dont nous avons besoin pour prévenir et traiter la malnutrition», affirme-t-il. Le système de santé est complètement débordé. Plus de 90% des 2,2 millions de Palestiniens à Gaza souffrent d’insécurité alimentaire aiguë. Les restrictions sévères imposées à l’accès à la nourriture, aux fournitures essentielles et aux médicaments ont considérablement accru le risque de malnutrition, en particulier chez les enfants de moins de cinq ans.»

Complicité américaine

Pourquoi accuser Donald Trump et les Etats-Unis de complicité dans cette famine engendrée par le blocus militaire de l’armée israélienne (qui a elle-même mis en garde contre la sévère malnutrition à Gaza)? Parce que voici quelques jours, Washington a proposé, avec Israël, un plan visant à autoriser le retour de la nourriture et des produits de première nécessité.

«Le président Trump a clairement indiqué que l’une des choses les plus urgentes à faire était d’apporter une aide humanitaire à Gaza, et il a demandé à toute son équipe de faire tout ce qui était possible pour accélérer cela et pour que l’aide humanitaire parvienne le plus rapidement possible à la population. Nous avons un plan», a insisté son ambassadeur en Israël, Mike Huckabee, connu pour son soutien indéfectible à la colonisation israélienne en Cisjordanie.

Le plan serait de confier jusqu’à 60% de l’aide indispensable à une organisation caritative privée récemment enregistrée en Suisse sous le nom de Fondation humanitaire pour Gaza. Or le début de famine est, de façon très cynique, le meilleur moyen d’arracher l’accord des Palestiniens et le soutien de la communauté internationale à ce projet qui, de facto, marginaliserait l’UNRWA.

Vider Gaza

«Il faut toujours avoir en tête que le but ultime de Trump est de vider Gaza de sa population palestinienne. Cette politique du pire est plus pratique pour la Maison Blanche, car elle lui permet d’endosser le bon rôle, tandis que tout le monde considère Benjamin Netanyahu comme premier responsable de la catastrophe», juge un ancien diplomate américain, rencontré à Washington.

Une famine organisée? Une famine très politique? Dans l’histoire, rien de nouveau. Laisser mourir de faim des populations qui posent un problème en vue d’un nettoyage ethnique, ou pour obtenir gain de cause dans un conflit est, malheureusement, une vieille habitude des Empires.

Triple enjeu pour Trump

A Gaza, l’enjeu est triple:

1. Trump et Israël sont d’accord à 100% pour éliminer le Hamas en cassant les liens qui lui permettent encore de contrôler les Palestiniens de l’enclave.

2. Trump, comme Netanyahu et son gouvernement d’extrême-droite, n’ont absolument pas renoncé à déplacer la population gazaouie.

3. Trump a compris lors de son voyage dans le Golfe que l’Arabie saoudite et le Qatar ne normaliseront pas leurs relations avec l’Etat hébreu tant que Netanyahu sera au pouvoir, mais il pense qu’au vu de la tragédie humanitaire susceptible de devenir incontrôlable, ces deux puissants pays arabes sont prêts à accepter son plan pour mettre la bande de Gaza sous tutelle.

Preuve aussi que cette famine à Gaza est tacitement acceptée par Washington: la paralysie du parti démocrate. Le seul élu de l’opposition à dénoncer ce qui se passe dans le territoire est l’infatigable Sénateur indépendant du Vermont Bernie Sanders.

Laisser des enfants mourir de faim

«Il n’y a pas d’ambiguïté. Le gouvernement extrémiste de Netanyahu parle ouvertement d’utiliser l’aide humanitaire comme une arme, déclarait-il le 8 mai, avant le départ du président pour Ryad et après avoir redit son soutien au droit d’Israël à éliminer militairement le Hamas. Laisser mourir de faim des enfants comme arme de guerre est une violation flagrante de la Convention de Genève, de la loi sur l’aide à l’étranger et de la décence humaine la plus élémentaire. Les personnes civilisées ne laissent pas mourir des enfants de faim. Ce qui se passe à Gaza est un crime de guerre, commis ouvertement et en plein jour, et qui se poursuit chaque jour.»

A ce jour, seuls 14 sénateurs démocrates (sur 45) ont accepté de soutenir sa proposition de bloquer l’aide militaire américaine à Israël. Aucun, en revanche, n’a condamné la famine en cours à Gaza comme le résultat de la guerre menée par l’Etat hébreu.

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