Il n’est pas encore trop tard. Mais la fenêtre de riposte se resserre sur l’Union européenne (UE) face à l’administration Trump, avec des conséquences inévitables pour ses principaux voisins et partenaires comme la Suisse.
«Notre problème principal est la vitesse d’intervention. La Commission européenne a en moyenne besoin de deux ans pour prendre une décision. Puis, il faut au minimum cinq ans pour la mettre en œuvre. On perd la course», s’est inquiété Mario Draghi lors des Rencontres économiques annuelles d’Aix-en-Provence.
«Combattons et espérons»
L’ancien patron de la Banque centrale européenne a tout de même conclu sa prise de parole par un «Fight, fight and hope» (combattons et espérons). Une note positive donc, mais précédée d’un constat assez résigné sur la capacité des Européens à résister au tsunami Trump. Le couperet américain doit, en théorie, tomber ce mardi 9 juillet sur les négociations commerciales avec l’Union européenne, toujours pas bouclées.
Passé cette échéance, Washington activera en principe des majorations aux hausses de droits de douane en fonction du déficit commercial que les Etats-Unis ont avec les pays concernés. Des lettres seraient même prêtes, détaillant pour chacun d’entre eux ces nouveaux tarifs qui «varieront de 60% ou 70% à 10% ou 20%».
«Whatever it takes»
Qu’en pense «Super Mario», son surnom depuis son fameux «Whatever it takes» («Quoiqu’il en coûte») d’avril 2017 pour sauver l’euro, en pleine crise de la dette souveraine grecque? «Très peu a été fait dans le domaine de l’énergie, or les géants américains du secteur ont déjà prévenu que le coût de l’intelligence artificielle va de plus en plus converger avec celui de l’énergie», s’inquiète-t-il. «Ouvrons les yeux: soit nous sommes équipés, soit nous allons caler.»
La meilleure nouvelle selon Mario Draghi? Le changement de posture radicale de l’Allemagne en matière de défense. «70% des Allemands répondaient avant l’élection de Trump qu’ils n’étaient pas prêts à défendre leur pays. Or leur gouvernement vient de débloquer un budget sans précédent pour l’armée. L’Allemagne doit maintenant assumer ses responsabilités et devenir un leader de l’Europe. De ce point de vue, Donald Trump est plutôt un soutien.»
Trump déteste l’UE
Car une évidence, selon Mario Draghi, ne doit pas être oubliée. Surtout pas: «Trump n’aime pas l’Union européenne. Les gens qui sont autour de lui détestent l’Europe.» Problème: tout va très vite Outre-Atlantique. Quelques instants avant, dans une autre table ronde des Rencontres économiques d’Aix en Provence, le PDG de Total Energies Patrick Pouyanné l’avait souligné: «On peut penser ce que l’on veut de la super loi budgétaire, la Big Beautiful Bill, qui vient d’être votée, mais elle a été adoptée, elle vient d’être promulguée, et sa mise en œuvre va très vite démarrer. A partir de là, il faudra s’accrocher.»
Résigné, «Super Mario»? «C’est un fait, le modèle décisionnaire de l’UE est défaillant depuis 25 à 30 ans. Il faut palier à ces dysfonctionnements. Si tout le monde ne veut pas suivre, il suffit d’avancer, que ce soit à 4 ou 5 pays, à une dizaine ou à une vingtaine. Le traité européen a les dispositions qui conviennent. Prenez la monnaie unique: l’euro a été bâti par une coalition de volontaires.» Mais ne pas avancer à 27, n’est-ce pas offrir des brèches à ceux qui veulent diviser l’Union?