Un procès emblématique en Chine
Jimmy Lai, l'ex-magnat prodémocratie, reconnu coupable de sédition et collusion étrangère

Un tribunal de Hong Kong a reconnu Jimmy Lai coupable de sédition et de collusion avec l'étranger dans son procès pour atteinte à la sécurité nationale. Son verdict, critiqué par plusieurs pays occidentaux, sera suivi de l'annonce de la peine à une date ultérieure.
L'ex-magnat des médias prodémocratie Jimmy Lai a été déclaré coupable de sédition et collusion avec l'étranger à Hong Kong.
Photo: AP
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AFP Agence France-Presse

Un tribunal de Hong Kong a déclaré lundi l'ex-magnat des médias prodémocratie Jimmy Lai coupable d'un chef d'accusation de sédition et de deux chefs de collusion avec l'étranger, dans son procès pour atteinte à la sécurité nationale, critiqué par plusieurs pays occidentaux. «Il ne fait aucun doute dans nos esprits que Jimmy Lai n'a jamais dévié de son intention de déstabiliser le gouvernement du [Parti communiste chinois]», a déclaré la juge Esther Toh. Les peines seront prononcées à une date ultérieure.

Une centaine de personnes faisaient la queue devant le tribunal lundi matin, une partie d'entre elles se qualifiant de soutiens de Jimmy Lai et se disant soucieuses de son état. «Je veux vraiment voir ce qu'il se passe avec 'le boss', savoir si sa santé s'est dégradée», explique Tammy Cheung, qui a travaillé près de 20 ans pour le journal fondé par l'ex-magnat.

Le cas de Jimmy Lai, considéré par les défenseurs des droits comme emblématique de l'érosion des libertés politiques à Hong Kong, est devenu un sujet de discorde entre Pékin et de nombreux pays occidentaux. Le président américain Donald Trump avait appelé à sa libération lors d'une rencontre en octobre avec son homologue chinois Xi Jinping.

Disposant d'un passeport britannique, le fondateur du journal prodémocratie Apple Daily, aujourd'hui fermé, est emprisonné depuis 2020. Âgé de 78 ans, il est maintenu à l'isolement, «à sa demande» selon les autorités.

Il souhaitait une «Chine libre»

En plus des accusations de collusion, passibles de la prison à vie, le magnat était poursuivi pour 161 «publications séditieuses», parmi lesquelles des talk-shows sur les réseaux sociaux et des éditoriaux signés de son nom. Au cours de son procès, ouvert en décembre 2023, Jimmy Lai a plaidé non coupable et affirmé n'avoir jamais prôné le séparatisme ou la résistance violente. Il a également nié avoir appelé à des sanctions occidentales contre la Chine et Hong Kong.

«
Il aimait beaucoup le pays, il n'aimait simplement pas le régime
Un ancien employé de l'Apple Daily
»

«Les valeurs fondamentales de l'Apple Daily sont en fait les valeurs fondamentales du peuple de Hong Kong», dont «l'Etat de droit, la liberté, la recherche de la démocratie, la liberté d'expression, la liberté de religion, la liberté de réunion», a-t-il affirmé. Jimmy Lai souhaitait une «Chine libre et démocratique», a raconté à l'AFP un ancien employé de l'Apple Daily faisant la queue devant le tribunal lundi, connu sous le nom de Chan. «Il aimait beaucoup le pays, il n'aimait simplement pas le régime», a-t-il ajouté, estimant que la situation «est absurde».

Une «parodie de justice»

Les autorités de l'ex-colonie britannique, désormais région chinoise à statut spécial, affirment que cette affaire a été «traitée uniquement sur la base de preuves et conformément à la loi». L'ONG Reporters sans frontières a pour sa part qualifié le procès d'«arbitraire et illégal» et appelé le Royaume-Uni et les Etats-Unis à faire pression sur la Chine pour faire libérer Jimmy Lai. «Ce verdict déterminera non seulement le sort de Jimmy Lai mais aussi l'avenir de la liberté de la presse» à Hong Kong, avait jugé l'organisation.

De son côté, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a dénoncé une «parodie de justice», exprimant «des inquiétudes sérieuses que cet homme de 78 ans ne meure en prison à mesure que les jours passent». Pékin «soutient fermement» Hong Kong dans «le maintien de la sécurité nationale conformément à la loi et la répression des actes criminels qui mettent en danger la sécurité nationale», a affirmé vendredi le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Guo Jiakun.

Tout au long du procès, Jimmy Lai a répondu à des questions portant sur ses opinions politiques, son style de management et ses contacts à l'étranger. Il s'est décrit au moins deux fois comme un «prisonnier politique», s'attirant des reproches des juges. Les enfants du magnat, réfugiés aux Etats-Unis, ont fait part la semaine dernière d'inquiétudes concernant la santé de leur père en détention.

«Ses ongles deviennent presque violets, gris et verdâtres avant de tomber, et ses dents pourrissent», a déclaré sa fille Claire Lai à l'AFP lors d'une visite à Washington, où la famille cherche à mobiliser du soutien pour son père. Le gouvernement de Hong Kong a souligné que Jimmy Lai était soumis aux mêmes conditions de détention que «les autres détenus» et qu'il recevait des soins médicaux «adéquats et complets».

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