Les députés brésiliens ont approuvé mercredi à l'aube une proposition de loi visant à alléger considérablement la peine de l'ex-président Jair Bolsonaro, condamné à 27 ans de prison pour tentative de coup d'Etat. Le texte doit encore être approuvé par le Sénat.
Si ce texte est adopté par les deux chambres du Parlement, «Bolsonaro verra sa peine réduite de vingt-sept ans et trois mois à environ deux ans et quatre mois de prison», a affirmé le rapporteur, le député Paulinho da Força, dans une vidéo envoyée à l'AFP. Mais la décision finale sur la durée des peines reviendra à la Cour suprême.
Le texte, qui dit chercher «la pacification» du Brésil, a été adopté par 291 voix contre 148. Il prévoit aussi d'accorder une liberté conditionnelle à plus d'une centaine de partisans de l'ex-président d'extrême droite (2019-2022) condamnés pour l'assaut contre les sièges des pouvoirs à Brasilia le 8 janvier 2023, quelques jours après l'investiture de l'actuel président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva. «C'est un geste de réconciliation. Un pays ne peut rester éternellement prisonnier de son passé récent», a déclaré Paulinho da Força pendant la séance.
Incidents dans l'hémicycle
Les débats ont été interrompus pendant un long moment à la suite d'incidents dans l'hémicycle. Un député progouvernemental, Glauber Braga, a été expulsé manu militari par la police après avoir dénoncé une «offensive putschiste» et s'être installé dans le fauteuil du président de la chambre.
La retransmission en direct de la séance à la télévision a été coupée et les journalistes ont été chassés de la salle, ce qui a généré des bousculades et des échauffourées. Dans un communiqué, la Fédération des journalistes du Brésil a «condamné avec véhémence» cet «épisode de violence».
Le texte vise à réduire de manière significative les peines de prison pour divers délits, dont celui de tentative de coup d'Etat. Bloquée plusieurs mois durant, la proposition a été finalement inscrite mardi à l'ordre du jour de la Chambre, pour le plus grand plaisir de l'opposition de droite qui milite en faveur d'une amnistie de l'ex-président, mais n'a pu jusqu'à présent parvenir à ses fins en raison de protestations populaires.
«Un attentat contre la démocratie»
«Comme nous n'avons pas réussi à créer l'environnement politique et à obtenir les votes nécessaires pour l'amnistie, la première étape pour atteindre notre objectif sera la réduction des peines», a déclaré le député leader de l'opposition, Sostenes Cavalcante, au cours d'une conférence de presse. Le parti de la gauche au pouvoir a de son côté qualifié l'initiative parlementaire d'«inacceptable».
«Toute loi doit être générale. Nous faisons clairement une loi spécifique pour bénéficier à Bolsonaro», a commenté le député leader de la majorité, Lindbergh Farias. «Ce qui se passe aujourd'hui est une honte, un attentat contre la démocratie et un effort de plus pour l'immunité» des putschistes, a-t-il ajouté.
Jair Bolsonaro, 70 ans, est détenu depuis fin novembre dans les locaux de la police fédérale à Brasilia, dans une petite cellule équipée d'un minibar, de la climatisation et d'une télévision. Mardi, ses avocats ont réclamé son hospitalisation d'urgence en raison d'une «aggravation significative de son état de santé», nécessitant selon eux une double opération chirurgicale. L'ancien président souffre en effet de séquelles permanentes après avoir été poignardé à l'abdomen en 2018 lors d'un meeting de campagne présidentielle.
Président du Brésil de 2019 à 2022, Jair Bolsonaro a été reconnu coupable par la Cour suprême d'avoir conspiré pour se maintenir au pouvoir «de façon autoritaire» quel que soit le résultat de l'élection de 2022, qu'il a finalement perdue au second tour face à son rival de gauche Lula. Il clame depuis son innocence, se disant victime de «persécution politique».