80 ans après la défaite nazie
Ce 8 mai, Donald Trump exige que l'Europe dise merci (et paye)

Le président des Etats-Unis ne sera pas à Moscou le 9 mai pour la grande parade militaire de la victoire sur les nazis organisée par Vladimir Poutine. Mais en cette commémoration du 8 mai, il demande aux Européens de dire merci à son pays. Un rappel historique utile.
Publié: 10:13 heures
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Vue des ruines brûlées du Reichstag allemand à Berlin en août 1945, trois mois après la capitulation des nazis, le 8 mai 1945.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Cette commémoration n'échappera pas à la facture. Tous les gouvernements européens le savent, la célébration de la reddition nazie le 8 mai 1945, après la capitulation formelle survenue la veille à Reims (France), revêt un tout autre caractère en 2025.

Ce 80e anniversaire de la libération du Vieux Continent du joug hitlérien intervient en effet au moment où Donald Trump entend bien faire payer ses alliés, sans pour autant leur garantir une absolue sécurité. Le chantage, plus que la solidarité, est à l’ordre du jour entre les deux rives de l’Atlantique. C’est «grâce à nous» a répété Donald Trump qui veut faire du 8 mai le «Jour de la victoire» aux États-Unis.

Bataille des dates

La date anniversaire de la capitulation de l’armée allemande est toujours sujette à une bataille historique entre la Russie et l’Europe occidentale. C’est en pleine nuit, le 7 mai 1945, à 2h41 du matin, qu’a été signée dans une école de Reims, en France, la reddition sans condition des forces armées allemandes. L’armée soviétique est alors représentée par le général soviétique Ivan Sousloparov, qui appose sa signature au bas du document toujours visible dans la ville champenoise, où un musée reconstitue la salle où le Général Jodl, pour l’Allemagne, est venu mettre fin à la Seconde Guerre mondiale.

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Sauf que Staline, à Moscou, refuse que l’acte de capitulation lui échappe. Une deuxième cérémonie a donc lieu le 9 mai 1945 à Berlin. C’est cette date que la Russie va commémorer vendredi par un grand défilé militaire présidé par Vladimir Poutine devant une trentaine de dirigeants internationaux, dont le président chinois Xi Jinping.

Rien pour le 8 mai, ou presque

Et les Etats-Unis? Quid d’une cérémonie identique sur le sol français, par exemple à Reims? Rien, ou presque. L’heure n’est pas à la célébration de l’alliance, alors que le sommet de l’OTAN (crée le 4 avril 1949) va se tenir à la Haye à la fin juin. Au contraire. Jusqu’au dernier moment, de nombreux dirigeants européens ont redouté que Donald Trump se rende à Moscou, aux côtés de Vladimir Poutine.

L’impossible paix en Ukraine est toutefois passée par là. Il se murmure en revanche qu’une visite commune à Kiev, ces jours-ci, du président français Emmanuel Macron, du nouveau chancelier Allemand Friedrich Merz et du premier ministre britannique Keir Starmer, est en train d’être mise sur pied. Pour témoigner du soutien à l’Ukraine assiégée, alors que les négociations de paix avec la Russie sont encore loin d’avoir commencé.

Paix sonnante et trébuchante

La seule paix qui vaille, pour Trump, est sonnante et trébuchante. Le Canada, autre puissance alliée victorieuse en 1945, vient d’ailleurs de montrer l’exemple après les élections législatives du 28 avril. Son premier ministre Mark Carney, en visite à Washington mardi, a tenu à rassurer son hôte sur l’augmentation prévue des dépenses de défense, tout en soulignant que son pays ne pourra jamais être acheté ou conquis par les Etats-Unis. C’est donc avec un carnet de chèques en main que les Européens vont commémorer ce 8 mai. Tous ont l’intention de porter à plus de 2% du produit intérieur brut leur budget de défense, en sachant que Donald Trump réclame maintenant le double.

Drôle de 8 mai donc, que le vice-président JD Vance a mis lui aussi sous le signe du «deal» dans une intervention à Washington organisée par la Conférence sur la sécurité de Munich où il avait, en février, accusé l’Europe de discriminer injustement les partis nationaux populistes. «Je pense à la politique étrangère uniquement en termes de valeurs transactionnelles: Qu’est-ce que l’Amérique en retire? Qu’est-ce que le reste du monde en retire? Et j’essaie, vous savez, de me concentrer si purement sur la valeur transactionnelle que nous ignorons parfois l’aspect humanitaire ou moral de la chose».

Tout est «à repenser»

Avant d’ajouter: «Nous tous, franchement, des deux côtés de l’Atlantique, sommes devenus un peu trop à l’aise avec le dispositif de sécurité des 20 dernières années, et que – franchement, ce dispositif de sécurité n’est pas adéquat pour relever les défis des 20 prochaines années. Je pense que nous sommes dans l’une de ces phases où nous allons devoir repenser beaucoup de grandes questions».

C’est dit, c’est acté: l’anniversaire des 80 ans du 8 mai 1945 sera sans gâteau et sans bougies. Il faudra payer d’abord.

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