Alain Berset le conseiller fédéral est mort, vive Alain Berset le secrétaire général du Conseil de l’Europe? Le socialiste, qui vient tout juste de quitter le gouvernement, a de bonnes chances de réussir sa reconversion, même si l’Estonien Indrek Saar et le Belge David Reynders se trouvent sur sa route.
Mais le ministre sortant a-t-il eu les yeux plus gros que le ventre en briguant ce poste? À l’inverse, au vu de sa stature, aurait-il pu espérer un meilleur rebond professionnel? Plus généralement, quel est le poids d’un ex-conseiller fédéral sur le marché de l’emploi? Pour le savoir, Blick s’est entretenu avec Marc-Antoine Glauser, associé et consultant senior chez le réputé cabinet de chasseurs de têtes Alec Allan & Associés, à Genève.
Au bout du fil, l’ancien avocat et spécialiste en recrutement juridique, bancaire et financier avoue en riant avoir déjà essayé d’estimer la valeur d’un conseiller fédéral. «Je n’en ai pas dans ma base de données, donc je n’ai jamais été concrètement face à cette problématique, mais on constate que les conseillers fédéraux fraîchement à la retraite ont tendance à se reconvertir dans des conseils d’administration, à l’instar de Doris Leuthard, qui siège dans différents cénacles, amorce-t-il. Sans même parler de leur rente à vie, c’est une manière de faire qui permet relativement facilement de maintenir son niveau de vie.»
Pourquoi pas un CEO!
Cette voie classique ne serait pas que synonyme de retraite dorée. «Même si notre système de milice fait que nous ne sommes pas à l’abri de quelques surprises, les ministres tournent les talons après avoir dirigé des départements constitués de plusieurs centaines d’employés, glisse l'expert. On peut donc estimer qu’ils maîtrisent tout ce qui touche à la gestion humaine et stratégique.»
Sur le fond, Marc-Antoine Glauser ne voit pas un conseiller fédéral se reconvertir en «simple employé». «À la limite, pourquoi pas CEO d’une grande société, lance-t-il. Selon moi, l’étiquette politique n’est pas un frein. La preuve: même un homme très marqué à gauche comme Christian Levrat est devenu patron (ndlr: l’ancien sénateur socialiste fribourgeois est actuellement le président du conseil d’administration de La Poste).»
Des liens internationaux précieux
Et pour revenir à Alain Berset et à sa candidature de secrétaire général du Conseil de l’Europe? «Si on suit les analyses des médias, il a de bonnes chances de parvenir à ses fins, note Marc-Antoine Glauser. Maintenant, sur le plan purement professionnel, a-t-il misé sur le bon cheval? Soyons francs: on n’entend peu parler de cette institution. Cependant, cette fonction permettrait à Alain Berset de maintenir ses contacts avec des hommes d’États. J’imagine que c’est une position très prenante qui a du sens à ses yeux. Vu son appartenance politique, cette potentielle nouvelle activité lui éviterait de vendre son âme au privé.»
Un choix a priori avisé, donc. «Le plus facile resterait sans doute de se retirer de la vie publique, de monter une société de conseil et de cumuler quatre ou cinq gros conseils d’administration, souligne encore notre interlocuteur du bout du Léman. Il n’y a toutefois pas de parcours obligé, de voie toute tracée. Chacun, en fonction de son profil et de ses compétences, peut espérer rebondir à sa manière.»