Blast, un média français, a investigué pendant plus de six mois sur le milieu des «newsletters alternatives» en Suisse. Cet été, à l’aube de la publication d’une double enquête révélant notamment «l’ambiance délétère» qui régnerait au sein du groupe de marketing digital Vivara dont le siège est à Lausanne, le média assure avoir reçu un appel du tribunal civil de Genève lui interdisant de publier le nom d’un des managers de la société.
Cette procédure, dite de «mesures provisionnelles», a été initiée par Maître Nicolas Capt, avocat du cadre concerné par les révélations, écrivent nos confrères le 8 décembre. Le motif invoqué? L’article à paraître de Blast constituerait une atteinte «imminente et propre à causer un préjudice grave à son client». Le juriste genevois a également ajouté que les informations révélées ne seraient pas d’intérêt public.
«Procès-bâillon»
«N’ayant pas les moyens de se faire représenter par un avocat suisse», le média s’est présenté sans défense à la barre du tribunal du bout du Léman. Sans succès. Il a été condamné à ne pas publier le nom de ce manager et à rembourser 1700 francs. Alors que Blast parle d’une «amende», l’avocat Nicolas Capt rétorque qu’il s’agit du «montant correspondant au remboursement des frais de justice». Cette mesure temporaire attend une décision finale.
Dans un article paru le 8 décembre sur leur site, nos confrères parlent d’un «procès-bâillon». Ils dénoncent une juridiction suisse qui empêche les journalistes de faire leur travail et qualifie ces mesures provisionnelles de «muselière de la presse suisse».
Décourager les journalistes
Cet article donne également la parole à plusieurs journalistes suisses. Parmi eux, le cofondateur de Gotham City, François Pilet. Pour lui, le recours aux mesures provisionnelles est «utilisé par des personnes puissantes qui veulent retarder un article ou tenter de nous (ndlr: les journalistes) décourager. Il s’applique très largement en Suisse et il est très facile à mettre en œuvre.»