Au nom de la sécurité du pays
Un élu refuse de laisser mourir la dernière fabrique suisse de munitions

L'UDC et Le Centre luttent pour le maintien de la fabrique de munitions Swiss P Defence à Thoune (BE). Si elle venait à disparaitre, la Suisse deviendrait dépendante de l'étranger. Une menace pour la sécurité du pays.
Publié: 06:10 heures
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Dernière mise à jour: il y a 47 minutes
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La Confédération a vendu la fabrique de munitions Ruag Ammotec au fabricant d'armes italien Beretta, deux semaines après le début de la guerre en Ukraine.
Photo: Ruag
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Daniel Ballmer

Werner Salzmann peut être très tenace quand il faut. Le conseiller aux Etats bernois de l'Union démocratique du Centre (UDC) est convaincu de son choix. Soutenu par une alliance entre l'UDC et le Centre, il fait une nouvelle tentative pour sauver la fabrique de munitions Swiss P Defence. Car si l'entreprise de Thoune venait à disparaître, la Suisse deviendrait dépendante de l'étranger, «ce qui serait fatal en termes de politique sécuritaire».

En mars déjà, le Conseil fédéral avait expliqué qu'il ne souhaitait pas racheter la fabrique de munitions au groupe italien Beretta. L'ancienne filiale de Ruag appartenait à la Confédération jusqu'en 2022. Mais le nouveau propriétaire a tiré la sonnette d'alarme il y a près d'un an, annonçant une potentielle disparition de l'entreprise. Des dizaines de licenciements avaient alors eu lieu.

Le risque de faillite serait dû à la rigueur du régime d'exportation suisse. Sans Swiss P Defence, l'armée suisse se retrouverait donc sans fabricant de munitions dans son propre pays.

«Le Conseil fédéral a reconnu que la vente était une erreur»

De plus, le rachat de l'entreprise par la Confédération poserait aussi problème: même dans un tel scénario, Swiss P Defence devrait être rentable. La conseillère fédérale en charge de la Défense de l'époque, Viola Amherd, avait expliqué la problématique au Conseil des Etats: «La Confédération ne peut pas compenser chaque année des déficits sous prétexte que nos exportations diminuent, ou qu’elles pourraient s’effondrer si nous perdons notre crédibilité comme partenaire.»

Pour l'instant, Swiss P Defence est encore protégée durant cinq ans, grâce à une garantie de site convenue avec son acquéreur. Mais après ce délai, on craint que ce soit la fin, et avec elle, la sécurité de l'approvisionnement suisse.

A noter que la vente a eu lieu deux semaines après le début de la guerre en Ukraine. Depuis, la situation sécuritaire en Europe s'est considérablement aggravée. Werner Salzmann veut donc savoir comment le Conseil fédéral compte maintenir la fabrique de munitions dans le pays: «Après tout, même le Conseil fédéral a reconnu après coup que la vente était une erreur.»

La Confédération doit coopérer avec la fabrique

Werner Salzmann ne baisse pas les bras. Avec ses collègues, il veut charger le Conseil fédéral de conclure une coopération stratégique en matière d'armement avec Swiss P Defence, afin d'empêcher le départ de l'entreprise et garantir la production de munitions en Suisse. La Confédération pourrait augmenter ses achats ou permettre le recours au chômage partiel. «La production de munitions ne doit pas disparaître de Suisse.»

L'annonce de Swiss P Defence de cette semaine donne un peu d'espoir. Elle a conclu un contrat de partenariat avec la société française Eurenco, qui règle la livraison de propulseurs de petit calibre pour les sept prochaines années. Cela contribuera à la viabilité et à la stabilité à long terme de l'entreprise.

Mais les politiques ne veulent pas s'en remettre uniquement à cela. Pour pouvoir maintenir l'industrie de l'armement en Suisse, le Parlement se concentre avant tout sur le droit du matériel de guerre. Mais depuis le début de la guerre en Ukraine, la discussion n'avance pas. Cet été, le Parlement a voulu débattre d'une nouvelle proposition de solution pour faciliter à nouveau les possibilités d'exportation. Mais le débat continue de tourner en rond.

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