Le conseiller fédéral Guy Parmelin est réputé pour sa gentillesse. Ce qui rend d’autant plus étonnant le fait qu’il garde les journalistes à distance lors de ses déplacements à l’étranger. Contrairement à Albert Rösti, son collègue de l'Union démocratique du centre (UDC) au collège exécutif, le Vaudois refuse, depuis son entrée en fonction en 2016, d’embarquer des journalistes dans le jet du Conseil fédéral, par principe.
«Les journalistes peuvent interviewer le conseiller fédéral Parmelin à l’étranger. Mais dans le jet du Conseil fédéral, une proximité se crée et peut devenir problématique pour les deux parties», explique son porte-parole, Urs Wiedmer, pour justifier la position du chef du Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DFER).
Aucun traitement de faveur
«Un voyage dans le jet du Conseil fédéral peut être interprété comme un traitement de faveur. Nous traitons tous les journalistes de la même manière: chacun organise son propre déplacement et peut couvrir l’événement en toute indépendance», insiste Urs Wiedmer.
Durant une phase sensible du dossier européen, Guy Parmelin avait fait une exception pour un journaliste de la SSR. Des attentes s'étaient alors créées et n’avaient pas pu être satisfaites, explique Urs Wiedmer. Il n’y aura donc plus d’autres dérogations, annonce-t-il. Et de se fendre d'une petite pique à l'adresse des journalistes: «On ne peut pas critiquer le jet du Conseil fédéral comme un palais des airs et vouloir simultanément en profiter.»
Berset et la bouteille de champagne
En marge de sa cérémonie présidentielle, Guy Parmelin a avancé un autre argument, en référence à une image prise en 2023 par le président de la Confédération de l’époque, Alain Berset, lors d’un vol vers Abu Dhabi. Le porte-parole du socialiste, Christian Favre, y célébrait son anniversaire, et Alain Berset lui avait offert une bouteille de champagne. Une photo publiée dans la «Schweizer Illustrierte» montrait une collaboratrice à ses pieds, ainsi que les diplomates Maya Tissafi et Natalie Kohli en pleine célébration.
Le président du Centre de l’époque, Gerhard Pfister, s’était alors moqué d'Alain Berset sur X, le qualifiant d’oligarque. «Cette polémique me confirme qu’il ne faut pas emmener de journalistes. Je veux pouvoir parler discrètement dans le jet du Conseil fédéral, explique Guy Parmelin à Blick. Le temps de voyage est souvent aussi du temps de travail, consacré à la préparation des entretiens et des négociations: cela ne peut pas se faire sous les yeux du public».
Le conseiller fédéral évoque également un certain droit à la vie privée: «Je veux aussi pouvoir plaisanter sans craindre de voir chaque mot publié. Je ne veux pas être comme César et devoir tout contrôler.»
Parmelin est différent de Berset
Ce que Guy Parmelin oublie, c'est que les médias sont en difficulté financière et n’ont plus les moyens de financer de coûteux déplacements. Le Conseil fédéral, lui, vient toutefois d’acquérir un jet extra-large pouvant accueillir de nombreux journalistes gratuitement. Le porte-parole de Guy Parmelin balaie l’argument: «Un jet du Conseil fédéral n’est pas une aide indirecte aux médias.»
Le conseiller national du Centre Gerhard Pfister ne trouve pas cette justification convaincante: «Je crois le conseiller fédéral Parmelin capable de se comporter différemment d'Alain Berset.»
Le Vaudois n’est d’ailleurs pas le seul membre du gouvernement à garder ses distances avec la presse: la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter, très soucieuse de son image, refuse elle aussi d’emmener des représentants des médias avec elle.