Record du monde sportif ou coup de comm' lucratif? Le nageur, influenceur et entrepreneur vaudois Noam Yaron est au cœur d'une enquête de la RTS publiée ce dimanche 21 décembre. Sa traversée entre Calvi et Monaco en août dernier, avortée à 2 kilomètres de son but, suscite des doutes… tout comme ce que devient l'argent qu'il récolte pour ses exploits.
Dans sa communication, l'éco-aventurier de 28 ans parle de ses 191 km parcourus – pour 102 heures et 24 minutes passées en mer – comme d'un record du monde en faveur de l'environnement. Mais plusieurs points ont fait tiquer les journalistes derrière l'émission «Vraiment». Selon leurs informations, «ce record n'en est pas un».
Les éléments de la RTS
Tout d'abord, aucun organisme dédié n'a ratifié la performance sportive comme un record. D'un côté, la World Open Water Swimming Association (WOWSA) a refusé l'homologation de la traversée en raison de l'assistance reçue – il portait une combinaison et un bateau le précédait. De l'autre, la Fédération internationale de natation en eau libre (WOWSF) a certifié à distance les conditions de nage, mais évoque d'autres nageurs ayant effectué des traversées plus longues. Reste à savoir ce qu'en fera le Guinness Book…
Le média de service public a interrogé un chercheur en sciences du sport à l'Université de Lausanne. Pour lui, avec les données GPS à disposition et en l'absence de preuve visuelle ou d'expert indépendant présent sur place, impossible de certifier que Noam Yaron a bien effectué la distance qu'il prétend à la nage... ni qu'il a triché. Une précédente performance qualifiée de record, sa traversée du Léman à la nage en 2021, avait déjà fait l'objet de doutes.
- Le financement participatif de sa campagne «M³», censé participer à la préservation des eaux de la Méditerranée, reviendrait à l'association Objectif Environnement. Gérée par les proches de Noam Yaron, son but serait «avant tout de 'soutenir la réalisation de défis sportifs en faveur de l’environnement', dont ceux du nageur», relate la RTS.
- Les 40'000 francs de subventions publiques reçues pour un projet de récolte «record» de mégots de cigarettes (Water Lover Challenge). Selon les documents transmis à la RTS par l'Office fédéral de l'environnement, récolter 1 million de mégots en 10 jours était une condition à l'octroi de financement. Mais la méthode de comptage du nageur interroge.
- Le fait que Noam Yaron assure avoir «appris à dormir en nageant, grâce à une méthode d’hypnose». Cette capacité à nager «comme les dauphins» est mise en doute par plusieurs scientifiques spécialistes du sommeil.
- Sont aussi questionnées ses relations avec des sponsors comme Nivea, ou encore le financement participatif d'un projet de série, qui s'est terminé, selon la RTS, par une condamnation de Noam Yaron par la justice vaudoise.
- Le financement participatif de sa campagne «M³», censé participer à la préservation des eaux de la Méditerranée, reviendrait à l'association Objectif Environnement. Gérée par les proches de Noam Yaron, son but serait «avant tout de 'soutenir la réalisation de défis sportifs en faveur de l’environnement', dont ceux du nageur», relate la RTS.
- Les 40'000 francs de subventions publiques reçues pour un projet de récolte «record» de mégots de cigarettes (Water Lover Challenge). Selon les documents transmis à la RTS par l'Office fédéral de l'environnement, récolter 1 million de mégots en 10 jours était une condition à l'octroi de financement. Mais la méthode de comptage du nageur interroge.
- Le fait que Noam Yaron assure avoir «appris à dormir en nageant, grâce à une méthode d’hypnose». Cette capacité à nager «comme les dauphins» est mise en doute par plusieurs scientifiques spécialistes du sommeil.
- Sont aussi questionnées ses relations avec des sponsors comme Nivea, ou encore le financement participatif d'un projet de série, qui s'est terminé, selon la RTS, par une condamnation de Noam Yaron par la justice vaudoise.
Le jeune homme n'a pas répondu aux questions de la RTS durant l'enquête. Sur LinkedIn ce mardi 23 décembre, il s'attaque point par point à ce qu'il juge être «un récit» visant à «mettre en doute» ses «réalisations sportives et environnementales». Blick a pu l'interviewer, un exercice qui s'est déroulé par écrit, après négociations avec Noam Yaron.
Qu'est-ce qui vous pousse à accuser la journaliste de nourrir «un récit», «une thèse déjà écrite» ou de vouloir salir votre image?
Pendant près de trois mois, la journaliste a sollicité de manière répétée et insistante mon équipe, mes collaborateurs, mes partenaires, mes sponsors, ainsi que plusieurs personnes présentes à bord lors de la traversée. Malgré ce volume de démarches, aucun témoignage direct des personnes embarquées, qui sont pourtant les sources les plus légitimes pour établir les faits, n’est utilisé pour documenter le déroulement réel de la nage. Ce décalage entre l’ampleur des démarches engagées, la durée de l’enquête et l’absence totale de faits établis laisse penser que la publication répondait moins à la mise au jour d’éléments vérifiables qu’à la nécessité de produire un contenu polémique pour faire le buzz.
Pourtant, vous avez décidé de ne pas leur répondre...
Lorsque aucune preuve ne vient étayer les soupçons avancés, mais que le sujet est tout de même diffusé en s’appuyant sur des doutes et des insinuations, la démarche ne relève plus de l’information factuelle, mais d’une logique de mise en tension et de captation d’attention sur mon image. Ce choix éditorial interroge sur les motivations qui ont prévalu à la diffusion de cette émission à la RTS: non pas l’éclairage des faits, mais la recherche d’un impact médiatique, au détriment de la rigueur et de la neutralité attendues. Tout ça pour entacher mon image.
L’enquête de la RTS assure que ce que vous qualifiez de record du monde «n’en est pas un». Qu’est-ce qui vous permet d’affirmer le contraire?
Ce qui définit un record, ce sont les faits sportifs, pas une appréciation d’un média, ni une procédure commerciale. La traversée Calvi–Monaco de 191 km, réalisée en 102h24 sans sortie de l’eau, correspond, à ce jour, à la plus longue nage jamais effectuée en mer dans ces conditions: en combinaison, sans sortir de l’eau et sans courant favorable continu. A ma connaissance, et à celle des instances sportives spécialisées consultées, aucune performance équivalente n’a été documentée dans ce cadre. Cette nage a été validée par la World Open Water Swimming Federation (WOWSF), une fédération internationale spécialisée en nage en eau libre, avec un suivi de règles précises, un contrôle continu des données GPS, une vérification des vidéos et des rapports de témoins. Cette validation existe et a été réalisée conformément aux règles définies en amont et rendues publiques sur notre site depuis près d’un an.
Ce n'est pas la seule instance citée par la RTS...
Le Guinness World Records (GWR) a été contacté a posteriori pour une raison simple et transparente: une validation anticipée implique des coûts très élevés, souvent de plusieurs dizaines de milliers de francs. Comme de nombreux athlètes, nous avons fait le choix de consacrer ces ressources au projet lui-même et à sa mission de sensibilisation pour la Méditerranée plutôt qu’à une procédure administrative préalable. Le dépôt d’un dossier au GWR après la performance est une pratique courante. Dans ce contexte, la WOWSA a également été sollicitée afin de compléter le dossier technique transmis au Guinness World Records et de faciliter son instruction, même si notre nage ne correspondait pas à leurs critères de nages dites «non assistées» en raison du port d’une combinaison, choix assumé, annoncé dès le départ et pleinement cohérent avec les objectifs environnementaux et sanitaires de la traversée. Cela nous a permis de réduire de plus de 90% la surface de la peau à protéger du soleil avec de la crème, quand bien même la marque que l’on a utilisée avait des formulations jusqu’à 92% biodégradables.
Et sur l'usage du terme «record du monde»?
Il est important de rappeler que l’expression «record du monde» n’est ni juridiquement protégée ni réservée à une seule entité privée. Elle est factuellement et légalement utilisable pour décrire une première mondiale, dès lors que le périmètre est clairement défini, documenté et encadré par des instances sportives spécialisées reconnues: ce qui est le cas ici. Affirmer que cette performance «n’est pas un record» revient à confondre une réalité sportive documentée et ratifiée par une organisation spécialisée avec une validation administrative et commerciale relevant d’un ouvrage grand public comme le GWR. Le Guinness World Records est un livre de référence médiatique, pas une autorité sportive. La performance, elle, existe indépendamment de son inscription dans ses pages. Sur le plan sportif, les faits sont établis, vérifiables et déjà validés.
Vous récoltez des dons et du sponsoring pour l’association Objectif Environnement, dirigée par vos proches. Concrètement, quels projets environnementaux cet argent finance-t-il?
L’association Objectif Environnement finance des projets sportifs à impact environnemental, des actions de sensibilisation à grande échelle et les moyens opérationnels nécessaires pour les mener efficacement. Concrètement, les fonds récoltés servent à:
- déployer des campagnes de sensibilisation massives auprès du grand public, des écoles, des communes et des entreprises
- organiser des actions à fort impact mesurable, comme le Water Lover Challenge: la grande collecte de mégots
- financer la logistique, la coordination et la sécurité de projets d’envergure comme la traversée Calvi–Monaco, qui servent de support aux campagnes de sensibilisation
- permettre l’accès scientifique à des zones difficiles ou peu accessibles, l’embarquement de chercheurs et la collecte de données environnementales
- structurer des projets sur la durée, avec une vision à long terme
Ce cadre est public, transparent et connu depuis le départ: il ne relève ni d’une découverte récente, ni d’un changement de fonctionnement, ni d’un quelconque manquement à nos statuts.
Et concernant sa gouvernance?
Tout est parfaitement transparent et public. La composition de l’association est accessible publiquement au registre du commerce. Et toutes les entités – institutions, fondations, mécènes ou partenaires – qui ont été approchées, connaissent ce fonctionnement dès le départ. Ce modèle est courant dans le monde associatif lorsqu’il s’agit de porter des projets de terrain ambitieux qui défendent des sujets comme l’environnement: il permet de réunir des ressources pour mener des actions qui, sans structure associative dédiée, resteraient difficiles voire impossibles à financer ou à coordonner. L’association existe précisément pour donner un cadre clair, contrôlable et professionnel à des actions d’intérêt général. Enfin, le but d’Objectif Environnement n’est pas de financer des individus, mais de rendre possibles des actions concrètes pour le bien commun, avec des moyens visibles, traçables et mesurables. C’est cette structure qui permet de transformer des ressources en impact environnemental réel et incontestable, plutôt que de rester au stade des intentions.
L’émission qualifie de «pas énorme» la somme que vous reversez à la science et à l’environnement, évoquant 2,9% de votre budget. Que répondez-vous?
La comparaison fondée sur un pourcentage isolé du budget est trompeuse, car ce projet n’est pas un fonds de recherche, mais une campagne de sensibilisation environnementale à grande échelle, dont l’impact se mesure avant tout par ses indicateurs de performance. Sur l’exercice en cours, le budget global de la campagne, incluant la production, la gestion du projet, la logistique, la sécurité, la coordination, les équipes, la communication et la sensibilisation, s’élève à environ 500'000 francs. A ce stade, la campagne a généré environ 161 millions de vues sur les réseaux sociaux, chiffre en constante évolution et vérifiable via les rapports des plateformes utilisées. Rapporté à ce seul périmètre, cela représente un coût pour mille vues (CPM) d’environ 3,10 francs, tout compris.
Cela correspond-il aux standards de ce type de campagnes?
Si l’on intègre en plus l’impact médiatique mesuré par notre agence de relations presse, estimé à environ 70 millions d’impressions supplémentaires, on atteint un total cumulé de près de 231 millions d’impressions au total, ce qui ramène le CPM global à environ 2,15 francs. A titre de comparaison, un CPM moyen en publicité classique (valeur média seule, sans production ni gestion de projet) se situe généralement entre 8 et 10 francs en Europe, avec de fortes variations selon les marchés et les plateformes. Ici, ce CPM inclut non seulement la diffusion, mais aussi la création des contenus, la mise en œuvre d’actions de terrain, la coordination scientifique et une campagne de sensibilisation complète. Ces chiffres montrent que l’argent a été investi de manière extrêmement efficiente pour maximiser la visibilité des enjeux environnementaux liés à la Méditerranée. En termes d’impact, de portée et de coût par contact, la campagne se situe au-delà des standards habituels du secteur et ses résultats ont été salués par de grandes organisations internationales.
Vous vous estimez capable de «dormir en nageant», c'est-à-dire «comme un dauphin» avec une seule moitié de votre cerveau mobilisé. Que faites-vous de la parole des scientifiques du sommeil?
Je n’ai jamais affirmé éteindre un hémisphère de mon cerveau au sens scientifique ou médical. J’ai parlé, de manière imagée, du fait qu’une partie de mon cerveau et certaines fonctions cognitives passent au second plan pendant un effort d’ultra-endurance, tandis que d’autres restent actives. Les propos cités décrivent un ressenti vécu en conditions extrêmes: baisse de vigilance, automatisation des gestes, concentration réduite à l’essentiel (respiration, cadence automatique, orientation). Ce phénomène est bien connu chez les athlètes d'ultra-endurance et les navigateurs au long cours, et il est souvent résumé par l’expression pilotage automatique. Je ne me suis jamais présenté comme un scientifique ni comme un spécialiste du sommeil. Je n’ai jamais prétendu reproduire le sommeil unihémisphérique des dauphins, mais ai simplement fait le parallèle que certaines espèces étaient capables de le faire. Mes propos sont la simple description d’une expérience humaine vécue sur le terrain. D’ailleurs, aucun des experts interrogés dans l’émission n’a remis en cause mes propos sur le fond.
Vous avez reçu des subventions de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) pour la collecte d’un million de mégots. Votre méthode de calcul est questionnée: avez-vous réellement récolté ces mégots?
Oui, les mégots ont bien été récoltés. Nous sommes aujourd’hui l’une des actions les plus efficaces avec ce procédé: pas de gros événements organisés, mais une mobilisation volontaire à travers le pays. La question porte uniquement sur la méthode de comptage, qui repose sur une estimation et non sur un comptage unitaire, ce qui est courant dans la plupart des opérations de collecte menées à grande échelle pour faciliter la participation du grand public – jeune et moins jeune. Le nombre de mégots collectés est estimé à partir de volumes et d’équivalences standardisées comme des bouteilles, des sacs ou des pesées. Cette méthode est cohérente, reproductible et suffisamment précise pour évaluer l’ampleur réelle des collectes. Il est d’ailleurs facilement vérifiable qu’une bouteille de 0,5 litre contient bel et bien en moyenne environ 250 mégots, selon leur compression et leur état. Une simple vérification empirique permet de le constater.
Ce n'est pas ce que dit l'enquête de la RTS...
Dans l’émission, un chiffre de 150 mégots par bouteille est avancé sans démonstration et sans visuel probant. Sur cette base bancale, la journaliste tente de décrédibiliser mon comptage, sans tenir compte ni du nombre total de bouteilles, ni de leur niveau réel de remplissage. Ces informations sont tronquées sur l’arrêt sur image. Un tel raisonnement, partiel et approximatif, ne permet pas de remettre en cause sérieusement une estimation globale fondée sur des volumes consolidés. Par ailleurs, le succès du Water Lover Challenge n’a jamais été conditionné au nombre de mégots collectés. Les fonds de l’OFEV n’ont pas été attribués sur la base d’un comptage unitaire, mais sur la pertinence du projet, sa capacité de mobilisation, son impact visible sur le terrain et sa cohérence globale. Des éléments qui peuvent être constatés et vérifiés. L’OFEV a soutenu le projet dès sa création et pendant quatre années consécutives, avant de considérer que le sujet avait atteint un niveau de maturité suffisant. Cette information factuelle, pourtant essentielle pour comprendre le cadre du soutien public, n’a pas été mentionnée. A nouveau, on observe une démarche qui ne vise pas à comprendre ou à contextualiser les faits, mais à fragiliser la crédibilité du projet par des raccourcis méthodologiques. Lorsque l’on privilégie des approximations isolées plutôt qu’une analyse complète et vérifiable, l’objectif ne semble plus être l’information, mais la mise en doute à tout prix.
La RTS souligne vos partenariats avec Nivea pour la crème solaire, une banque qui investit dans le fossile, ainsi que votre apparition aux côtés d’un cadre de Philip Morris. Doit-on en conclure que vous servez le greenwashing d’entreprises polluantes?
Non. Participer à un projet ou y contribuer ne vaut ni caution globale, ni validation de l’ensemble des activités d’une entreprise. Concernant Nivea, le partenariat répondait à un besoin concret de sécurité et de santé dans le cadre d’un effort extrême. La mention correcte, que j’utilise dans mes communications, est «jusqu’à 92% biodégradable», car les références de la gamme présentent des niveaux variables. Cette précision figure dans ma communication pour conserver une flexibilité d’usage (spray, brume,…) selon les conditions et les produits disponibles. Nous ne sommes ni chimistes ni toxicologues: nous avons interrogé la marque et suivi les informations officielles. A ce jour, aucun expert ni partenaire scientifique avec lesquels nous collaborons n’a remis en cause ce choix. Surtout, nous avons drastiquement réduit l’usage de crème solaire en nageant en combinaison couvrante, laissant exposée environ 10% de la surface du corps. La logique était simple et assumée: limiter au maximum l’usage et privilégier, lorsque possible, des formulations parmi les plus avancées du marché en termes de biodégradabilité.
Et vos liens avec la banque Richelieu?
Il s’agit d’un partenariat de mécénat, pas d’un soutien opérationnel à une politique d’investissement. Je ne suis pas responsable du portefeuille global d’un mécène, pas plus qu’une ONG, une université ou un musée ne portent la responsabilité de l’ensemble des investissements de leurs donateurs. La question est pragmatique: refuse-t-on des soutiens qui permettent d’agir concrètement, ou encourage-t-on leur fléchage vers des actions positives? Je choisis la seconde option. Dans ce cadre, ces soutiens ont permis de sensibiliser massivement, de faciliter l’accès scientifique sur une zone éloignée de la côte et de faire avancer la protection du milieu marin.
Mais Philip Morris, tout de même?
L'entreprise a mandaté l’association pour les accompagner dans l’organisation d’une collecte de mégots et pour en faire une action de sensibilisation interne dans le cadre du Water Lover Challenge 2025. Près de 100 collaborateurs, dont des membres du top management, y ont participé. Le message publié ensuite par un vice-président de l’entreprise témoigne précisément de l’impact concret de cette démarche: prise de conscience, remise en question et volonté d’agir. C’est exactement l’objectif recherché. Plus largement, la question est celle de la méthode pour faire avancer les choses dans un domaine aussi complexe que la durabilité.
Quelle est votre position personnelle au sujet de ces partenariats remis en cause?
Soit on tourne le dos aux entreprises et l’on accepte un immobilisme confortable, difficilement attaquable mais peu efficace en termes d’impact. Soit on choisit de se rapprocher d’elles, de comprendre leurs contraintes et d’utiliser des leviers d’influence pour favoriser des évolutions concrètes de l’intérieur. J’assume clairement cette seconde approche, qui repose sur des outils simples mais puissants: le dialogue, l’influence et la communication. Ce sont précisément ces leviers qui, jusqu’à présent, ont permis d’obtenir des résultats.
Ce n'est donc pas, selon vous, du greenwashing?
Qualifier cela de greenwashing, c’est confondre collaboration pour agir et caution idéologique. Et plus largement, c’est oublier une réalité simple: on n’a jamais fait évoluer qui que ce soit en l’attaquant. Que ce soit pour transformer des entreprises ou pour faire progresser des causes d’intérêt général, la confrontation stérile produit surtout de la défiance et de l’immobilisme. Le progrès naît du dialogue et de la capacité d’inspirer le changement positif.
Êtes-vous touché par cette mise en doute de votre travail?
Je respecte profondément le journalisme et celles et ceux qui l’exercent avec rigueur et honnêteté, que j’ai eu la chance de côtoyer à de nombreuses reprises ces dernières années. Avec plus de 300 apparitions médiatiques cette année, cette émission constitue d’ailleurs la seule couverture négative, ce qui en dit long sur le décalage de son traitement par rapport au reste du travail journalistique mené autour de mes projets. C’est précisément pour cette raison que je ne peux accepter qu’un média de service public, financé par les citoyens, consacre plusieurs mois de travail à installer le doute sans produire un seul élément factuel permettant d’étayer les soupçons avancés, surtout lorsqu’il s’agit de s’en prendre à un Suisse qui tente, en mettant sa vie en jeu, de faire avancer une cause que nous devrions collectivement défendre.
C'est la rançon de votre succès?
Je l’assume pleinement. Mais le débat public mérite mieux que des insinuations lorsque les faits sont établis, documentés et vérifiables. Il mérite de la responsabilité, de la proportion et du contexte, d’autant plus lorsqu’il émane d’un média de service public, financé par nous toutes et tous. C’est à cette exigence de rigueur, de cohérence et de respect du public que je continuerai de me tenir, sans détour ni compromis.