Le graphisme devient politique
Gros malaise à l'UNIL après l'annonce d'un nouveau logo pas au goût de tous

A peine révélé, le nouveau logo de l’Université de Lausanne est déjà très critiqué, et l'institution aussi. Plusieurs voix y voient le symbole d'une gestion «monarchique». L'institution réfute. Une interpellation à ce sujet sera déposée au Grand Conseil vaudois mardi.
Publié: 06:14 heures
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Dernière mise à jour: 08:03 heures
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Ce logo a été présenté ce vendredi 23 mai à l’occasion du Dies Academicus, la cérémonie annuelle officielle de l'UNIL.

Le nouveau logo de l’Université de Lausanne (UNIL) ne fait pas l’unanimité – mais pourrait-il vraiment convaincre tout le monde? «Il me fait penser à ce qu’il se passe quand la télé déconne», confesse un étudiant en Sciences de l’environnement. «On voit qu’ils ont subi des coupes budgétaires», ironise une autre, en études de Lettres, au sujet du graphisme présenté ce vendredi 23 mai au Dies Academicus – événement lors duquel le ministre Frédéric Borloz (PLR) a été chahuté par des militants propalestiniens.

Au-delà des boutades estudiantines, plusieurs membres du Conseil de l’université et de la communauté universitaire font remonter à Blick que ce logo serait «la goutte d’eau qui fait déborder le vase». «C’est symptomatique des dysfonctionnements au sein de notre institution», lance un professeur qui souhaite rester «strictement anonyme», de peur des conséquences que pourrait avoir une critique de son employeur.

Les raisons du changement de logo

Depuis 1981, l'UNIL en est à son cinquième logo. Sur son site, l'institution explique que son changement de design s’inscrit dans la dynamique «de la digitalisation de nos modes de travail et de communication». Objectif affiché? «Marquer plus fortement notre présence en ligne et améliorer l’impact de notre communication».

C'est l'agence genevoise Base Design qui s'est occupée de cette identité visuelle qui «sera déployée progressivement dès la rentrée de septembre». L'UNIL y voit «un tournant important, qui accompagnera et soutiendra nos projets à venir». En trois points, le directeur de la communication de l'UNIL, Philippe Gagnebin, explique à Blick les raisons de ce nouveau logo (et de la disparition de l'ancien). 

1. Il est question d'une «identité plus contemporaine et plus conforme à l'usage numérique». Ce nouveau logo a été conçu pour être plus facilement utilisable en digital. L'ancien, calligraphié et créé pour le papier, «manque d'impact visuel» et «devient vite illisible quand on réduit sa taille», par exemple pour créer une image de profil sur les réseaux sociaux.

2. L'ancien logo faisait «pâle figure» au milieu des autres logos d'institutions et d'écoles, en Suisse et dans le monde. «Notre logo très fin cohabitait avec d'autres logos massifs, comme celui du CHUV ou de l'EPFL par exemple, et ça n'allait pas.»

3. Enfin, le précédent logo serait répétitif. Au total, il est écrit trois fois «Université de Lausanne» ou «UNIL». «C'est le signe d'une institution qui n'est pas sûre d'elle», explique le responsable. D'ou le point final «affirmé» qui fait son apparition.

Depuis 1981, l'UNIL en est à son cinquième logo. Sur son site, l'institution explique que son changement de design s’inscrit dans la dynamique «de la digitalisation de nos modes de travail et de communication». Objectif affiché? «Marquer plus fortement notre présence en ligne et améliorer l’impact de notre communication».

C'est l'agence genevoise Base Design qui s'est occupée de cette identité visuelle qui «sera déployée progressivement dès la rentrée de septembre». L'UNIL y voit «un tournant important, qui accompagnera et soutiendra nos projets à venir». En trois points, le directeur de la communication de l'UNIL, Philippe Gagnebin, explique à Blick les raisons de ce nouveau logo (et de la disparition de l'ancien). 

1. Il est question d'une «identité plus contemporaine et plus conforme à l'usage numérique». Ce nouveau logo a été conçu pour être plus facilement utilisable en digital. L'ancien, calligraphié et créé pour le papier, «manque d'impact visuel» et «devient vite illisible quand on réduit sa taille», par exemple pour créer une image de profil sur les réseaux sociaux.

2. L'ancien logo faisait «pâle figure» au milieu des autres logos d'institutions et d'écoles, en Suisse et dans le monde. «Notre logo très fin cohabitait avec d'autres logos massifs, comme celui du CHUV ou de l'EPFL par exemple, et ça n'allait pas.»

3. Enfin, le précédent logo serait répétitif. Au total, il est écrit trois fois «Université de Lausanne» ou «UNIL». «C'est le signe d'une institution qui n'est pas sûre d'elle», explique le responsable. D'ou le point final «affirmé» qui fait son apparition.

«Les missions fondamentales de l’université, ce sont l’enseignement et la recherche, et non la communication. Surtout lorsque, dans le même temps, on impose à des facultés de se serrer la ceinture», enrage une membre du Conseil de l’Université. Cet organe qui représente chaque corps de la communauté universitaire interpelle régulièrement la direction sur ses pratiques.

La politique vaudoise s’empare du logo

Aussi bien le design que les conditions de création de ce nouvel emblème soulèvent de nombreuses interrogations, jusque dans la sphère politique. David Vogel, député vert’libéral au Grand Conseil vaudois, confie à Blick qu’il déposera ce mardi 27 mai une interpellation à ce sujet. En plus de son camp centriste, il a reçu des signatures de la gauche à la droite (Vert-e-s, Parti socialiste, PLR et UDC).

Dans son texte, il tacle d’entrée de jeu le recteur de l’UNIL, Frédéric Herman, dont le mandat prendra fin le 31 juillet 2026. Le député en vient à se demander si cette modification du logo officiel de l’institution n’a pas été induite par le recteur lui-même. «De mon point de vue, il n’y avait pas d’urgence particulière, détaille-t-il à Blick. Si ce n’est peut-être que Monsieur Herman voulait partir en ayant réalisé quelque chose.»

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Personne ne voulait de ce logo. Il s'agit du fait d'un prince, d'un recteur monarchique qui parle de l'UNIL comme de 'son' université
Une employée de l'UNIL impliquée dans l'institution
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Une employée de l’UNIL impliquée dans l’institution abonde en ce sens: «Personne ne voulait de ce logo. Il s’agit du fait d’un prince, d’un recteur monarchique qui parle de l’UNIL comme de 'son' université.» Colère et incompréhension semblent régner chez certaines personnes. «Ce qui me dérange le plus, c’est que la communauté n’a pas été consultée ou associée à cette démarche, continue une membre du corps enseignant. C’est imposé du haut vers le bas, sans concertation. On ne nous a pas dit ce qui dérangeait dans l’ancien logo.»

L’UNIL conteste sur plusieurs points

Ce n’est pas la version de Philippe Gagnebin, directeur de la communication de l’UNIL. «Le Conseil de l’Université a validé à l’unanimité les objectifs stratégiques de l’UNIL au printemps 2022. Le renouvellement de la stratégie de communication en faisait partie et nous les avons tenus au courant.» Reste qu’une partie du conseil en a après la direction et ses décisions – en particulier envers le recteur Herman, qui a annoncé qu’il ne se représenterait pas.

Le cadre de la communication universitaire explique que ses équipes ont réalisé «une enquête auprès d’un panel représentatif de suisses romands». Résultat? 80% de la population connaît l’acronyme UNIL, et donc la marque, explique Philippe Gagnebin. «Mais le logo calligraphié est moins connu. Et, malgré un grand capital sympathie, l’image de l’UNIL dans la population manque de caractère.»

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On a inclus les 22’000 membres de la communauté universitaire dans un sondage sur l’image de l’UNIL, mais on n’allait pas faire la démarche de création graphique à 44’000 mains
Philippe Gagnebin, directeur de la communication de l'UNIL
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D’où le lancement de démarches de renouvellement de la stratégie de communication, entamées en 2022. Et sur l’implication plus générale de la communauté universitaire? «Créer un logo est un travail de professionnel. On a inclus les 22’000 membres de la communauté universitaire dans un sondage sur l’image de l’UNIL, mais on n’allait pas faire la démarche de création graphique à 44’000 mains», explique celui qui assure avoir aussi reçu bon nombre de retours positifs au changement de logo.

Un blason à plusieurs millions?

Une autre critique qui plane sur la direction? Cette opération graphique aurait été menée sans inclure l’équipe d’UNICOM, le service ayant pour mission de renforcer la visibilité de l’UNIL auprès du public. Le député David Vogel souligne en outre que la conception de ce nouvel emblème aurait été confiée à une entreprise externe.

«C’est archifaux, réagit le responsable de la communication. Le service UNICOM, que je dirige, a été impliqué du début à la fin du projet. L’agence a simplement été mandatée par ce service qui est directement rattaché au recteur.» Le politicien évoque un coût de 120’000 francs, d’après la rumeur.

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On peut dès lors penser que la modification du logo de l'UNIL se chiffrera à hauteur de plusieurs millions
David Vogel, député vert'libéral au Grand Conseil vaudois auteur d'une interpellation sur le logo
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Et encore, la somme n’inclurait pas la modification du logo officiel de l’établissement sur tous ses documents ainsi que sur sa signalétique. «Pour mémoire, la modification du nom des bâtiments de l’UNIL avait en son temps coûté pas loin d’un million de francs pour sa mise en œuvre, rappelle David Vogel. On peut dès lors penser que la modification du logo de l’UNIL se chiffrera à hauteur de plusieurs millions.»

Là encore, Philippe Gagnebin réfute: «En 2025, il n’y aura pas de dépassement de budget pour la communication.» Il explique que la transition entre les deux logos se fera en douceur et ne sera «pas finie avant 2027, voire 2028».

Au vu des coupes demandées par l’Etat de Vaud, l’UNIL aurait-elle dû mettre en pause l’arrivée du nouveau logo? «Dès lors que le design était fait, nous avions engagé 80% de notre budget, répond le directeur de la communication. Et les 20% restants seront absorbés par le budget de l’UNICOM. On n’allait pas jeter le travail réalisé à la poubelle.»

Le Conseil d’Etat aura son mot à dire

Aux yeux des signataires du texte, ce changement de logo est «catastrophique» pour l’image de l’institution, d’autant plus qu’il se déroule à l’heure où des coupes dans plusieurs projets d’enseignement et de recherche s’abattent. Un paradoxe qui interroge sur les priorités de la direction de l’Université de Lausanne. «Nous notons au moins un point positif: le futur logo de l’UNIL sera 100% compatible avec la signalétique des Transports publics lausannois», ironise le député David Vogel dans son interpellation.

Le Conseil d’Etat vaudois devra répondre aux questions des élus signataires. L’Exécutif partage-t-il le sens des priorités de la direction de l’UNIL? Que pense-t-il du coût total induit par la modification du logo et craint-il que cette somme manque dans la recherche et l’enseignement? Et plus généralement, quel est son avis sur la gestion de cette démarche par l’université?

Difficile, pour le moment, de dire que le nouveau logo atteint son objectif de rassembler la communauté universitaire. Qui sait si l’avenir donnera raison au recteur ou à ses détracteurs? Réponse dans plusieurs années peut-être…

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