Ce mercredi 18 juin, des boîtes aux lettres ont été arrachées dans le hall de l’immeuble du 85, rue de Genève à Lausanne. Base arrière du trafic de drogue dans le canton, l'immeuble pourrit la vie de tout le quartier depuis des années.
Pour les riverains, qui documentent ce qui se passe dans l'immeuble qui leur gâche la vie, ces boîtes aux lettres décrochées pourraient signifier plusieurs choses. Expulsion de locataires par le propriétaire, d'une part, ou avancée du Ministère public dans son enquête sur le trafic – d'autant que plusieurs voisins ont remarqué une intervention de police musclée, ce matin. En fin de journée, le procureur général vaudois, Éric Kaltenrieder, confirme à Blick qu’une intervention a eu lieu ce jour, dans le cadre d’une enquête du Ministère public.
Selon les voisins, il ne resterait qu’une trentaine d’habitants au 85. «Il y a une table dans le hall d'entrée, et une pile de lettres dessus, raconte un voisin. Deux personnes contrôlent les identités des gens qui pénètrent dans l'immeuble.» Certains voisins pensent qu'il s'agit d'agents envoyés par la Ville. Mais il n'en est rien, confirme à Blick le Municipal de la Sécurité, Pierre-Antoine Hildbrand. Il s'agirait plutôt de privés, internes à l'immeuble.
Si les voisins observent avec attention les mouvements au 85, c'est que le problème dure depuis des années. Et en ce moment, les tensions ont atteint leur paroxysme. Une rencontre publique est prévue le 25 juin à 19h30 au théâtre Arsenic, en présence de Pierre-Antoine Hildbrand. Plusieurs élus de tous bords ont déjà interpellé la Ville sur la situation. En août dernier, l'élu libéral-radical Olivier Bloch était le premier à adresser plusieurs questions à la Municipalité autour des multiples nuisances vécues par les habitants du quartier. Puis, en mai dernier, sa collègue de parti Mathilde Maillard rebondissait sur une résolution de Loris Socchi (Ensemble à Gauche), demandant à l'Exécutif d'examiner «les pratiques du ou des propriétaires» du 85 rue de Genève.
Politiques vent debout
Le 24 juin, les Vert-e-s Marlyse Audergon et Ilias Panchard déposeront trois postulats. Le premier demande une stratégie globale pour les secteurs Genève-Sébeillon-Sévelin, incluant sécurité, politique socio-sanitaire, salubrité des logements, mobilité, nuisances sonores, gestion des déchets et vie de quartier. Le deuxième sollicite un renforcement de la présence d'une véritable police de proximité et des équipes socio-sanitaires, pour combiner sécurité, prévention et diminution des risques dans le quartier. Et le troisième exige de la Municipalité qu'elle agisse pour garantir la salubrité, les normes de sécurité et la légalité des travaux du bâtiment de la rue de Genève 85, quitte à exproprier son propriétaire.
Le responsable du Collectif d’habitants, créé pour faire bouger les choses, a collaboré un an et demi avec l’Observatoire de la sécurité et des discriminations, un organe de la Ville. «L’Observatoire qui observe», ironisent les riverains. En janvier dernier, sa déléguée reconnaissait pourtant dans un mail que Blick a pu consulter que la zone «subit un report de plus en plus visible de personnes consommatrices de stupéfiants, qui impacte fortement la qualité de vie et le sentiment de sécurité dans [le] quartier». Et de conclure: «Je regrette que vous en subissiez directement les conséquences jusque dans votre immeuble.»