3 femmes sur 4 victimes de VSS
Une enquête révèle l'ampleur des violences de genre à Genève. Et ça fait peur!

A Genève, une enquête révèle que 75% des femmes de 18-24 ans ont subi des violences sexistes dans l'espace public en un an. Pour la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet, ces chiffres sont inacceptables. Face à l’urgence, l’Etat promet d’agir, mais le chemin reste long.
Publié: 24.06.2025 à 14:10 heures
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Dernière mise à jour: 24.06.2025 à 16:04 heures
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Photo: keystone-sda.ch
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Alessia BarbezatJournaliste Blick

Il ne fait pas bon être une femme dans la cité de Calvin. Ni d’être une personne LGBTIQ+. C’est ce que révèle l’enquête Iceberg présentée ce matin aux médias à l’Hôtel de Ville à Genève. Une étude glaçante menée par le Bureau de promotion de l’égalité et de prévention des violences (BPEV), qui a interrogé un échantillon représentatif de 4291 personnes dans le canton.

Voyez seulement. 36% des femmes déclarent avoir subi des violences sexistes et sexuelles (VSS) sur leur lieu de travail. Ce chiffre grimpe à 77% lorsqu’il s’agit l’espace public. Insultes, harcèlement, regards insistants, attouchements, remarques sexistes, agression sexuelle ont été le lot de huit femmes sur dix au cours de la dernière année. Les personnes LGB (lesbiennes, gays, bi) ne sont pas épargnées. 44% ont été victimes de violence de genre au travail et … 85% dans l’espace public.

75% des Genevoises entre 18 et 24 ont subi des violences sexistes

Les jeunes femmes âgées de 18 à 24 ans sont particulièrement exposées. Plus de trois sur quatre déclarent avoir subi des violences dans la rue, les transports publics ou les lieux festifs au cours de l’année écoulée. Dans la très grande majorité des cas, les agresseurs sont des hommes inconnus. Résultat: une jeune femme sur trois dit avoir modifié ses habitudes de vie — en changeant d’itinéraire pour rentrer chez elle ou en évitant de sortir à certaines heures.

Les violences domestiques touchent plus durement les femmes. Une sur quatre, contre un homme sur huit, dit avoir souffert de troubles psychologiques liés à des violences au sein du couple. Et 11,3 % des femmes déclarent avoir été violées par leur partenaire ou ex-partenaire.

Dans la sphère professionnelle, une femme sur dix affirme avoir quitté son emploi à la suite de violences de genre.

«Des chiffres inacceptables»

«Ces chiffres sont inacceptables en 2025», reconnaît Nathalie Fontanet, conseillère d’Etat en charge des Finances, des Ressources humaines et des Affaires extérieures (DF).

«Cela confirme ce que nous redoutions: l’existence de violences enfouies, rarement signalées ou rapportées. Le non-recours est massif. La majorité des victimes ne demandent pas d’aide, ou se tournent uniquement vers leur entourage.»

Comment expliquer cette persistance des violences de genre? L’enquête évoque plusieurs facteurs, à commencer par des normes sociales encore largement tolérantes vis-à-vis de la violence. Les jeunes hommes (18-24 ans) se distinguent notamment par une forte adhésion à des idées patriarcales: 37,3 % d’entre eux estiment ainsi que «l’homme a naturellement plus d’autorité dans le couple».

Influence des masculinistes?

Une influence directe des discours masculinistes omniprésents sur les réseaux sociaux?

«Cela me fait penser que c’est surtout leur jeune âge qui les conduit à adopter ce genre de convictions, commente Nathalie Fontanet. Mais cela peut évoluer grâce à l’éducation. En dialoguant, en sensibilisant, en rappelant les principes d’égalité, on peut faire en sorte que ces jeunes hommes aient une vision plus équilibrée de la vie de couple et de la famille.»

L’Etat de Genève assure intensifier la lutte contre les violences domestiques, en misant sur la prévention, la sensibilisation, une meilleure prise en charge des victimes, la lutte contre le non-recours et un soutien accru aux personnes les plus vulnérables. «Nous investissons beaucoup dans la prévention, notamment en formant différents corps de métier – comme les pharmaciens, les médecins ou les proches – à reconnaître les signes de violences.»

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«L’inscription du stalking dans le Code pénal est une avancée essentielle. Ces menaces sont souvent le prélude à des violences plus graves.»
Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat genevoise
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Mais cela suffit-il, alors qu’on compte déjà 18 féminicides en Suisse depuis le début de l’année 2025? «Il faut agir en amont. L’inscription du stalking dans le Code pénal, adoptée par le Parlement le jeudi 19 juin, est une avancée essentielle, insiste la ministre. Ces menaces, ce harcèlement obsessionnel, sont souvent le prélude à des violences plus graves.»

Et de rappeler que, contrairement à la Confédération, qui a encore repoussé la mise en ligne d’un numéro d’appel national pour les victimes de violences domestiques, «le canton de Genève est aujourd’hui le seul à disposer d’un tel outil en Suisse, mais c’est vrai qu’il reste beaucoup à faire pour lutter contre ce fléau».

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