Octobre rose, c'est parti
Connaître ces 8 infos sur le cancer du sein peut vous sauver la vie

Orné de rubans roses, le mois d'octobre se dédie annuellement à la prévention du cancer du sein, qui touche plus de 6000 femmes par an en Suisse. Passage en revue des fausses idées qu'il est essentiel de corriger, à propos de la maladie.
Publié: 04:31 heures
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Pour ce début d'octobre rose. Deux experts corrigent les idées reçues à propos du cancer du sein.
Photo: Shutterstock
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

L'aube se lève sur le mois d'octobre, qui répandra, comme chaque année, ses rubans roses et ses campagnes de sensibilisation. Alors que le cancer du sein touche toujours plus de 6000 femmes et 50 hommes par an, en Suisse, les efforts de prévention ne cessent de prendre de l'ampleur. 

Contactés en masse dès la fin septembre, les spécialistes débordés répondent avec enthousiasme aux questions des médias. Car «il faut absolument en parler», insistent-ils, après s'être vaillamment débrouillés pour trouver un créneau libre dans un agenda surchargé.

Et on en parle de plus en plus, heureusement: les caracs roses font désormais partie intégrante du paysage romand, certaines marques fidèles comme Estée Lauder continuent d'estampiller des rubans roses sur leurs best-sellers et les communiqués de presse dédiés au dépistage fusent. 

Or, parmi toutes ces informations inestimables, peuvent se glisser quelques préjugés, fausses idées ou fake news dangereuses, qui ruissellent insidieusement dans nos conversations quotidiennes. Deux experts nous aident à les débusquer, afin qu'aucun malentendu ne subsiste. 

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Une grosseur dans le sein n'est pas l'unique symptôme

La terrifiante «boule» dans la poitrine, découverte par hasard sous la douche, est certes le signe d'alerte le mieux connu. Mais saviez-vous qu'il n'est absolument pas le seul?

La Dre Anita Wolfer, responsable du Centre du Sein au Service d'oncologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), rappelle en effet qu'une rougeur, une déformation du sein, une peau d'orange, un écoulement ou des mamelons qui s'invaginent subitement doivent justifier une consultation: «En règle générale, dès qu’on constate quelque chose de nouveau, il faut absolument appeler son médecin», souligne-t-elle. Et cela, même si aucune «boule» n'est palpable dans l'un des seins. 

Autre idée largement répandue: on entend souvent qu'une tumeur est, par définition, indolore. À nouveau, c'est plus compliqué que cela: «Nous recevons régulièrement des patientes ayant découvert un cancer du sein suite à l'apparition de douleurs inhabituelles, survenues en dehors des menstruations, prévient notre experte. Nous ne pouvons néanmoins pas affirmer que c’est la tumeur qui a causé les douleurs.» 

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Une «boule» peut aussi survenir sous l'aisselle

Par ailleurs, cette grosseur qu'on associe facilement au cancer ne se situe pas toujours dans l'un des seins, ce qui peut porter à confusion: en effet, la zone des aisselles est également examinée par les gynécologues, lors de certains contrôles de routine. Or, comme le constate le Docteur Khalil Zaman, médecin adjoint responsable de la consultation spécialisée de sénologie au Service d'oncologie médicale du CHUV, la présence de glande mammaire sous le bras est plutôt rare. 

Il se peut toutefois qu’un cancer du sein passé inaperçu provoque, en réaction, un gonflement d’un ganglion, situé sous l’aisselle ou à la base du cou, au-dessus de la clavicule: «Une patiente qui n’a pas senti de grosseur dans sa poitrine pourra alors consulter après avoir senti une 'boule' sous le bras, et découvrir ainsi la maladie», pointe le spécialiste. 

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Le dépistage est nécessaire, même sans symptômes

Quoi qu'il en soit, en présence ou non de «boule», il est essentiel de réaliser une mammographie, selon les consignes de votre médecin, au moins tous les deux ans, à partir de 50 ans. Pour rappel, plusieurs cantons romands ont bâti de grands programmes de dépistage gratuits, destinés aux femmes dans cette catégorie d'âge. 

Et bien qu'on ne puisse leur imputer une baisse de la mortalité liée au cancer du sein, ces initiatives permettent de poser des diagnostics plus précoces, ce qui allège les traitements. «Ces programmes permettent d'identifier des cancers asymptomatiques, souligne la Dre Wolfer. Ceux-ci sont donc débusqués en procédant directement à une mammographie 'aveugle', justement de dépistage.» 

En d'autres termes, ni la palpation, ni l'autopalpation ne représentent des mesures préventives fiables: «L’autopalpation mensuelle n’est pas recommandée, car l’efficacité de cette méthode n’est pas reconnue, précise notre experte. Sans oublier qu’elle peut provoquer beaucoup de stress, ou culpabiliser les femmes qui n’y ont pas recours. 

En revanche, il est important de bien connaître son corps, afin de pouvoir remarquer tout changement. Si une telle modification est constatée et persiste pendant plusieurs semaines, il convient de consulter un médecin et d’insister pour obtenir une réponse, même si on vous affirme d'emblée que vous êtes trop jeune pour être concernée et qu’il ne sert à rien de réaliser des tests.» 

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L'allaitement protège... mais juste un peu!

Malgré ce qu'on peut (et ce qu'on voudrait) croire, l'allaitement ne constitue pas un bouclier contre le cancer du sein: «Cela diminue un peu le risque, tout comme la prise d’une pilule contraceptive l’augmente un peu», tempère la Dre Wolfer.

Une étude britannique publiée en 2022 a effectivement suggéré que le risque de développer un cancer du sein peut baisser jusqu'à 4,3% pour chaque année d'allaitement. «Tout revient à l’exposition aux œstrogènes, au cours de la vie, résume l'experte. Lors de la grossesse et de l’allaitement, l’imprégnation œstrogénique est plus basse. Mais il s'agit d'un facteur parmi d’autres, qui ne provoquera ni n’empêchera la survenue d’un cancer du sein: il pèse simplement dans la balance.» Soulignons que cet effet vaut à la fois pour l'allaitement exclusif et l'allaitement partiel. 

Cependant, la prise de contraceptifs hormonaux peut, au contraire, augmenter légèrement nos chances de développer la maladie: «Il a été démontré que la pilule, composée d’un mélange d’œstrogènes et de progestérone, peut accroître le risque de 10 à 20%, note le Dr Zaman. Mais puisque la survenue du cancer du sein chez les jeunes est rare, l’augmentation du risque absolu reste faible. On retrouve également ce risque accru pour la substitution hormonale parfois proposée aux femmes après la ménopause.» 

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Un dépistage avant 50 ans est parfois préconisé

Si les programmes cantonaux recommandent une mammographie dès 50 ans, certains cas de figure peuvent justifier des examens plus précoces: «Lorsqu’une patiente présente une histoire familiale ou personnelle suggérant un risque plus élevé, on peut proposer un dépistage par mammographie avant 50 ans, observe le Dr Zaman En présence d'une prédisposition génétique, à savoir la mutation BRCA 1 ou 2, le dépistage radiologique doit même être débuté dès l’âge de 25 ou 30 ans, avec une surveillance plus intensive au cours de la vie.» 

Citant l'illustre exemple d'Angelina Jolie, dont l'histoire a contribué à briser le tabou, notre spécialiste rappelle que certaines personnes font le choix de la chirurgie préventive, lorsqu'elles découvrent être porteuses de ces gènes. 

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Si aucune aïeule n'a été malade, le risque existe quand même

En l'absence des mutations BRCA 1 ou BRCA 2, ou lorsque aucune femme de notre famille n'a souffert d'un cancer du sein, on pourrait avec soulagement se croire «à l'abri». Si la Dre Wolfer admet que le risque est moins élevé dans ce cas de figure, elle souligne que tout dépend du nombre de femmes dans l’arbre généalogique: «Si votre Maman a grandi avec des frères et que votre grand-maman était fille unique, cela peut être trompeur», pointe-t-elle. Ainsi, lorsque les femmes sont rares, dans la famille, on peut passer à côté d'une prédisposition. 

«On dit que tout parent de premier ou deuxième degré de la personne porteuse peut bénéficier de ce test génétique, ajoute le Dr Zaman. Frères, sœurs, parents, oncles, enfants, grands-parents, tantes, oncles, cousins, cousines, nièces, neveux… Les hommes aussi peuvent être testés, dans la mesure où ce chromosome peut être hérité du père comme de la mère et se transmet tant aux hommes qu’aux femmes. Chez les hommes, le même gène est d'ailleurs en mesure de favoriser l’apparition de cancers de la prostate, du pancréas ou du sein, en fonction de la mutation concernée.» 

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On peut agir sur certains facteurs de risque

Face aux statistiques impressionnantes qui ressurgissent chaque année, au mois d'octobre, on peut facilement se sentir impuissants. Or, nos intervenants rappellent qu'il existe plusieurs facteurs de risque tout à fait modifiables: «Le cancer du sein est multifactoriel et on ne peut agir sur son histoire familiale ou son âge, rappelle le Dr Zaman. Par contre, dans de nombreux cas, il est possible de lutter contre l’obésité, de préférer les végétaux aux produits d’origine animale, d'éviter le tabac et l’alcool.»

Même son de cloche du côté de la Dre Wolfer, qui souligne également l'importance de l'activité physique régulière et l'alimentation équilibrée, avec un minimum de produits hyper-transformés. «Le style de vie peut jouer, mais il ne faudrait pas culpabiliser à outrance les femmes, tempère-t-elle. Après tout, je dis souvent que le plus grand facteur de risque est simplement le fait d’être une femme.»

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Prudence avec le déodorant à l'aluminium

En 2021, une étude suggérait une corrélation inquiétante entre l'aluminium contenu dans certains cosmétiques (dont le déodorant) et le développement d'un cancer du sein. Or, comme le rappelle notamment l'OSAV, aucun véritable lien de causalité n'a été clairement établi. 

«On ne dispose pas de certitudes quant au rôle de l’aluminium dans la survenue d’un cancer, acquiesce le Dr Zaman. On peut toutefois recommander de ne pas appliquer de déodorant sur une peau abîmée ou fragilisée: par exemple, si on se rase les aisselles, il peut être prudent d’attendre 6 heures avant d’utiliser un produit contenant de l’aluminium.» 

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