Retard dans l'admission des médecins étrangers
La pénurie de médecins s'aggrave à cause de la lenteur de l'OFSP

Les médecins étrangers doivent attendre des mois avant d'être reconnus en Suisse, car la numérisation fait défaut et la commission compétente de l'Office fédéral de la santé publique manque de personnel.
Publié: 11:03 heures
Partager
Écouter
1/5
Les hôpitaux se plaignent d'une pénurie de personnel qualifié.
Photo: Keystone
RMS_Portrait_AUTOR_374.JPG
Andreas Schmid

Le responsable du personnel de l'hôpital de Bülach (ZH), Manuel Portmann, estime que la situation actuelle à l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) est «inacceptable». Depuis des semaines, il attend que le nouveau médecin-chef en orthopédie obtienne l'autorisation de travailler en Suisse. Le spécialiste allemand a déposé sa demande il y a déjà un certain temps. Le contrat est même signé depuis longtemps. Il est attendu rapidement pour remplacer son prédécesseur qui prendra sa retraite au mois d'août.

Mais l'OFSP a pris beaucoup de retard dans le traitement des demandes de reconnaissance et d'enregistrement des médecins étrangers. L'office a récemment informé par écrit les organisations de santé, les hôpitaux et les universités concernés que les demandes s'accumulaient en raison d'absences de personnel et que la numérisation des processus n'était pas encore achevée. Le support téléphonique ne pouvait temporairement plus être assuré et les demandes écrites restaient en suspens pendant quatre semaines.

Dans son mail d'excuse, l'OFSP a dû reconnaître que même la confirmation de la réception d'une demande «prend actuellement environ deux mois» et que la suite du traitement «prend encore plusieurs mois». La situation devrait toutefois se normaliser d'ici la fin de l'année. Ensuite, le temps de traitement des demandes devrait être réduit à trois mois maximum, selon l'OFSP.

Un marché suisse sec

Pour Manuel Portmann de l'hôpital de Bülach, c'est une maigre consolation. Il rappelle qu'il a commencé à chercher un spécialiste pour la direction de l'orthopédie il y a un an déjà. Comme il n'a pas trouvé ce qu'il cherchait en Suisse, il a fait appel à une agence spécialisée qui s'est rendue en Allemagne et en Autriche.

Le fait que la personne allemande intéressée par le poste doive maintenant attendre plus de six mois pour que sa demande de reconnaissance soit traitée et qu'il obtienne l'autorisation pose problème, aux yeux de Manuel Portmann. Il ne sait pas si le médecin-chef pourra commencer comme prévu.

«Dans ce contexte, nous devons maintenir l'activité en orthopédie, et le nouveau venu doit notamment former des médecins assistants.» L'orthopédiste lui-même serait dans l'incertitude quant à la date de son entrée en fonction, bien qu'il doive abandonner son domicile en Allemagne et retirer ses enfants de l'école.

La pénurie s'aggrave

La moitié des plus de 41'000 médecins en activité en Suisse viennent de l'étranger, la plupart d'Allemagne. Bien que le nombre de places d'études en Suisse ait été augmenté et le sera encore dans les années à venir, les prévisions indiquent qu'il manquera environ 5500 médecins d'ici 2040. Mais aujourd'hui déjà, de nombreux hôpitaux et cabinets médicaux ne parviennent pas à pourvoir tous les postes de médecins.

Le retard pris dans l'examen des demandes de médecins étrangers est d'autant plus grave. C'est la Commission des professions médicales, rattachée à l'OFSP, qui est compétente en la matière. Cet organe examine les diplômes des candidats européens et traite leurs demandes. La commission est consciente que les retards pourraient entraîner des difficultés pour les médecins eux-mêmes, mais aussi pour les établissements de santé, explique le porte-parole de l'OFSP Daniel Dauwalder. Les responsables travaillent «sous haute pression» pour résoudre le problème. Pour ce faire, la commission engage aussi temporairement du personnel supplémentaire.

L'office, dirigée par Anne Lévy, cite une augmentation imprévisible des demandes ainsi que la lenteur de la numérisation, qui avait déjà posé des problèmes à l'OFSP pendant la pandémie de Covid-19, comme autres raisons de l'embouteillage dans le traitement des demandes. A l'avenir, une fois le projet de numérisation mis en œuvre, les demandeurs pourront consulter à tout moment l'état actuel de leur demande, souligne l'OFSP.

Accès au marché plus difficile

Pour l'association professionnelle des médecins FMH, ces retards sont «problématiques». Sa présidente, Yvonne Gilli, déclare que la Suisse étant fortement dépendante du personnel médical étranger, les retards dans la reconnaissance pourraient «aggraver les pénuries existantes». Ils rendent l'accès au marché du travail plus difficile.

Mais Yvonne Gilli fait également preuve de compréhension pour la situation actuelle: comme chaque demande doit être examinée individuellement, la procédure de reconnaissance est complexe. Yvonne Gilli trouve «compréhensible» que de tels processus soient entravés par des pertes de personnel et des problèmes de numérisation.

La présidente de la FMH affirme que la Suisse étant considérée comme un pays attractif pour les médecins, il faut partir du principe que la plupart des personnes intéressées accepteront un certain temps d'attente. Mais pour les employeurs, les longs délais d'attente sont «regrettables».

Pression des économies à l'OFSP

Le porte-parole Daniel Dauwalder fait remarquer que l'OFSP n'a pas pu engager de personnel supplémentaire jusqu'à présent en raison des mesures d'économie imposées. Cela va changer à partir du mois d'août, pour une durée limitée, compte tenu de la situation tendue.

L'OFSP est conscient que les retards compliquent la planification pour les établissements de santé et empêchent «éventuellement» l'entrée en fonction de spécialistes dans les délais, admet Daniel Dauwalder. Mais l'OFSP fait l'expérience que «les personnes qui veulent travailler ici le font aussi si elles doivent attendre trois mois de plus».

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la