Inaction à Gaza
«Karin Keller-Sutter n'a d'yeux que pour Trump», fustige Lisa Mazzone

Alors que la situation à Gaza se détériore, la Suisse reste inactive. La présidente des Vert-e-s, Lisa Mazzone, appelle le Conseil fédéral à agir clairement et l’accuse de sous-estimer la gravité de la crise. Interview.
Publié: 16:19 heures
|
Dernière mise à jour: 16:25 heures
Partager
Écouter
1/6
Lisa Mazzone, présidente des Vert-e-s, critique l'orientation l'inaction de la Suisse.
Photo: KEYSTONE
RMS_Portrait_AUTOR_817.JPG
Joschka Schaffner

La situation à Gaza est inhumaine: la population palestinienne meurt de faim sous les bombes. Les experts internationaux sont, chaque jour, plus inquiets. Israël autorise certes une petite quantité de livraison de certains biens de première nécessité, mais selon les organisations de l'ONU, elles ne couvrent même pas la moitié des besoins. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son cabinet de sécurité ont récemment révéler qu'ils comptaient bientôt prendre le contrôle total de Gaza.

Face à la situation, de nombreux pays occidentaux sortent du silence. La Grande-Bretagne, la France et le Canada veulent reconnaître l'Etat de Palestine, tout en condamnant les plans du Premier ministre israélien. L'Union européenne et l'Allemagne osent peu à peu faire pression sur Israël. Et la Suisse? Elle est bien trop occupée par l'annonce des droits de douanes de Donald Trump pour s'occuper de ses obligations humanitaires, fustigent de nombreux politiciens. La présidente des Vert-e-s, Lisa Mazzone, est elle aussi irritée par le comportement de la Confédération.

Lisa Mazzone, la situation à Gaza continue de s'aggraver. Que fait la Suisse?
Rien. Ou pire encore: elle se trouve du mauvais côté de l'Histoire. Elle ne donne pas d'argent à l'UNRWA à Gaza. Elle continue à collaborer avec l'armée israélienne. Et elle refuse toujours de reconnaître l'État de Palestine et de condamner les crimes de guerre commis par le gouvernement israélien. Et ce, bien qu'il soit de plus en plus clair que Benjamin Netanyahu travaille à un génocide. Il y a une famine délibérément provoquée. Elle touche des milliers d'enfants. Et maintenant, de nouveaux massacres sont annoncés. Des chefs d'Etat se sont récemment exprimés à ce sujet. Alors que pendant ce temps, la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter ne dit rien. 

«
C'est une honte pour la Suisse!
»

Pourquoi Karin Keller-Sutter ne s'exprime-t-elle pas?
Il n'y a pour moi aucune raison acceptable. Apparemment, la présidente de la Confédération n'a d'yeux que pour Donald Trump. Pourtant, le président américain fait partie du problème puisqu'il a lui-même appelé à une épuration ethnique à Gaza. Il faut une action claire de la Suisse et une condamnation de ces inhumanités commises par le gouvernement israélien. J'ai le sentiment que la Confédération n'a pas pris conscience de la gravité de la situation. Les violations du droit international, les crimes de guerre, la nouvelle annonce de l'annexion de la bande de Gaza... tout cela, elle l'occulte. C'est une honte pour la Suisse!

Comment le Conseil fédéral devrait-il agir?
Il devrait tout entreprendre pour permettre l'acheminement de l'aide dans la bande de Gaza et instaurer un cessez-le-feu immédiat, comme le font de nombreux autres États. La pression doit être massivement augmentée pour que l'armée israélienne quitte Gaza et la Cisjordanie. La coopération militaire doit également être immédiatement stoppée, des sanctions économiques doivent être imposées et la Palestine doit être reconnue comme un Etat. Et le Conseil fédéral doit préciser qu'une occupation de la bande de Gaza est absolument inacceptable.

«
La Suisse a toujours dit qu'elle souhaitait une solution à deux États. Mais pour cela, elle doit reconnaître la Palestine
»

Et qu'est-ce qui changerait si la Suisse reconnaissait la Palestine comme un État?
La Suisse a toujours dit qu'elle souhaitait une solution à deux États. Mais pour cela, elle doit reconnaître la Palestine. Il est incohérent et peu crédible de ne pas le faire. En soi, cela ne suffit évidemment pas encore, mais c'est une étape importante dans le processus de paix.

Qu'est-ce qui change avec la décision d'Israël d'envahir Gaza?
Avec la dernière décision du gouvernement israélien, la situation dans la bande de Gaza risque d'empirer encore, si c'est encore possible. La Suisse et la communauté internationale ont le devoir de mettre un terme aux violations du droit international et aux souffrances humaines. La Suisse a joué un rôle déterminant dans l'émergence du droit international. Elle a contribué à son établissement. C'est précisément maintenant que nous devons nous montrer cohérents par rapport à notre histoire et à nos obligations internationales.

Que font les Vert-e-s au niveau politique?
Nous demandons entre autres des sanctions immédiates et 100 millions de francs pour les programmes de l'ONU à Gaza. Nous déposerons une intervention à ce sujet au Parlement lors de la session d'automne. Je dois toutefois ajouter ceci: cela fait un an et demi que nous présentons au Parlement nos revendications pour un soutien accru à la population palestinienne. Mais le Parlement, dominé par les partis bourgeois, refuse de faire face de manière adéquate à la catastrophe humanitaire.

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la