Plus de 745'000 dollars pour une action, cette somme peut sembler invraisemblable mais c'est vraiment le prix d'une action A de Berkshire Hathaway, soit le titre le plus «cher» négocié publiquement dans le monde, avec un record absolu de 809'000 dollars cette année.
Ce prix élevé est-il un signe de succès? C'est ce que suggère les bases de la psychologie du consommateur: prix élevé = meilleure qualité, et cette équation semble se vérifier pour la société holding. L'oracle de la bourse Warren Buffett a convaincu avec sa stratégie d'investir dans des entreprises sous-évaluées et de les conserver à long terme. Les participations de Berkshire vont de Bank of America à Coca-Cola en passant par Apple.
L'écart entre Berkshire et le deuxième titre du classement mondial est important: avec une différence de plus de 600'000 dollars, Lindt&Sprüngli occupe la deuxième place avec 129'800 francs pour une action nominative. On accède à un bon de participation avec une contribution de 13'320 francs. A partir de cette place sur le podium, les écarts se réduisent.
Action | Prix par action (juin 2025) | Capitalisation boursière | Pays |
Berkshire Hathaway - A | 745'000 dollars | 1,07 billion de dollars | Etats-Unis |
Lindt&Sprüngli - N | 129'000 francs | 27 milliards de dollars | Suisse |
Lotus Bakeries | 8900 euros | 7,28 milliards d'euros | Belgique |
Banque cantonale de Zoug | 8640 francs | 2,47 milliards de francs | Suisse |
NVR | 7000 dollars | 17 milliards de dollars | Etats-Unis |
Le prix des actions reflète un style d'entreprise à long terme, axé sur la stabilité. Chez Berkshire Hathaway, le cours élevé de l'action A représente la substance accumulée et une allocation du capital systématiquement rentable pendant des décennies sous Warren Buffett. Grâce à sa stratégie d'investissement à long terme axée sur la valeur, il a transformé la holding en une success story.
La différence décisive
Malgré tout, si l'on établissait le classement sur la base de la capitalisation boursière, l'ordre serait différent. En effet, Apple, Microsoft et Nvidia procèdent à des divisions d'actions, ce qui réduit le prix d'une action individuelle et la rend plus abordable pour les petits investisseurs. Ainsi, une action de 1000 dollars devient dix actions de 100 dollars.
Les actions de Berkshire ou de Lindt&Sprüngli n'ont jamais été divisées, ou alors il y a longtemps. Pour quelle raison? D'une part, car un prix d'action élevé dégage un certain prestige, puisqu'il n'est pas à la portée de tous, ce qui fait d'elles des «Rolls-Royce du monde des actions». Lindt&Sprüngli cultive sciemment l'exclusivité de l'action nominative à faible nombre d'unités.
Ces actions n'ont jamais été divisées aussi grâce à des décisions entrepreneuriales. En effet, le président du conseil d'administration de Lindt, Ernst Tanner, a toujours rejeté cette option car «la structure actuelle est un modèle éprouvé et réussi pour Lindt&Sprüngli depuis de nombreuses années». Warren Buffett a la réputation d'éviter les divisions d'actions, car il préfère les actionnaires qui pensent à long terme. Cela permet d'obtenir des structures d'actionnariat plus stables, sans avoir à procéder à de fréquents remaniements.
Si les deux entreprises avaient procédé à un fractionnement de 10 pour 1 tous les dix ans, les deux actions se situeraient aujourd'hui dans une fourchette de 100 à 600 dollars. En d'autres termes, les cours élevés à eux seuls ne disent rien sur la surévaluation, ils sont plutôt l'expression d'un style d'entreprise à long terme, orienté vers la stabilité. Celle-ci se reflète également dans les ratios cours/bénéfices (PER) plutôt élevés, à 43,70 (Lindt) et 24,55 (Berkshire).
Cher comme synonyme de meilleur?
mais il reste un point à éclaircir: la participation à l'entreprise de Warren Buffett n'apporte aucun avantage en termes de dividendes, car aucune distribution n'est effectuée. Alors pourquoi y participer? Tout simplement parce que les investisseurs comptent sur un rendement positif à long terme,et à raison. Au cours des 20 dernières années, le cours a augmenté de 790,45%, ce qui correspond à un rendement annuel de 13,3%. A titre de comparaison, le S&P500 enregistre environ 10 à 11%.
Chez Lindt, le rendement du dividende est relativement bas, à 1,16%, et les actionnaires ont reçu un dividende de 1500 francs par action pour l'exercice écoulé. La part du dividende dans le rendement total sur les dix dernières années n'est que de 14,5%. Les détenteurs d'un bon de participation Lindt gagnent 150 francs, mais sont exclus du droit de vote à l'assemblée générale et du coffret annuel de cinq kilos de chocolat. Ces montants de dividendes ne justifient donc pas vraiment l'investissement initial.
D'un point de vue rationnel, une action moins chère avec un rendement du dividende plus élevé serait sans doute plus judicieuse, mais la firme convainc par sa stabilité et son pouvoir de fixation des prix, et sa structure familiale la met à l'abri de la pression des actionnaires à court terme. Lindt pourrait donc être qualifié d'«investissement à long terme sûr et conservateur avec exclusivité».
Le prix élevé des actions de Lindt et de Berkshire est un indicateur de la force et de la confiance des investisseurs dans ces entreprises. La simple valeur du cours n'est pas un critère d'évaluation objectif. Des données fondamentales telles que le rendement, la position sur le marché ou l'orientation stratégique sont pertinentes pour le niveau de prix et d'évaluation.
Le prestige à petite échelle
Pour les petits investisseurs qui ne veulent pas réunir de telles sommes pour participer au «marché des capitaux de prestige», il existe d'autres possibilités. Ainsi, les deux entreprises proposent, avec l'action B ou le bon de participation, une variante un peu moins chère pour participer au succès des entreprises.
De même, de plus en plus de banques et de courtiers, notamment aux États-Unis, proposent l'offre dite d'«actions fractionnaires». Les investisseurs peuvent ainsi acheter des parties d'une action. Cela signifie que les investisseurs investissent par exemple 100 dollars dans l'action A de Berkshire et reçoivent la «fraction» de l'action.
Cela coûte certes un peu plus cher que l'achat traditionnel d'actions et ne s'accompagne pas non plus des mêmes droits, mais aucune action ne devrait ainsi échapper aux investisseurs.
Mais les alternatives d'investissement ne manquent pas. Des actions plus «abordables» comme celles d'Hermès, de la Banque cantonale de Zoug, de Givaudan ou de Lotus Bakeries convainquent également par leurs modèles d'affaires défensifs, leur stabilité ou leur croissance. Cette dernière affiche par exemple un rendement annuel des actions de 26,2% au cours des 20 dernières années.