Il a peur pour son job à l'UBS
«Quand mon chef m'appelle, je crains le pire»

Les employés de l'UBS sont, certes, dans une meilleure position que leurs homologues de Credit Suisse. Mais des licenciements collectifs pourraient également les toucher. L'incertitude règne donc. Témoignage d'un employé de la première banque de Suisse.
Publié: 12.04.2023 à 14:09 heures
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Dernière mise à jour: 17.04.2023 à 08:30 heures
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L'ambiance est morose parmi le personnel bancaire suisse.
Photo: keystone-sda.ch
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Sarah Frattaroli

Ivan R.* peut se prévaloir d’une carrière impressionnante sur la place financière suisse. Ce quinquagénaire travaille depuis plus de dix ans dans le secteur, actuellement en tant que manager au sein du département informatique de l’UBS. Auparavant, il était employé par d’autres banques et groupes d’assurance, y compris par Credit Suisse. Malgré ce solide palmarès, l'employé craint pour son emploi.

La fusion des deux grandes institutions de la Paradeplatz n’a pas seulement créé des craintes chez les employés de Credit Suisse. «L’incertitude est aussi plus grande chez les employés de l'UBS», confirme Natalia Ferrara, directrice de l’Association suisse des employés de banque (ASEB). Chaque jour, elle reçoit des dizaines de courriels inquiets.

Il est encore trop tôt pour savoir combien de postes disparaîtront après le rachat de Credit Suisse. Selon une rumeur qui circule ces derniers jours, 20 à 30% des emplois seraient supprimés. Rien qu’en Suisse, cela signifierait que 11’000 personnes pourraient bientôt être sur la sellette.

Inquiétudes chez les plus de 50 ans

Les employés de l'UBS ont de meilleures cartes en main que leurs homologues de Credit Suisse: après tout, ils travaillent pour la banque, qui continuera d’exister. Mais ils devront, eux aussi, prouver leur valeur en interne. Les employés plus âgés, comme Ivan R., craignent justement d’être remplacés par des collègues plus jeunes provenant de Credit Suisse.

Mais ils ne sont pas les seuls à s’inquiéter pour leur job: «Récemment, j’étais assis pendant la pause de midi avec des employés plus jeunes, plus âgés, plus expérimentés, moins expérimentés, externes et internes. Tous, sans exception, s’inquiètent de perdre leur emploi», continue Ivan R.

«Quand mon chef m’appelle, je crains le pire»

De nombreux employés de banque ont déjà fait l’expérience de licenciements collectifs. «Une fois, 300 personnes ont été licenciées chez nous en l’espace d’une semaine», se souvient Ivan R.

Les établissements bancaires sont particulièrement stricts en matière de licenciements: les personnes qui reçoivent leur lettre de licenciement sont généralement escortées à leur poste de travail par le personnel de sécurité, n’ont le droit d’emballer que leurs effets personnels et doivent ensuite quitter le périmètre immédiatement. Les institutions ne veulent pas prendre le risque que des données sensibles de clients tombent entre de mauvaises mains à cause de collaborateurs en colère.

«Quand je reçois un message de mon chef disant: 'Tu peux venir me voir un instant, s’il te plaît?', je crains le pire», avoue le quinquagénaire.

Gel des embauches chez l’UBS

Trois semaines après l’annonce de la reprise de Credit Suisse, la première onde de choc s’estompe lentement sur la place bancaire suisse. Le personnel retrouve ce qui ressemble à leur quotidien malgré l’incertitude. «Je craignais que la foire d’empoigne commence dès maintenant. Heureusement, cela ne s’est pas encore produit», glisse Ivan R. Au contraire, il fait l’expérience d’une grande solidarité à l’interne, également avec les employés de Credit Suisse.

Dans différents départements, des employés ont entendu dire que les processus de recrutement étaient suspendus. Les postes vacants seront comblés par des collaborateurs de Credit Suisse, souffle-t-on à l’interne. Le gel des embauches ne s’applique toutefois pas à l’ensemble du groupe, comme le montre le site Internet de l’UBS, après un rapide coup d’œil: environ 300 postes sont actuellement mis au concours dans toute la Suisse.

Sous les feux des projecteurs

Malgré la crainte de se retrouver bientôt au chômage, le personnel de la banque ressent comme un air de renouveau. La reprise du personnel de Credit Suisse est une chance pour combler le manque de personnel qualifié, glisse-t-on par exemple dans le milieu. Jusqu’à présent, les banques devaient parfois se tourner vers l’étranger pour pourvoir tous les postes vacants.

Ivan R. espère que son avenir professionnel sera garanti par l’opinion publique: «L’UBS est sous surveillance. Elle se gardera bien de mettre à la porte toutes les personnes de plus de 55 ans.» L’indignation que susciterait une telle démarche dans le monde politique et médiatique serait trop préjudiciable.

Cette semaine, le Parlement se réunit à Berne pour une session extraordinaire au sujet de la reprise de Credit Suisse par l’UBS. Les projecteurs seront donc d’autant plus braqués sur les patrons de l'établissement financier.

*Nom modifié

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