Il y a six mois encore, les Vert-e-s étaient restés silencieux, ce qui leur a valu des moqueries. Le parti avait annoncé qu'il ne présenterait pas de candidate à la succession de la conseillère fédérale du Parti socialiste (PS) Simonetta Sommaruga. La raison: Le PS était politiquement trop proche de leur propre parti.
Quelques semaines auparavant, les Vert-e-s avaient encore flirté avec une attaque sur le siège UDC vacant du ministre des Finances Ueli Maurer – bien que le fait que l'UDC possède deux sièges au Conseil fédéral soit incontesté. Finalement, le parti des défenseurs du climat avait décidé de ne pas le faire. Motif: une candidature n'aurait eu aucune chance.
Être gentil ne fait pas avancer les choses
La réaction à ce parcours en zigzag ne s'est pas fait attendre. Les Vert-e-s n'auraient pas compris l'essence de la concordance, a raillé le PLR. Les Vert-e-s manquent de stratégie, a-t-on entendu dans les rangs du PS. Même les Verts libéraux, qui soutiennent les ambitions de leur parti cousin au Conseil fédéral, étaient irrités.
Cela a laissé des traces chez les parlementaires dudit parti. Les moqueries de la gauche ont particulièrement déplu. Et le parti en a été convaincu: Être gentil ne nous fait pas avancer. «C'était un processus de maturation», dit le conseiller national vert Bastien Girod. Le résultat s'est fait sentir ces dernières semaines.
Par deux fois, les Vert-e-s ont fait passer leurs propres intérêts avant ceux des socialistes Et ont ainsi surpris leurs camarades.
Ainsi, le parti s'est assuré la vice-présidence de la Commission d'enquête parlementaire (CEP) sur la débâcle de Credit Suisse. Au détriment du PS, qui visait le même poste. Et cette semaine, après la démission d'Alain Berset, ils ont annoncé qu'ils examineraient toutes les options lors des élections fédérales de décembre. Autrement dit: une attaque sur le siège du PS n'est plus taboue.
Pas de rôle facile à trouver
Les Vert-e-s font de la politique de pouvoir (Machtpolitik). Il a fallu près de quatre ans au parti pour s'y résoudre après sa victoire historique aux élections de 2019. Alors que les camarades n'ont jamais eu de scrupules à atteindre leurs objectifs grâce à des accords avec l'adversaire politique, un tel comportement était jusqu'à présent suspect pour les Vert-e-s pacifistes. Cela est en train de changer – et donc aussi les relations entre les partis frères.
«C'est une émancipation qui n'est pas encore terminée», déclare la conseillère nationale verte et cheffe du groupe Aline Trede. «La définition des rôles n'est pas facile, ni pour nous ni pour le PS.»
En effet: au PS, on s'irrite de la démarche des Vert-e-s concernant la CEP. Ils ont fait croire aux sociaux-démocrates qu'ils soutenaient la candidature du PS à la vice-présidence, dit un politicien en coulisses. Le fait que les Vert-e-s aient pactisé avec le Centre pour obtenir le poste a été mal perçu par les camarades. Tout comme la déclaration d'examiner «tous les scénarios» lors des élections fédérales de décembre.
Mauvais moment pour une dispute
Chez les Vert-e-s, on estime que le PS n'a jusqu'à présent joué ses cartes que pour lui-même. «Les sociaux-démocrates ne nous ont jamais aidés à entrer au Conseil fédéral», déclare une politicienne qui ne souhaite également s'exprimer que sous couvert d'anonymat. «Ils n'ont jamais essayé de briser la formule magique.»
On n'entend pas de ton aussi agressif de la part de la cheffe du groupe des Vert-e-s Aline Trede. Elle sait qu'une lutte entre le PS et son parti serait mal perçue par les nombreux électeurs en cette année électorale.
C'est pourquoi ledit parti ne veulent pas faire du siège au Conseil fédéral un «thème prioritaire de la campagne», dit Aline Trede. «Notre objectif est de conquérir, avec le PS, suffisamment de parts de suffrages pour obtenir trois sièges au Conseil fédéral.»
Il est toutefois peu probable qu'un tel résultat soit atteint. Et c'est ainsi que le conseiller national Bastien Girod ajoute: Les Vert-e-s sont un «parti à part entière avec ses propres priorités comme la protection du climat, la biodiversité, l'égalité des droits». «Nous avons la responsabilité envers nos électeurs de défendre leurs intérêts – également au Conseil fédéral», conclut Bastien Girod.
En d'autres termes, le parti écolo n'abandonnera pas de sitôt sa nouvelle prétention au pouvoir. De quoi alimenter les discussions dans le camp gauche-vert.