Comme les tableaux de Poudlard
Le PLR Vaud invente les affiches qui parlent

Pour la première fois en Suisse, des affiches politiques seront en réalité augmentée. Le PLR Vaud, qui mise aussi sur des cartes postales animées, veut démontrer son potentiel d'innovation tout en séduisant son électorat.
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Adrien SchnarrenbergerJournaliste Blick

«Nos candidats vont parler comme les tableaux de Poudlard!», rigole Quentin Racine. Avec cette référence à l'univers de Harry Potter, le vice-président du PLR Vaud — lui-même candidat au Grand Conseil — évoque l'innovation que son parti a sortie de son chapeau en vue des élections cantonales du printemps prochain: le matériel de campagne sera en réalité augmenté.

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Dans une première phase de pré-campagne, les affiches seront affublées d'un QR code. En scannant celui-ci, les passants seront renvoyés vers une application (PLR Vaud) où ils découvriront les thèmes des candidats au Conseil d'État ainsi que leur profil Smartvote, par exemple. «Il faut bien se rendre compte que ce ne sera pas simplement une vidéo qui se lance, mais bien l'affiche qui prend vie», précise Quentin Racine, convaincu du potentiel de la réalité augmentée.

Des cartes postales pour chaque candidat(e)

Jean-Luc Duvoisin, président du PLR de Pully-Paudex-Belmont, est à l'origine du concept. Il a remporté avec son agence de publicité l'appel d'offres lancé par son parti. «Jusqu'ici, les affiches étaient toujours les mêmes: une photo du candidat ou de la candidate sous son meilleur jour, parfois un slogan et la date de l'élection. Cette innovation permet d'aller vraiment plus loin», assure-t-il. Le publicitaire attend beaucoup des cartes postales qui fonctionneront selon le même modèle que les affiches et offriront à chaque prétendant à un mandat politique (Grand Conseil ou Conseil d'État) l'occasion de se faire connaître.

D'après les recherches du parti, il s'agit d'une première au moins au niveau national. L'innovation est certes moins ambitieuse que la transformation de Jean-Luc Mélenchon en hologramme en 2017 par exemple, mais elle est davantage concrète et utile, assurent les deux membres du PLR. «Cela va transformer totalement le traditionnel tous-ménages, puisque chaque candidat pourra s'adresser directement à l'électeur», se réjouit Jean-Luc Duvoisin.

Une étape de trop

Un pas décisif, vraiment? Tandis que le PLR est enthousiaste, les experts sont plus mesurés, du moins en l'état actuel de l'application. «C'est bien que le PLR vive dans son époque et veuille exploiter les technologies modernes, mais il y a une étape de trop», déplore Marc Comina.

Phase de pré-campagne du PLR
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Vidéo:Phase de pré-campagne du PLR

Le hic, selon l'expert en communication, c'est que l'électeur potentiel n'atterrit pas directement sur le contenu souhaité, mais est invité à télécharger l'application du PLR Vaud. Une gageure, selon lui. «S'arrêter, sortir son téléphone et scanner un QR code représente déjà un gros effort. L'attention de l'utilisateur — ici l'électeur — est limitée, lui demander de télécharger une app politique, c'est trop.»

L'ex-journaliste et connaisseur de longue date de la politique suisse salue, en revanche, l'utilisation du QR code. «Flop complet durant des années, il a ressuscité grâce au Covid et l'utilisation courante que nous en faisons aujourd'hui, par exemple pour lire notre menu au restaurant. Le PLR est malin d'en profiter.»

La fin du journal du parti?

Reste que l'application, malgré son design épuré, n'apparaît pour l'instant que comme une copie d'un site internet. «Site ou App, c'est le même combat perdu. Les gens ne vont plus chercher des informations, elles viennent à eux sur les réseaux, rappelle Marc Comina. Leur capacité à faire une recherche active, qui plus est en politique, ne doit pas être surestimée. Taper le nom d'un candidat ou d'une candidate sur Google est déjà un très gros effort.»

Pour autant, le consultant pense que le PLR est dans la bonne direction. Se tromper pour faire mieux («fail fast»), c'est ça le bon état d'esprit aujourd'hui, explique-t-il. «Si leur projet est porté par une véritable volonté d'apprendre de leurs erreurs, alors ils sont sur le bon chemin. Ils vont s'adapter et corriger le produit en fonction des réactions. Si, au contraire, ils pensent que leur App, c'est l'oeuf de Colomb, ils vont être déçus.»

Cette innovation, qui n'a pas un impact énorme sur les finances de campagne du parti («environ 5% du budget»), s'inscrit dans le contexte plus large d'un virage vers le numérique, confirme Quentin Racine. «L'idée est de renoncer aux traditionnels gadgets à l'effigie du PLR, qui polluent et n'apportent pas grand-chose, mais aussi de réfléchir à comment communiquer et amener de nouveaux électeurs.» Le destin de «La Tribune», la revue mensuelle du parti, va faire partie de la discussion, ajoute le vice-président.


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