Il a une bonne tête, François. Cheveux courts, barbe de deux ou trois jours apparente, assez jeune… Parfois en uniforme bleu et noir, parfois en chemise en jeans décontractée. Et il aime visiblement le café. Presque toutes les personnes sympathiques aiment le café, non?
Ce n’est toutefois pas à cause de son goût pour les boissons amères qu’on vous en parle. Ce lundi 2 mai, après «1000 ans d’attente», comme l’écrit sans aucune exagération la police cantonale vaudoise dans une vidéo au ton léger, François est le premier cyberpolicier du canton à débarquer sur TikTok, le réseau social squatté par les 13-16 ans.
Une initiative importante mais risquée: les forces de l’ordre vont-elles trahir leur âge en publiant des contenus complètement décalés, un peu comme la conseillère d’État fraîchement élue Valérie Dittli? Pour l’instant, l’eCop François fait tout juste. «Enfin, vous êtes accessibles!», se réjouit un internaute dans les commentaires de la dernière vidéo publiée. «C’est rassurant», renchérit une autre.
Bien joué, François! Mais sa mission ne consistera pas qu’à créer et publier de courtes capsules. «L’objectif est de nous adapter aux évolutions de la société et d’aller là où sont les jeunes pour pouvoir faire de la prévention le plus efficacement possible», nous explique au bout du fil Olivia Cutruzzolà, cheffe de la Section prévention de la criminalité à la police cantonale vaudoise.
Elle indique que le processus de réflexion pour ce projet a été lancé il y a petit moment: «Après le départ à la retraite d’un ancien chargé de prévention, nous avons engagé un inspecteur de police judiciaire pour qu’il devienne un policier des Internets. Cette action est, en réalité, un prolongement de ce que nous faisons sur le terrain.»
Créer du lien avec les jeunes
Concrètement, l’agent François se montre aussi dans les classes d’école, où il invite les élèves à le suivre et à lui écrire directement sur les réseaux sociaux s’ils ont une question. Son but: créer du lien avec les pré-adolescents pour qu’ils se sentent libres d’aborder n’importe quel sujet qui pourrait les turlupiner, comme le harcèlement en ligne.
Comment procéder maintenant pour gagner rapidement en visibilité? «Nous allons publier au moins un à deux contenus par semaine sur son profil Instagram et TikTok (ndlr: @ecop.francois), reprend Olivia Cutruzzolà. L’idée est aussi de pouvoir être très réactif si un nouveau phénomène de société concernant les jeunes apparaît et prend de l’importance. Je pense par exemple à toutes les craintes qui ont entouré 'Squid Game'.»
Rappelez-vous: le jeu mortel au cœur de la série sud-coréenne, véritable succès planétaire sur Netflix, avait des conséquences inquiétantes dans certaines écoles romandes. Après plusieurs alertes, le Canton de Vaud avait notamment pris des mesures.
Grâce à ce nouveau cyberagent, les forces de l’ordre pourraient aujourd’hui agir plus rapidement et de façon plus ciblée. «Bien sûr, c’est un policier, rebondit la cheffe de la prévention. S’il constate des publications graves aux enjeux pénaux, par exemple racistes ou homophobes, il pourra directement intervenir. On garde à l’esprit que notre mission est de faire de la proximité pour éviter ou désamorcer les problématiques en devenir. Chaque fois que nous pouvons le faire, ce sont de potentiels drames humains en moins.»