Ce n’est pas ce que Jürg Grossen avait imaginé. Loin de là! Soutenu par 40 élus de tous les partis bourgeois, le président des Vert'libéraux avait réclamé l’été dernier des salaires plus proches du marché global pour l’administration fédérale. Selon lui, les hauts salaires de la fonction publique ne doivent pas concurrencer le secteur privé avec des conditions déséquilibrées.
Le Conseil fédéral a bel et bien décidé de modifier le système salarial de l’administration. Ce dernier doit désormais s’aligner davantage sur les modèles en vigueur dans d’autres entreprises, et sera «davantage orienté vers le marché», promet-il dans un communiqué publié vendredi.
Les hausses automatiques supprimées
Concrètement, l’augmentation automatique des salaires jusqu’au plafond de la classe salariale sera supprimée. Jusqu’ici, cette progression, plus ou moins rapide selon l’évaluation des performances, allait toujours dans la même direction: vers le haut! Désormais, les salaires évolueront selon un modèle prévoyant un salaire cible, atteint en cas de bonnes performances constantes. Ce salaire restera inférieur au maximum de la classe salariale. En revanche, les très bons éléments pourront toujours atteindre ce plafond.
Selon le Conseil fédéral, cela se traduira par des augmentations annuelles plus modestes. En contrepartie, les salaires d’entrée seront plus élevés. «Cela devrait avoir un effet positif pour l’administration fédérale, en particulier pour le recrutement de personnel», indique-t-il. Cette mesure tient aussi compte du fait que la durée d’occupation d’un poste est dorénavant plus courte. Toutefois, les écarts avec le privé ne disparaissent pas.
Autre changement prévu: la suppression de l’indemnité de résidence, jugée obsolète à l’heure de la mobilité croissante. Elle sera intégrée directement au salaire de base. Celle-ci devait compenser les différences régionales du coût de la vie. Mais même ce supplément actuel devrait être simplement intégré au salaire de base.
«Au mieux de la cosmétique»
«C’est tout sauf une optimisation du système salarial! C’est au mieux de la cosmétique», réagit le président des Vert'libéraux Jürg Grossen. Selon lui, le Conseil fédéral fait exactement le contraire de ce qu’il avait demandé: «Il augmente même les salaires d’entrée, alors qu’on voulait des salaires conformes au marché. Pour commencer, cela va coûter plus cher au lieu de coûter moins cher.» Il estime que les PME ne pourront pas suivre. «La concurrence déloyale de la Confédération s’en trouve encore renforcée.»
A moyen et long terme, les coûts salariaux de la Confédération devraient toutefois légèrement diminuer, assure le Conseil fédéral. Un examen est prévu d'ici à quelques années pour évaluer les effets de la réforme.
Les syndicats dénoncent une redistribution
Les syndicats sont, eux aussi, critiques. Ils y voient un transfert des bas salaires vers les plus élevés. Le futur salaire cible sera inférieur de dix points au maximum actuel. Résultat: ceux qui ne l’ont pas encore atteint percevront à l’avenir un salaire réduit, à l’exception des cadres supérieurs, pour lesquels le plafond est maintenu.
«Un tel mécanisme est inacceptable pour les associations de la Commission du personnel fédéral», écrivent-elles. La réforme salariale risque donc de continuer à faire des vagues.