Les eaux suisses deviennent brûlantes. A tel point que dans certains lacs, même la technologie atteint ses limites: au lac de Hallwil, dans le canton d'Argovie, la température est désormais si élevée que les autorités ne peuvent utiliser leur système à air comprimé que pendant la nuit, rapporte «CH Media».
Un signe inquiétant pour l’avenir? Ce qui est sûr, c'est que depuis des décennies, plusieurs lacs suisses souffrent d’un excès de nutriments dans leurs eaux lié à l'augmentation des températures. Le risque? Une prolifération des algues, un déficit en oxygène, et la mortalité des poissons. Face à cela, de nombreux cantons hésitent à intervenir.
«Le dérèglement climatique aggrave le problème de l’oxygène, alors que nous sommes déjà confrontés à une surfertilisation inquiétante», explique Martin Schmid, expert en eaux de surface à l'Institut fédéral suisse des sciences et technologies aquatiques (Eawag).
La Confédération ne veut pas investir
«La hausse des températures ne peut être freinée que par des mesures globales de protection du climat», rappelle l’Office fédéral de l’environnement (OFEV). Très bien. Mais lorsqu’il s’agit d’intervenir concrètement, la Confédération reste plutôt en retrait, estimant que la sauvegarde des lacs est avant tout une responsabilité cantonale. Les cantons d’Argovie et de Lucerne ont été précurseurs dans ce domaine. Depuis plusieurs décennies, des efforts sont déployés pour réduire la surfertilisation des lacs Baldegg, Hallwil et Sempach.
D'autres sont davantage en danger, comme le lac de Zoug, affecté lui aussi par la prolifération des algues. Un dispositif d’oxygénation artificielle ne serait pas un luxe pour qu'il puisse se refaire une santé. Problème: ce projet coûterait environ 11,2 millions de francs aux cantons de Lucerne, Zoug et Schwytz. Si Lucerne et Zoug ont donné leur accord, le parlement du canton de Schwytz s’y est opposé au mois d'avril.
Les humains aussi concernés
Pourtant, ne rien faire pourrait avoir de graves conséquences. Martin Schmid souligne que lorsque la surface de l’eau est trop chaude, «les poissons ne trouvent plus d’habitat adapté, ni dans la couche superficielle, trop chaude, ni dans les profondeurs, pauvres en oxygène. Les poissons s'épuisent, stressent et, dans certains cas, finissent par mourir». Ce risque est particulièrement élevé dans les petits lacs, comme le Greifensee ou le Pfäffikersee, dans le canton de Zurich, moins dans de grands plans d’eau comme le Léman ou le lac de Neuchâtel.
Mais ce phénomène nous affecte directement aussi selon l'expert. «La hausse des températures favorise la prolifération d’algues toxiques ou de puces de canard, responsables d’éruptions cutanées chez les baigneurs. Autant dire que nos loisirs d'été pourraient vite devenir très désagréables.»