Onze hommes et une femme avancent à travers les marais et les sous-bois. Par des chemins détournés, ils ont percé le front pour effectuer une mission de reconnaissance en territoire ennemi. Par 31 degrés en plein été et avec 40 kilos de bagages sur le dos, la sueur coule sur leur visage camouflé de vert. Même les moustiques des marécage ne sortent pas par cette chaleur torride.
Dans la nature sauvage, la troupe dessine un grand cercle en courant et en trébuchant. Les soldats peuvent ainsi voir plus facilement si l'ennemi les suit sur le même chemin. Et effectivement: depuis un point d'observation, ils aperçoivent des combattants ennemis. Couchés sur le ventre, les soldats ouvrent le feu.
L'ennemi est neutralisé, l'exercice est terminé avec succès. Les instructeurs et Vesa Virtanen, chef du Commandement de la défense finlandaise, en visite ce jour-là, sont satisfaits. En tant qu'observateurs, ils ont suivi la troupe pendant environ deux heures. Pour eux aussi, la sueur coule sous le casque.
«Seuls les meilleurs»
Cette équipe de reconnaissance est constituée de différentes unités de l'armée et de gardes-frontières finlandais. Dans le cadre de leur service militaire d'un an, ils suivent un stage de 14 semaines sur le terrain de l'armée de Vekaranjärvi, qui s'étend sur 30 kilomètres carrés, afin de devenir officier de réserve. La ville de Kouvola, dans le sud-est de la Finlande, abrite la brigade Karelia, l'une des trois troupes de réserve finlandaises.
Cette brigade constitue l'épine dorsale de la défense finlandaise. «Seuls les meilleurs sont sélectionnés», explique le lieutenant-colonel Tino Savolainen, responsable du cours d'officier de réserve.
La guerre a rétréci la Finlande
En général, les soldats finlandais en formation parlent de l'«ennemi» de façon floue, sans prononcer le nom du grand pays voisin à une soixantaine de kilomètres.
Les Finlandais ont toujours ressenti qu'ils vivaient à côté d'un voisin non seulement puissant, mais aussi imprévisible. La frontière commune avec la Russie est longue de 1344 kilomètres. Elle a changé après la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle les Finlandais ont combattu deux fois les Soviétiques. Conformément au traité de paix de 1947, la Finlande a dû céder à son voisin environ 10% de son territoire d'alors, et près de 400'000 Finlandais ont dû abandonner leur maison.
Aujourd'hui encore, cette histoire est profondément ancrée dans la chaire des Finlandais et, comme le dit Vesa Virtanen, «les enfants sont biberonnés avec ces mémoires douloureuses». Voilà pourquoi la Finlande fait partie des plus grands soutiens de l'Ukraine.
«Un véritable renfort pour l'OTAN»
Pendant des décennies, l'adhésion à l'OTAN a été taboue pour la Finlande, qui, dans sa politique pacifique, ne souhaitait pas mettre de l'huile sur le feu. Au lieu de cela, le pays, dont la superficie est huit fois supérieure à celle de la Suisse, mais qui ne compte que 5,6 millions d'habitants, a constamment investi dans sa propre force militaire.
Son armée compte actuellement environ 13'000 soldats actifs dans l'armée de terre, la marine et l'armée de l'air. Grâce au service militaire obligatoire pour les hommes, qui a toujours été maintenu, 870'000 réservistes sont prêts à intervenir. En cas d'urgence, 280'000 d'entre eux peuvent être mobilisés. Lorsqu'il y a deux ans, la Finlande a décidé d'adhérer à l'OTAN avec la Suède en raison de la menace croissante, l'expert en sécurité de l'EPF de l'époque, Niklas Masuhr, a évoqué un «véritable renfort» pour l'Alliance.
En raison de la menace actuelle, la Finlande veut se développer dans tous les domaines de la défense. Les dépenses ont été augmentées d'1% au cours des trois dernières années pour atteindre 2,5% du PIB. L'objectif à moyen terme est de dépasser les 3%. En augmentant l'âge du service militaire de 60 ans aujourd'hui à 65 ans, le gouvernement veut renforcer la réserve à un million de soldats.
Depuis que la Russie a envahi l'Ukraine, l'état d'esprit des jeunes recrues finlandaises a changé. Désormais, ils ne souhaitent plus seulement défendre leur propre pays, mais toute l'alliance de l'OTAN. Tino Savolainen regarde les jeunes soldats avec reconnaissance. «Lorsque j'étais moi-même à l'entraînement, le danger et la guerre étaient loin. Les recrues d'aujourd'hui prennent les choses beaucoup plus au sérieux.»