Le 9 août est devenu en 1714 un jour historique pour les Russes: c'est la première fois que l'une de leurs flottes a remporté une bataille. Il s'agit de celle de la péninsule suédoise de Hanko, qui appartient aujourd'hui à la Finlande. Mais cette année, la journée s'annonce sombre pour Vladimir Poutine. Du moins si Donald Trump met sa menace à exécution et impose de nouvelles sanctions à la Russie et à ses principaux partenaires commerciaux.
«Il n'y a aucune raison d'attendre», déclarait Trump lundi en Ecosse en faisant référence au cessez-le-feu en Ukraine. Au lieu des 50 jours initialement indiqués, il ne donne désormais plus que 12 jours au président russe pour mettre fin à la guerre. «Je ne vois tout simplement aucun progrès. Je suis très déçu par le président Poutine», déplorait le président américain.
Mais malgré ces pressions, Poutine ne cédera pas. Car pour la Russie, les choses se passent étonnamment bien sur le front. Des sources ukrainiennes confirment que les premières troupes russes ont progressé jusqu'à l'intérieur de Pokrovsk, une ville stratégiquement importante et âprement disputée. Par ailleurs, les 30'000 soldats nord-coréens qui, selon les services de renseignement sud-coréens, pourraient rejoindre leurs camarades russes dès le mois d'août, viendront renforcer les rangs de Poutine et leur donner un nouveau souffle.
Les Russes veulent y croire
Des experts ukrainiens sont pessimistes quant à la situation sur le front. «Nous perdons chaque jour environ 15 kilomètres carrés au profit des Russes. En hiver, c'était encore cinq kilomètres carrés», calcule sur Facebook l'ex-parlementaire et officier ukrainien Ihor Lutsenko. «Bien sûr, les gains territoriaux russes sont maigres par rapport aux objectifs qu'ils se sont fixés. Il n'empêche: l'Ukraine s'effondre lentement sous les bombardements incessants et la perte progressive de territoires.»
Poutine ne voit donc aucune raison d'abandonner maintenant, la négociation étant la dernière des alternatives. Une vieille logique de guerre. C'est ce que confirme également Klemens Fischer, professeur de relations internationales et de géopolitique à l'Université de Cologne, à Blick: «Tant que les Russes croiront à la victoire sur le champ de bataille, ils ne voudront pas mener de négociations sérieuses.» Pour Poutine, une victoire consisterait à avancer jusqu'au fleuve Dniepr, qui traverse l'Ukraine au centre, du nord au sud, explique l'expert. Kiev, la capitale, est située sur le fleuve. «Si les Russes y parviennent, ce sera la fin de l'Ukraine en tant qu'Etat souverain.»
La nouvelle échéance de Trump ne laissera toutefois pas Poutine indifférent. Si le président américain met réellement sa menace à exécution et impose des sanctions dites secondaires, cela signifierait que des pays comme la Chine et l'Inde (les principaux partenaires commerciaux de Moscou et les plus gros acheteurs de gaz russe) se verraient infliger par les Etats-Unis des droits de douane punitifs massifs. Xi Jinping et Narendra Modi auraient alors toutes les raisons, sinon de jeter immédiatement le «bon ami» de Moscou par-dessus bord, de prendre leurs distances pour un certain temps.
Un «suicide politique» pour Zelensky
Mais selon l'expert en géopolitique, il est peu probable que des négociations aient lieu. «Même Zelensky n'est pour le moment pas intéressé par des négociations: elles conduiraient obligatoirement à l'abandon des territoires perdus», explique Klemens Fischer. Cela coûterait presque à coup sûr son poste au président ukrainien lors des prochaines élections. «Des négociations seraient pour lui un suicide politique.»
Zelensky s'efforce comme jamais de pousser Trump à agir. Lundi, il a longuement remercié le président américain pour la nouvelle échéance et a rappelé que la veille, Poutine avait à nouveau tué 22 personnes en Ukraine – dont une femme enceinte de 23 ans dans un hôpital de Kamjanske.
La population russe ressent, elle aussi, la guerre comme jamais depuis longtemps. Des saboteurs pro-ukrainiens ont mené plusieurs attaques contre des voies ferrées et des aéroports stratégiques. En outre, une attaque de pirates informatiques contre la compagnie aérienne nationale Aeroflot a temporairement paralysé les principales liaisons aériennes de cet immense pays. Côté russe, à la fin des offices religieux dans les églises orthodoxes russes, une sonnerie de cloches très spéciale retentit depuis peu. Selon un prêtre russe, ces cloches sont censées perturber le signal GPS des drones ukrainiens et les rendre inoffensifs.