Peut-il s'en sortir?
Après la semaine la plus difficile de son mandat, Zelensky est très affaibli

La décision d'affaiblir deux autorités anti-corruption continue de faire des vagues malgré le recul de Zelensky. L'UE le punit – et ses soldats vont bientôt lui manquer. C'est ce qu'affirme un officier bien informé de l'armée ukrainienne.
Publié: 28.07.2025 à 18:06 heures
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Volodymyr Zelensky se trouve peut-être au point le plus difficile depuis l'attaque russe contre son pays il y a deux ans et demi.
Photo: Getty Images
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Samuel Schumacher

Les Russes veulent se débarrasser de lui et Donald Trump a du mal à le gérer. Désormais, même en Ukraine, la résistance s'organise contre l'orientation du président Volodymyr Zelensky. 

Son action brutale contre les autorités anti-corruption du pays a entraîné des manifestations de masse à Kiev et, vendredi, une mesure choc de l'UE qui rend la tâche de Zelensky extrêmement difficile. Surtout que les calculs des officiers de son armée ont été révélés pour la première fois: si Zelensky ne sort pas de son chapeau de nouveaux soldats en masse, il n'y aura bientôt plus personne du côté ukrainien du front.

Zelensky est revenu sur sa décision erronée de placer l'agence anti-corruption (Nabu) et le parquet anti-corruption (SAP) sous l'autorité d'un procureur général qu'il avait nommé, suite aux protestations massives au sein de son pays. Un nouveau projet de loi, sur lequel le Parlement se prononcera jeudi, devrait rendre les deux autorités à nouveau indépendantes.

L'UE réduit l'aide financière de Zelensky pour cause d'objectifs manqués

Les protestations contre la décision de Zelensky n'ont toutefois pas cessé. On craint toujours que les subordonnés de Zelensky ne mettent fin à certaines procédures de corruption – par exemple la procédure de corruption contre son ami et ancien vice-Premier ministre Oleksi Tchernichov – d'ici le vote de jeudi.

Les divisions que Zelensky a provoquées dans le pays ne sont pas seulement pénibles pour le président lui-même, mais dangereuses pour la nation entière. «La Russie ne peut pas nous vaincre militairement», déclare le journaliste ukrainien Yevhen Semekhin à Blick. «Mais s'ils parviennent à nous diviser en interne, Poutine en profitera sans vergogne. C'est sa seule chance de soumettre l'Ukraine.»

Pour que cela n'arrive pas, Kiev reste fortement dépendante des livraisons d'armes et des fonds occidentaux. Mais sur les deux fronts, ça coince. Le magazine allemand «Der Spiegel» rapporte que les systèmes de défense antimissile Patriot dont l'Ukraine a un besoin urgent et qu'elle attend de pied ferme ne seront livrés qu'en 2026.

Et vendredi, l'UE a annoncé qu'elle réduirait de 1,5 milliard (de 4,5 à 3 milliards d'euros) la prochaine aide financière destinée à soutenir l'Etat ukrainien, car les objectifs de réforme convenus n'ont pas été atteints. Entre autres parce que l'Ukraine n'a pas réussi à mettre en place son tribunal anti-corruption.

La situation devient également de plus en plus difficile sur le front. D'une part, selon des informations des services secrets sud-coréens, Pyongyang devrait mettre à disposition dès le mois d'août jusqu'à 30'000 nouveaux soldats pour soutenir les troupes de Vladimir Poutine. D'autre part, l'armée ukrainienne elle-même risque de manquer de personnel – malgré les mesures prises récemment comme l'abaissement de l'âge de la conscription ou l'amnistie pour les détenus qui se portent volontaires pour le service militaire.

Calcul horrifique d'un officier ukrainien

C'est ce qu'affirme Igor Loutsenko, ancien parlementaire, conseiller politique et officier dans une unité ukrainienne. Son calcul est le suivant: l'armée ukrainienne veut recruter 30'000 nouveaux soldats par mois, ce qu'elle ne parvient actuellement pas à faire. Jusqu'à 8000 soldats meurent chaque mois et autant sont blessés. A cela s'ajoutent les déserteurs et les prisonniers de guerre, dont les chiffres restent incertains. Dans son post Facebook, Igor Loutsenko part donc du principe que l'armée ukrainienne perd jusqu'à 15'000 hommes par mois. «Dans deux ans, il n'y aura plus personne sur le front si nous continuons simplement à agir ainsi», écrit l'officier.

Pas de bonnes perspectives pour Zelensky – ni sur le plan militaire, ni sur le plan financier, ni sur le plan politique. Mais il restera malgré tout président dans un avenir prévisible. La constitution ukrainienne interdit de nouvelles élections en temps de guerre – sans compter qu'il serait impossible d'organiser des élections libres dans un pays constamment bombardé par des missiles et dont un cinquième du territoire est occupé par une puissance ennemie.

Il pourrait démissionner. L'intérim serait alors assuré par le président du Parlement Ruslan Stefantchouk, l'un des stratèges en chef du parti «serviteurs du peuple» de Zelensky. Mais la démission de Zelensky serait une nouvelle victoire partielle pour Poutine, car elle apporterait à coup sûr de nouveaux troubles dans le pays. Il ne reste donc plus à l'ancien comique, transformé en président de guerre, qu'à continuer de faire bonne figure.

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