Fustigeant le «déni» de la banque, le parquet a requis mardi l'amende maximale de 225.000 euros contre la filiale française d'UBS, jugée pour trois infractions, dont harcèlement moral envers deux lanceurs d'alerte qui avaient dénoncé le système d'évasion fiscale organisé par l'établissement bancaire.
La défense de la succursale, absorbée par UBS Europe en 2023, a plaidé la relaxe, appelant à «dépassionner le débat». Le tribunal correctionnel de Paris a mis sa décision en délibéré au 10 mars 2025. Ce dossier «est une bonne démonstration de ce que la loi Sapin II», qui a donné en 2016 un statut aux lanceurs d'alerte, «était nécessaire», a débuté la procureure.
En parallèle de cette procédure qui a duré plus de 15 ans, la banque UBS AG et sa filiale française ont été définitivement condamnées pour avoir mis en place un système d'évasion fiscale massive vers la Suisse entre 2004 et 2012. La procureure a souligné «l'incroyable résistance de la banque» à «relier» les deux dossiers, alors qu'il s'agit d'une «histoire homogène».
«Il a payé très cher sa fidélité à ses valeurs»
Pour elle, la responsable marketing Stéphanie G. et le chef de l'audit interne Nicolas F. ont bien subi un harcèlement moral entre 2008 et 2010, les infractions d'entrave au CHSCT (pour la première) et celle de subornation de témoin (pour le second) étant tout aussi constituées. Se disant «surprise» par le «déni incompréhensible» de l'entreprise, la représentante du ministère public a souligné que l'amende maximale – encourue pour l'infraction de subornation de témoin – était «minuscule» par rapport au chiffre d'affaires de la banque. Si elle ne «peut pas être dissuasive», le tribunal «ne peut que la prononcer», a-t-elle conclu.
Au début du procès le 3 décembre, le tribunal a signalé que Stéphanie G. 'était désistée de sa constitution de partie civile. Parlant d'une affaire «sans précédent», Me William Bourdon a affirmé que Nicolas F., son client, avait «payé très cher» sa «fidélité à ses valeurs». «Il est devenu pendant des années le mouton noir, celui qu'il fallait à tout prix museler (...) Il ne demande qu'une chose, que vous rendiez une décision (...) qui caractérise l'hyper-cynisme d'UBS» et «qui lui restitue son honneur», a-t-il plaidé.
L'avocate de la défense, Me Sophie Scemla, a critiqué pour sa part un «amalgame» entre ce dossier et celui du blanchiment de fraude fiscale. Elle a expliqué les décisions prises par la hiérarchie, soit par le contexte de la crise financière de 2008 - la banque «était au bord de la faillite» et licenciait «un tiers de ses effectifs» -, soit par des «raisons objectives», extérieures au «whistleblowing» (dénonciations) des deux salariés.