Israël veut en finir
A Gaza, tout savoir sur l'agonie du Hamas et des Palestiniens

Il est impossible de dissocier l'agonie des deux millions de Palestiniens de celle du Hamas. Plus que jamais, le destin de Gaza dépend du mouvement responsable de l'assaut du 7 octobre 2023. Et pour en finir, Israël est prêt au pire.
Publié: 11:18 heures
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Dernière mise à jour: 11:52 heures
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Depuis deux semaines, Israël pilonne la bande de Gaza où ses tanks ont commencé leur intervention terrestre dimanche.
Photo: Anadolu via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

C’est une double agonie qui se déroule dans le huis-clos tragique de la bande de Gaza. D’abord, l’agonie d’une population palestinienne prise en otage, soit environ deux millions de personnes broyées par les tirs d’artillerie et sans cesse refoulés par l’armée israélienne, dont les crimes de guerre sont documentés. Ensuite, l’agonie du Hamas, le mouvement qui a mené l’assaut terroriste du 7 octobre 2023, contre lequel l’Etat hébreu a riposté. Jusqu’à ce que la guerre prenne des proportions insoutenables et inacceptables, dont les Nations unies dénoncent en vain les ravages.

Cette double agonie va de pair. Il faut bien la comprendre pour se faire une idée juste de la situation, alors que beaucoup d’observateurs affirment que Donald Trump commence à prendre ses distances avec Benjamin Netanyahu, ce Premier ministre israélien qu’il a déjà reçu deux fois à Washington depuis le début de son mandat. Et qu’il a toujours soutenu…

L’agonie du Hamas, la clé

Combien de combattants du Hamas sont encore en état de lutter contre les tanks, les drones et les frappes d’artillerie de l’armée israélienne qui a démarré ce dimanche sa nouvelle offensive baptisée «Les chariots de Gédéon»? Quelques centaines? Quelques milliers? Deux informations semblent confirmées. La première est la mort, lors d’un raid sur l’hôpital européen de Gaza, de Mohammed Sinouar, le frère du défunt chef militaire du mouvement Yaya Sinouar, tué le 17 octobre 2024. La seconde est l’existence de négociations directes entre le Hamas et une délégation israélienne au Qatar. Laquelle porte, entre autres, sur la libération des derniers otages (une trentaine seraient toujours vivants) et sur l’exfiltration des familles des combattants.

Il faut bien distinguer deux choses. 1. La survie politique du Hamas, qui semble assurée compte tenu du statut de martyr acquis par ce mouvement responsable du massacre d’un millier d’Israéliens le 7 octobre 2023. 2. Sa mort militaire à Gaza, qui est l’objectif ultime de Netanyahu et de Tsahal, l’armée israélienne. Sur ce dernier point, malgré leurs apparents différents, Israël et les Etats-Unis sont alignés. Pour les deux, le Hamas doit physiquement disparaître de la bande de Gaza. L'annonce par Netanyahu, ce lundi 19 mai, d'une conquête intégrale du territoire palestinien, va dans ce sens.

L’agonie des Palestiniens, l’horreur

Les images sont abominables. Des enfants déchiquetés. Une malnutrition rampante, proche de la famine. Un blocage systématique de l’aide humanitaire distribuée par les Nations unies. Depuis le 2 mars, Israël mène, de facto, une politique de nettoyage ethnique dans l’enclave que l’extrême droite israélienne, présente dans le gouvernement Netanyahu, veut recoloniser. Cette agonie, ne l’oublions pas, est aussi un instrument politique pour Israël comme pour les Etats-Unis car leur objectif commun est d’expulser le plus grand nombre de Palestiniens du territoire. Donald Trump l’a dit et répété: son objectif est la reconstruction de Gaza, une fois vidée de sa population. C’est ce plan qui est aujourd’hui mis en œuvre.

Le fossé Trump-Netanyahu, l’illusion

Oui, Donald Trump redoute de se voir dicter son agenda par Benjamin Netanyahu, à qui il a toujours apporté un soutien sans nuances. Lors de sa visite en Arabie saoudite et dans les pays du Golfe la semaine dernière, le président des Etats-Unis a aussi compris qu’il n’obtiendra jamais une normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et Israël si «Bibi» demeure au pouvoir.

Mais attention: quels que soient les mots employés par l’administration Trump, seuls les actes comptent. Le Secrétaire d’Etat Marco Rubio s’est peut-être montré dimanche excédé au téléphone avec ses interlocuteurs israéliens, mais les livraisons d’armes américaines à Tsahal se poursuivent. A l’agonie des Palestiniens s’ajoute une tragédie politique: pour Trump, la Palestine demeure une fiction avec laquelle il est impossible de négocier.

L’avenir du Hamas, le verrou

Il faut le répéter: Trump et Netanyahu veulent la disparition militaire du Hamas. Israël est peut-être prêt à accepter l’exfiltration de certains de ses dirigeants encore vivants et de leur famille, mais l’on peut imaginer que ceux-ci resteront la cible des services secrets de l’Etat hébreu. La démilitarisation du mouvement et l'éradication de ses combattants, ne sont pas négociables pour Israël. Les pays arabes, et en particulier l’Arabie saoudite et le Qatar, mais aussi l’Iran qui a soutenu militairement le Hamas via le Hezbollah libanais, se retrouvent donc en ligne directe dans cet engrenage de la terreur. S’ils veulent peser sur les événements à Gaza, ils doivent imposer leurs décisions au mouvement responsable de l’assaut terroriste du 7 octobre. C’est l’autre bras de fer qui se joue.

L’Etat Palestinien, l’arme diplomatique

Emmanuel Macron franchira-t-il le pas que beaucoup d’Israéliens, à commencer par Benjamin Netanyahu et son gouvernement, ne lui pardonneront pas: la reconnaissance de l’Etat palestinien? Le président français a affirmé que son pays est prêt à le faire «dans les prochains mois». Pour rappel, l’Espagne, la Slovénie, l’Irlande et la Norvège sont passés à l’acte en juin 2024. Il faudrait, pour que cette décision pèse lourd, une nouvelle démarche collective des pays européens. Or elle semble difficile. N’empêche: une telle reconnaissance aurait au moins valeur d’espoir pour le peuple palestinien de Gaza, littéralement abandonné par la communauté internationale sous les bombes israéliennes. Il n’y a pas, à ce jour, d’autre arme diplomatique comparable.

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