L'économie chinoise est en difficulté – et le gouvernement tente de le dissimuler. Lors de la rencontre entre le président américain Joe Biden et le chef d'Etat chinois Xi Jinping mercredi à San Francisco, les deux hommes se sont mis en scène comme des superpuissances. Mais ce n'est pas (plus) tout à fait vrai.
Les récents défis économiques de la Chine sont souvent décrits comme un cas de «long Covid économique». Selon la thèse de l'économiste américain Adam Posen dans le magazine «Foreign Affairs», la «réaction extrême du président chinois Xi Jinping face à la pandémie» a déclenché «la réaction immunitaire du public» et «produit une économie moins dynamique.»
Mais l'économie chinoise s'affaiblissait déjà bien avant la pandémie Covid-19: un modèle de croissance épuisé, une croissance démographique atrophiée en raison de la politique de l'enfant unique et, surtout, un échec de la direction ont préparé le terrain. Tour d'horizon des nombreux problèmes du géant rouge.
Un modèle de croissance épuisé
Les prédictions d'une «grande crise économique» imminente et apparemment inévitable en Chine existent depuis que le pays est entré dans l'ère de la croissance post-Mao Zedong (1893-1976).
Jusque-là, les prédictions ne s'étaient pas réalisées. Mais cette fois, les choses semblent différentes. Les facteurs qui ont contribué à la croissance rapide de la Chine après 1978 s'affaiblissent. Parallèlement, de nouvelles sources de croissance émergentes exigent des réformes qui n'ont pas encore été mises en œuvre.
Une croissance démographique atrophiée
Depuis les années 1990, le taux de natalité de la Chine (le nombre moyen d'enfants par femme) est passé sous le seuil critique de 2,1. Cela signifie qu'il n'y a pas assez de nouveaux nés pour compenser le nombre de décès dans la population.
L'une des principales raisons de cette situation est l'impact de la politique chinoise de l'enfant unique. Les coûts élevés de l'éducation des enfants, l'évolution des modèles de famille et de mariage ainsi qu'une croissance économique lente contribuent aussi à la baisse de la population.
Contrairement à de nombreux pays européens qui ont également un faible taux de natalité, la Chine ne compense pas ce déficit par l'immigration. En d'autres termes, la population diminue réellement – ce qui va modifier le financement du système de retraite en Chine, mais devrait par ailleurs secouer le secteur immobilier.
L'éclatement d'une bulle immobilière
Le secteur immobilier connaît déjà des problèmes. En octobre, les prix des maisons en Chine ont connu leur plus forte baisse depuis huit ans. Cela laisse présager une crise immobilière croissante, bien que le gouvernement ait intensifié ses efforts pour stimuler la demande.
Selon le magazine économique «Caixin» de Pékin, les prix des maisons neuves dans 70 villes (à l'exception des logements subventionnés par le gouvernement) ont baissé de 0,38% le mois dernier par rapport à septembre, après une baisse de 0,3%. Cette chute a été la plus forte depuis février 2015.
Un président autoritaire
Le dirigeant chinois de longue date Xi Jinping ne peut être tenu pour responsable des profonds problèmes structurels de l'économie chinoise. Il est en revanche responsable de l'incapacité du gouvernement à les résoudre.
Xi Jinping, président depuis 2013, a considérablement freiné la croissance chinoise. En nationalisant de nombreuses entreprises, il a effrayé les investisseurs étrangers. À cela se sont ajoutées les querelles incessantes avec les États-Unis et d'autres pays occidentaux, qui ont ainsi renforcé leurs contrôles à l'exportation vers la Chine.
Au fond, Xi Jinping n'a pas construit la bombe économique à retardement en Chine, mais il en a radicalement raccourci la mèche. Car dans le passé, le gouvernement chinois réagissait aux problèmes économiques par des réformes et du pragmatisme. Aujourd'hui, Xi Jinping semble répondre à chaque défi par une forme de retenue politique et économique.
Un monde divisé
Le système chinois est confronté à toute une série de problèmes intérieurs d'ordre économique et social, structurel et financier, et certains affirment depuis longtemps que ce n'est pas le bon moment pour se disperser dans autant de directions.
La guerre en Ukraine a entraîné une rupture avec l'Europe, et les relations avec les États-Unis n'ont cessé de se détériorer en raison d'une longue liste de problèmes. Cela nuit au moral des investisseurs, n'est pas bon pour l'économie et pèse sur la conjoncture qui, de toute évidence, s'affaiblit.