Elle est la bombe conventionnelle la plus puissante d'Amérique. La GBU-57 pèse 13 tonnes, mesure six mètres de long. Capable de détruire des cibles profondément enfouies, elle est la seule capable d'anéantir le site nucléaire secret iranien de Fordo, ce qui constituerait un véritable tournant dans la guerre entre Israël et l'Iran. Encore faut-il que les Etats-Unis se lancent dans la bataille.
Mais Donald Trump sautera-t-il le pas? Impossible de le dire pour l'heure. Ce qui est certain, en revanche, c'est que les mouvements de troupes américaines révèlent un déploiement massif de matériel en direction de Téhéran. L'arsenal actuellement envoyé dans la région donne une idée du plan que pourrait adopter Washington en cas d'engagement dans le conflit.
Depuis plusieurs jours, les experts militaires observent d'importants mouvements aériens. Plus de 30 avions de ravitaillement américains volent en direction du Moyen-Orient, notamment des KC-135 et des KC-46, deux engins qui ont pour particularité de pouvoir ravitailler en vol des bombardiers furtifs B-2. Or, ceux-ci sont les seuls avions au monde à pouvoir transporter la fameuse bombe GBU-57.
L'usine de Fordo, cible no 1
En mer, la présence américaine se renforce également. Le porte-avions USS Nimitz a quitté les eaux d'Asie du Sud-Est et se dirige désormais vers le golfe Persique, où il devrait rejoindre l’USS Carl Vinson et l’USS Thomas Hudner, deux autres porte-avions déjà actifs dans la région. Ce déploiement discret, mais significatif, pourrait être le signe d'une préparation silencieuse à une éventuelle intervention.
L'objectif principal de cette mobilisation serait la destruction de l'usine d'enrichissement d'uranium Fordo, située non loin la ville iranienne de Qom. Ce site, enfoui sous un massif montagneux à une profondeur allant de 80 à 110 mètres selon les estimations, abrite environ 2700 centrifugeuses qui, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (IAEA), peuvent enrichir l'uranium jusqu'à 60%.
Selon les experts du Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS), cette installation pourrait faire passer cet enrichissement à 90%, ce qui permettrait d'utiliser l'uranium à des fins militaires. Or, selon Israël et les Etats-Unis, cette échéance se rapproche.
Trump peut tout faire changer
Un général du Commandement central américain a ainsi affirmé que l'Iran pourrait, en l'espace de trois semaines, produire suffisamment de matériau pour fabriquer neuf armes nucléaires, une estimation démentie par Téhéran. Dans les faits, la question de savoir si l'Iran poursuit activement ou non un programme d'armement nucléaire fait débat, jusqu'au sein même de l'administration Trump.
Il n'empêche: pour Israël, l'usine de Fordo est l'incarnation même du danger nucléaire iranien. Le problème, c'est que l'Etat hébreu ne peut tout simplement pas détruire ce site. Les Etats-Unis, eux, le peuvent, puisqu'ils sont les seuls à posséder cette fameuse bombe GBU 57, capable de s'enfoncer jusqu'à 60 mètres sous terre avant d'exploser.
Pour pouvoir atteindre sa cible, la bombe doit toutefois être larguée par des avions B-2. Mais d'où partiraient-ils? Vraisemblablement de la base américaine Diego Garcia, située au cœur l'océan Indien, à quelque 5180 kilomètres du site de Fordo, et à environ cinq heures de vol. Tout juste faisable pour ces avions.
Difficultés techniques et politiques
Les autorités américaines n'ont pas confirmé l'imminence d'une intervention. Le ministre de la Défense, Pete Hegseth, a très vaguement évoqué le déploiement de «capacités supplémentaires» au Moyen-Orient. Des images satellites prouvent néanmoins que six bombardiers B-2 se trouvent depuis le mois de mai déjà sur la base américaine de Diego Garcia, et qu'ils seraient prêts à être mobilisés en cas d'intervention.
Mais attaquer Fordo pourrait se révéler très difficile, même pour les Etats-Unis. Pour détruire véritablement l'installation, plusieurs bombes GBU-57 devraient être dirigées avec une précision absolue vers le même point d'impact, une opération nécessitant une coordination extrême. Et même si la manoeuvre s'avère fructueuse, il n’est pas garanti que les parties les plus profondes de l'installation soient touchées.
Un président évasif
Que comptent faire les Etats-Unis? Donald Trump reste évasif sur la question. Mardi, il a appelé l'Iran, via sa plateforme Truth Social, à une «capitulation inconditionnelle», avant de déclarer le lendemain qu'il souhaitait une «victoire totale d'Israël».
Mais des experts militaires émettent l'hypothèse que ce renforcement de la présence américaine sert moins à préparer une véritable offensive qu'à faire peser une menace crédible. Le message à Téhéran est clair: «nous pouvons frapper quand nous le voulons.»