«Détourner l'attention»
L'ex-président Porochenko rentre en Ukraine et risque l'arrestation

L'ex-président ukrainien Petro Porochenko doit rentrer dans son pays lundi après un mois d'absence et malgré la menace d'une arrestation pour «haute trahison», au risque de provoquer une crise politique en pleines tensions avec la Russie.
Publié: 17.01.2022 à 10:38 heures
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Des partisans de l'ex-président ukrainien Petro Porochenko attendent son arrivée devant l'aéroport de Kiev, le 17 janvier 2022
Photo: GENYA SAVILOV

Agé de 56 ans, M. Porochenko est le principal rival de l'actuel président, Volodymyr Zelensky, et l'un des hommes les plus riches d'Ukraine. Il doit atterrir vers 7H10 GMT à l'aéroport Sikorsky de Kiev, en provenance de Varsovie.

«Je reviens en Ukraine pour lutter pour l'Ukraine, pas pour lutter contre Zelensky», a lancé M. Porochenko dimanche lors d'une conférence de presse à Varsovie.

Il a accusé le chef de l'Etat d'avoir ordonné les poursuites contre lui pour «détourner l'attention» des problèmes du pays, tout en estimant que cette lutte politique interne était «très nuisible» pour la position de Kiev face à Moscou.

Son parti, qui craint son interpellation à son arrivée, a appelé ses soutiens à se réunir à l'aéroport. Un tribunal de Kiev doit décider lundi matin s'il convient ou non d'arrêter l'ex-dirigeant dans l'attente de son procès.

Le retour de M. Porochenko intervient au moment où l'Ukraine craint une invasion par la Russie voisine, qui a massé des troupes et des blindés à ses frontières. Moscou dément tout projet d'offensive militaire.

Dans ce contexte explosif, l'Ukraine a accusé dimanche la Russie d'être derrière une cyberattaque d'ampleur qui a visé la semaine dernière les sites de plusieurs ministères.

M. Porochenko, dont la fortune est estimée à 1,6 milliard de dollars par le magazine Forbes, a dirigé le pays de 2014 à 2019, avant d'être battu par M. Zelensky.

Aujourd'hui député, l'ex-président a été cité depuis dans plusieurs dizaines d'affaires judiciaires. En décembre, les autorités ont annoncé qu'elles le soupçonnaient de «haute trahison».

Avoirs gelés

M. Porochenko rejette en bloc les accusations, et Washington et Londres ont dit «suivre de près» les nouvelles poursuites qui le visent.

Début janvier, un tribunal de Kiev a ordonné le gel des avoirs de l'ex-président, qui possède notamment une grosse entreprise de confiserie, Roshen, et deux chaînes de télévision.

Concrètement, M. Porochenko est soupçonné d'avoir facilité l'achat de charbon à des entreprises situées dans l'est de l'Ukraine, aux mains des séparatistes prorusses qui sont en guerre contre Kiev.

Les faits remontent à 2014 et 2015 et portent sur environ 48 millions d'euros. L'ex-président risque jusqu'à 15 ans de prison.

L'Ukraine est déchirée depuis 2014 par un conflit dans l'est du pays entre forces de Kiev et séparatistes prorusses qui a fait plus de 13.000 morts et a démarré après l'annexion de la Crimée par Moscou.

Toute tentative de coopération avec les séparatistes, dont Moscou est largement considéré comme le parrain militaire, est très mal vue par nombre d'Ukrainiens.

En 2019, M. Porochenko avait été battu à plate couture par Volodymyr Zelensky, un ex-comédien novice en politique.

L'ancien chef de l'Etat semble déterminé à prendre sa revanche à la prochaine élection et reste, selon des sondages, l'homme politique le plus populaire après M. Zelensky.

Pendant son passage au pouvoir, M. Porochenko a rapproché son pays des Occidentaux, mais n'a pas réussi à endiguer la corruption et la pauvreté. M. Zelensky a promis d'éradiquer ces fléaux mais n'a pas fait de beaucoup de progrès jusqu'à présent.

En 2011, l'ex-Première ministre Ioulia Timochenko, rivale du président prorusse de l'époque Viktor Ianoukovitch, avait été condamnée à sept ans de prison pour abus de pouvoir, puis libérée en 2014. Il lui a été reproché d'avoir signé un accord gazier avec la Russie jugé trop défavorable pour l'Ukraine.

(AFP)

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