Une sombre industrie
Après les critiques, Séoul durcit ses adoptions internationales

La Corée du Sud réforme son système d'adoption suite à une enquête critique. Dès samedi, l'Etat prendra en charge l'ensemble du processus, mettant fin à des décennies de gestion par des agences privées accusées d'abus.
Publié: 10:34 heures
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a Corée du Sud réforme son système d'adoption suite à une enquête critique. (Image d'illustration)
Photo: IMAGO/Zoonar
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AFP Agence France-Presse

La Corée du Sud va mettre en place samedi de nouvelles procédures d'adoption pour mettre fin à une pratique datant de plusieurs décennies, consistant à les confier à des agences privées, cibles de nombreuses critiques pour des abus.

La Corée du Sud, la quatrième économie d'Asie et une puissance culturelle mondiale, a envoyé vers l'étranger plus de 140'000 enfants entre 1955 et 1999. Mais une enquête officielle a conclu cette année que la procédure internationale pour les adoptions a été entachée d'irrégularités, y compris des «enregistrements frauduleux d'orphelins, des falsifications d'identité et la vérification inadéquate des parents adoptifs».

Les droits des enfants sud coréens ont été violés, a conclu l'enquête menée par une commission de vérité. Cette instance indépendante mise en place par l'Etat a appelé à des excuses publiques et a imputé au gouvernement la responsabilité de la situation, en particulier pour l'absence de règlementation concernant les frais d'adoption qui a mené à une industrie axée sur le profit.

Défendre les droits des enfants

Samedi, la Corée du Sud va introduire «un système public d'adoption entièrement restructuré dans lequel l'Etat et les gouvernements locaux prennent l'entière responsabilité de l'ensemble de la procédure d'adoption», a indiqué le ministre de la Santé sud-coréen. Ce changement est «un pas significatif pour assurer la sécurité et défendre les droits des enfants adoptés», a ajouté le ministre.

L'adoption internationale a débuté après la guerre de Corée pour éloigner les enfants nés de mère coréenne et de père soldat américain dans un pays qui prône l'homogénéité ethnique. Elle est devenue une véritable industrie dans les années 70 et 80, rapportant aux agences d'adoption des millions de dollars alors que la Corée du Sud surmontait la pauvreté d'après-guerre avec un développement économique rapide et agressif.

Mais le système a échoué dans la mise en place «de véritables procédures légales de consentement» pour les parents sud-coréens menant à des affaires, largement publiées, d'enfants perdus placés sur des listes pour l'adoption à l'étranger, a estimé la commission en mars. Le président de la commission Park Sun-young avait à cette occasion qualifié ces faits de «partie honteuse» de l'Histoire sud-coréenne.

Selon le nouveau système, des procédures clés – comme l'évaluation des parents adoptifs potentiels et leur compatibilité avec des enfants – seront examinées par un comité ministériel, selon le principe du «meilleur intérêt de l'enfant».

L'Etat entièrement responsable

Auparavant, cela était fait par des agences d'adoption importantes, avec un contrôle minimal de la part de l'Etat. «Avec cette restructuration du système public d'adoption, l'Etat prend maintenant l'entière responsabilité d'assurer la sécurité et les droits de tous les enfants adoptés», a expliqué un responsable du ministère de la Santé Kim Sang-hee.

Des militants ont cependant estimé que ces nouvelles mesures seraient seulement un point de départ et loin d'être suffisantes. «Bien que je pense qu'il est grand temps que la Corée ferme toutes les agences privées d'adoption, Je ne pense pas (...) que le fait que l'Etat se charge des nouvelles adoptions soit suffisant», a indiqué Lisa Wool-Rim Sjoblom, une écrivaine coréenne adoptée et ayant grandi en Suède.

Le gouvernement devrait avoir pour priorité de mettre en oeuvre les conclusions de la commission, publier des excuses officielles, et aider les dizaines de milliers de Coréens qui ont été envoyés à l'étranger pour être adoptés, a-t-elle dit à l'AFP.

«Le gouvernement doit d'urgence reconnaître toutes les violations des droits humains qu'il a permises, encouragées et auxquelles il a systématiquement participé, et le plus vite possible, commencer à faire des réparations». 

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