Les tempêtes et tourbillons de poussière qui parcourent constamment la surface de la planète Mars génèrent de petites décharges électriques. Elles ont été enregistrées pour la première fois par le microphone du rover américain Perseverance. Ce sont de «petits clacs» comparables à «ce que vous pouvez ressentir par temps sec quand vous touchez votre portière de voiture et qu'il y a un peu d'électricité statique», décrit Baptiste Chide, chercheur CNRS à l'institut de recherche en astrophysique et planétologie de Toulouse.
Ces décharges «très faibles en énergie» sont présentes «absolument tout le temps et partout» sur Mars et leur impact est loin d'être négligeable, poursuit le planétologue. Leur détection a donné lieu à une étude menée par une équipe internationale et publiée dans la revue Nature, à laquelle il a participé avec d'autres scientifiques français. Ces décharges proviennent du frottement des minuscules grains de poussière entre eux. Ils se chargent en électrons, puis libèrent leurs charges sous forme d'arcs électriques longs de quelques centimètres, accompagnés d'ondes de choc audibles.
Comprendre le climat martien
Sur la Terre, les tempêtes et tourbillons de poussière («dust devils») dans les zones désertiques génèrent aussi des champs électriques. Mais l'électrification des particules aboutit rarement à de réelles décharges. Sur Mars, «à cause de la pression qui est très basse et de la composition de l'atmosphère, la quantité de charges à accumuler pour générer une décharge est beaucoup plus faible», explique Baptiste Chide.
La confirmation de ce mécanisme, qui facilite le soulèvement des poussières, est un pas de plus dans la compréhension du climat martien, encore largement méconnu. C'est un peu comme le cycle de l'eau sur terre. On sait en effet que «c'est la poussière qui pilote le climat martien» avec, par exemple, une «saison des tempêtes de poussières qui va commencer d'ici à la fin de l'année», souligne le chercheur.
En accélérant certaines réactions chimiques dans l'atmosphère, ces décharges pourraient aussi conduire à la production de substances hautement oxydantes, qui, en condensant, seraient capables de détruire les molécules organiques - éléments constitutifs de la vie - à la surface de Mars. Cela pourrait aussi expliquer la disparition étonnamment rapide du méthane, un sujet de débat scientifique depuis plusieurs années.