Le coup de marteau douanier du président américain Donald Trump a placé la Suisse sous le regard attentif de ses voisins. Depuis début août, l’annonce des 39% sur les produits suisses inquiète fortement Berne. Alors que l’on cherche désespérément une issue dans la Berne fédérale, les responsables politiques autrichiens et allemands y voient aussi une opportunité.
Depuis plusieurs semaines, ils multiplient déclarations et appels en faveur d’un rapprochement avec l’UE. Certains plaident pour un lien plus étroit entre Berne et Bruxelles. D’autres vont jusqu’à évoquer une adhésion de la Suisse à l’Union européenne. Enfin, certains considèrent le pays comme l’exemple même de la vulnérabilité des petits Etats. Petit tour d’horizon.
Peter Kaiser
Un haut responsable autrichien utilise la crise douanière comme argument de dissuasion. Peter Kaiser, longtemps chef du gouvernement de Carinthie et vice-président des sociaux-démocrates autrichiens, est récemment intervenu lors de la tournée «Europa Café», destinée à sensibiliser les citoyens aux enjeux européens.
«Oui, tout ce qui brille dans l’UE n’est pas or. Nous le savons, la bureaucratie doit en tout cas être réduite», a reconnu Peter Kaiser. Mais à l’inverse, «aucun Etat de l’UE n’aurait une place importante dans ce monde sans l’union des 27». Il a explicitement cité comme avertissement «le récent comportement du président américain avec la Suisse», selon un communiqué du Land.
Les pays de l’UE sont en effet moins durement touchés, soumis à des droits de douane réduits à 15%. Peter Kaiser a évoqué les grands défis actuels et s’est dit «heureux que l’Autriche, et donc la Carinthie, fasse partie de l’UE».
Omid Nouripour
En Allemagne, Omid Nouripour, figure des Verts et vice-président du Bundestag, est allé encore plus loin. Il a parlé d’une possible «turbo-adhésion» de la Suisse à l’Union européenne: «Le gouvernement devrait proposer à la Suisse d’approfondir maintenant rapidement la coopération, jusqu’à une turbo-adhésion à l’UE», a-t-il déclaré à l’agence DPA.
Et d’ajouter: «Si, sous le signe des temps nouveaux, nos amis suisses souhaitent se rapprocher davantage de l’Union européenne, l’Allemagne devrait soutenir activement cette démarche.» Selon lui, le conflit douanier avec Trump montre «douloureusement à quel point les petits Etats sont vulnérables lorsqu’ils sont livrés à eux-mêmes».
Sabine Hartmann-Müller
Sabine Hartmann-Müller, députée CDU au Parlement régional du Bade-Wurtemberg, est considérée comme la conseillère pour la Suisse du ministre d’Etat compétent dans ce Land de 11 millions d’habitants. Elle a mis en garde contre un effondrement économique en Suisse, qui aurait aussi des conséquences de l’autre côté de la frontière.
Elle appelle l’UE à agir: il ne suffit plus d’envoyer de simples «signaux positifs». «Si Trump fait du chantage à la Suisse en tant que partenaire commercial, la Suisse devrait être mise en mesure de se tourner d’autant plus vers l’UE en tant que partenaire», a-t-elle déclaré. Pour elle, il ne faut surtout pas entraver les relations transfrontalières.
Markus Töns
Markus Töns, porte-parole du groupe SPD au Bundestag pour les questions européennes, s’est lui aussi prononcé clairement en faveur d’une adhésion suisse à l’UE. «Si la Suisse fait une demande d’adhésion, elle est la bienvenue», a-t-il déclaré au Spiegel.
Il s’est dit «fermement convaincu que la Suisse serait un très bon Etat membre». Pour d’autres pays, il faut parfois des années pour remplir les critères, mais «la procédure serait assez simple à clarifier pour la Suisse». Markus Töns estime cependant que l’initiative doit venir de Berne.
Andreas Schwab
Andreas Schwab, député européen CDU et président de la commission du Parlement européen pour les relations avec la Suisse, est reconnu comme fin connaisseur de la Confédération. Dans plusieurs interviews, il a expliqué au public allemand les conséquences des droits de douane punitifs.
Lui aussi mise sur l’union des forces: «La situation n’est pas simple, mais il y a une lueur d’espoir: une collaboration approfondie avec l’Union européenne offre la possibilité de trouver ensemble des solutions pragmatiques et d’améliorer les conditions économiques», a-t-il déclaré à la chaîne NTV. Selon lui, de nombreux Suisses sont «déçus, ce qui est compréhensible, car la Suisse est un pays très ouvert sur le monde et favorable au commerce».