La Suisse est un ogre en matière de béton. Avec 600 kilos de ciment par habitant et par année, elle en consommerait même deux fois plus que certains de ses voisins européens. En occupant la colline du Mormont dans le cadre de la première Zone à Défendre (ZAD) du pays entre octobre 2020 et mars 2021, les militants ont mis cette réalité étonnamment méconnue sous les projecteurs.
Cinq ans plus tard, les Vaudois se prononcent ce dimanche sur l'initiative «Sauvons le Mormont» et son contre-projet, porté par le Conseil d'Etat. Il y est question de la protection de cette colline, ou du moins ce qu'il en reste, une carrière de calcaire étant exploitée depuis les années 1970 par une cimenterie (aujourd'hui Holcim). Mais également de l'omniprésence du béton dans la construction.
Faune et flore exceptionnelles
Lancée par un comité composé de partis de gauche ainsi que de l'Association pour la Sauvegarde du Mormont et Pro Natura Vaud, l'initiative vise à inscrire dans la Constitution la protection de cette colline, qui abrite une faune et une flore exceptionnelles ainsi qu'un important patrimoine historique et archéologique. Pourquoi dans la Constitution? Parce qu'une loi peut être beaucoup plus facilement détricotée, relèvent les initiants.
L'initiative veut également ancrer dans la Constitution une utilisation rationnelle par l'Etat et les communes du calcaire, de l'argile et du sable. Soit les matières premières qui servent à la fabrication du ciment, et dont l'extraction et l'utilisation ont un impact considérable sur l'environnement. Elle demande également que l'utilisation de matériaux respectueux de l'environnement soit privilégiée à celle du ciment.
Extension de la carrière déjà validée
Le Conseil d'Etat, lui, estime que l'inscription de la protection du Mormont dans une loi en juin dernier garantit déjà la protection du site. II relève que, selon ce dispositif légal, l'extraction des ressources du Mormont pourra se poursuivre uniquement dans les périmètres déjà autorisés. En décembre 2022, un arrêt du Tribunal fédéral avait en effet déjà validé l'extension de la carrière du Mormont.
Le contre-projet propose un nouvel article visant à introduire la notion d'économie circulaire dans la constitution vaudoise. Le but est d'inciter l'Etat et les communes à réduire la production de déchets et favoriser la réutilisation et le recyclage des matériaux.
L'initiative a reçu notamment le soutien de la section romande de la Fédération des architectes suisses, qui veut promouvoir l’emploi de matériaux alternatifs dans la construction. Les milieux économiques estiment quant à eux que l'initiative menace la construction de nouveaux logements, condamne la cimenterie et favoriserait l'importation de ciment de l'étranger.