Swiss affirme respecter les droits des passagers en cas d'annulation ou de retard. Selon le règlement européen, qui s'applique également en Suisse, les passagers ont droit dans certains cas à une indemnisation si le vol est retardé de plus de trois heures, ou s'il est annulé. Le montant de l'indemnisation peut aller jusqu'à 600 euros. Les compagnies aériennes doivent aussi prendre en charge les frais de restauration et d'hôtel.
Mais il arrive régulièrement que les compagnies aériennes se débarrassent des passagers en leur présentant des excuses, faisant tout pour éviter de mettre la main au porte-monnaie. Dans de tels cas, les passagers peuvent porter plainte auprès de l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC), qui dépend du conseiller fédéral Albert Rösti. L'OFAC peut alors engager une procédure pénale administrative et infliger des amendes aux compagnies aériennes.
Selon une investigation de Blick, l'OFAC a infligé huit amendes à des compagnies aériennes du groupe Lufthansa, auquel appartient Swiss. Au total, deux amendes ont été infligées à Swiss, quatre à Lufthansa et deux à Brussels Airlines.
Swiss enfreint régulièrement le règlement
Le 25 octobre 2024, le nouveau PDG de Swiss, Jens Fehlinger, n'est en fonction que depuis un peu plus de trois semaines lorsque Swiss doit annuler un vol. La compagnie aérienne explique à un passager que son voyage a commencé en dehors de l'Union européenne (UE) et que «le règlement ne s'applique pas» à son «itinéraire».
Après avoir porté plainte auprès de l'OFAC, le passager a obtenu gain de cause. L'argument de Swiss selon lequel le règlement ne s'applique pas à l'itinéraire du passager est «une présentation inexacte» de la situation, selon les employés de l'OFAC. Et d'ajouter: «Comme des infractions au règlement ont déjà été commises par Swiss, il s'agit d'une violation répétée des obligations du transporteur aérien envers ses passagers.» En guise de sanction, deux amendes de 1000 francs chacune ont été infligées.
«Nous avons décidé de ne pas aller plus loin en contestant les amendes sur le plan juridique, car les dépenses n'auraient pas été proportionnelles», répond de son côté Swiss. La compagnie aérienne parle de «cas exceptionnels regrettables», dont elle tire toutefois «les leçons». Elle assure s'efforcer «d'appliquer correctement toutes les dispositions légales». «Nous prenons les éventuels retours d'information très au sérieux et travaillons continuellement à l'amélioration de nos processus.»
Nouveau record de plaintes
Mais s'agit-il vraiment de cas isolés? En réalité, ces situations sont largement sous-estimées, car de nombreux passagers ignorent même qu’ils peuvent signaler les compagnies aériennes à l’OFAC. Malgré cela, un nouveau record – basé sur les chiffres de l'organe – a été atteint en 2024: 7600 procédures pénales administratives ont été lancées contre l'ensemble des compagnies aériennes. Au total, 62 amendes ont été infligées cette année-là, bien que les données ne précisent pas combien d'entre elles ont visé Swiss.
Il y a toujours des cas où Swiss n'agit que sous la pression juridique, estime Simon Sommer, juriste et fondateur de la société cancelled.ch, qui est spécialisée dans l'aide aux passagers. «Chaque année, nous menons plusieurs dizaines de procédures judiciaires contre Swiss ainsi que d'innombrables procédures extrajudiciaires.»
Et de préciser: «Si une compagnie aérienne refuse une indemnisation, elle doit, conformément au renversement de la charge de la preuve du règlement européen sur les droits des passagers aériens, expliquer concrètement et clairement pourquoi il y a eu une circonstance exceptionnelle.»
Swiss admet un potentiel d'amélioration
Si Swiss affirme qu'elle a dû annuler un vol à destination de Singapour pour des raisons techniques, ce n'est pas suffisant. «Swiss doit prouver concrètement qu’il ne s’agissait pas d’un risque relevant de l’activité commerciale normale», explique Simon Sommer. C’est pourquoi il est judicieux de se défendre sur le plan juridique.
Swiss reconnaît qu’il existe un potentiel d’amélioration: «Nous travaillons en permanence à la mise en place de processus permettant, à l’avenir, d’identifier plus clairement et plus rapidement les réclamations légitimes, même en l’absence de pression juridique.»