A quelques jours des commémorations des attentats du 13-Novembre 2025 en France, le spécialiste de l'extrémisme violent, Mathieu Colin, note que le processus pour se radicaliser devient toujours plus rapide. Et les jeunes voire les mineurs sont particulièrement ciblés.
On assiste à un raccourcissement du temps entre le début de la radicalisation et le passage à l'acte, met en garde, mardi dans «24 Heures» et la «Tribune de Genève», Mathieu Colin. Il est directeur scientifique de la chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l'extrémisme violent et expert scientifique auprès du Centre d'information sur les croyances de Genève (CIC).
Isolement social
«Dans les années 2000, il fallait en moyenne un peu plus d'un an [...] À présent, quelques semaines parfois suffisent», indique-t-il. Il pointe du doigt les réseaux sociaux, qui agissent comme «des accélérateurs, en mettant en contact les jeunes avec des communautés en ligne, via des plateformes de jeux vidéo ou des canaux plus cryptés comme Telegram». Et leurs algorithmes ont tendance à renforcer la visibilité des contenus problématiques.
La radicalisation combine désormais diverses idéologies autour d’une fascination pour la violence. L’isolement social est aussi un facteur de vulnérabilité important dans la radicalisation. La famille peut faire rempart. «Mais le problème, c’est que les parents sont souvent démunis: ils sont rarement au courant de la vie numérique de leur enfant», note l'expert.
Une stratégie comm'
Le chercheur estime que les plateformes ne régulent pas assez finement les contenus. Il cite l'exemple des mèmes, soit des images ou vidéos humoristiques, qui ont l’air inoffensifs, mais qui fonctionnent comme des signaux de ralliement (en anglais le «dog whistle").
Les réseaux sociaux tendent en outre à banaliser et normaliser des idées liées à l'extrême droite, comme le thème «du grand remplacement» thématisé en 2022 en France par Eric Zemmour. Cette idée marginale au début s'est peu à peu transformée en un enjeu de société dont se sont emparés les partis institutionnels. Cette stratégie consiste à «gagner la bataille culturelle avant la bataille politique», explique le professeur.
«Mais toutes les personnes exposées à des contenus problématiques sur le Net ne deviennent pas des extrémistes, rassure l'expert. De plus en plus de jeunes, natifs du numérique, savent très bien reconnaître ces phénomènes et savent s’en préserver», conclut-il.