20 patrons impliqués
Rebondissement dans l'affaire des fraudes à la Caisse vaudoise de chômage

Dans l'affaire de la fraude à la Caisse cantonale vaudoise de chômage, cinq accusés ont trouvé un accord avec le Ministère public, leur permettant d'amoindrir leurs peines. Une personne est toujours en fuite.
Publié: 14:05 heures
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Le Tribunal d'arrondissement de Lausanne doit encore formellement valider les peines dans l'affaire de la fraude à la Caisse cantonale vaudoise de chômage.
Photo: LAURENT GILLIERON
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ATS Agence télégraphique suisse

L'affaire de la vaste fraude à la Caisse cantonale vaudoise de chômage a connu un dénouement inattendu. Alors que le procès des principaux protagonistes démarrait lundi pour 15 jours à Lausanne, le Ministère public et les accusés ont trouvé un accord.

Les cinq prévenus, quatre anciens patrons actifs dans la construction et un ex-syndicaliste, ont admis la plupart des faits et accepté leur peine. L'entrepreneur le plus impliqué, déjà en détention depuis plusieurs mois, écope de 24 mois de prison ferme, notamment pour escroquerie qualifiée.

Cette infraction a aussi été retenue à l'encontre de l'ex-syndicaliste, accusé d'avoir agi comme «facilitateur» dans cette arnaque. Il est sanctionné par 33 mois de prison, dont 6 ferme. Les trois autres prévenus s'en sortent avec des peines plus légères.

Une personne est en fuite

Ces sanctions doivent encore être formellement validées par le Tribunal d'arrondissement de Lausanne. Son président a toutefois affirmé lundi que les accords semblaient «adéquats» et que la Cour va «aller dans le sens» des arrangements conclus avec le Ministère public. La dernière véritable incertitude concerne le sixième et dernier accusé, absent lundi et actuellement en fuite.

La fraude, commise entre 2013 et 2016, a consisté à empocher illégalement des indemnités en cas d'insolvabilité (ICI), lesquelles couvrent des arriérés de salaires lorsqu'une entreprise fait faillite. Le dommage pour la Caisse cantonale de chômage (CCh) a été évalué à trois millions de francs.

Selon le principal acte d'accusation, long de 144 pages, l'arnaque suivait presque toujours le même schéma: des entrepreneurs du bâtiment enchaînaient volontairement les faillites, ce qui permettait à leurs collaborateurs ainsi qu'à des connaissances jouant le rôle d'employés fictifs de prétendre aux indemnités. Leurs demandes étaient envoyées au syndicat Unia à Lausanne, où travaillait leur complice, lequel transmettait ensuite les dossiers à la caisse de chômage.

300 employés impliqués

Les indemnités indûment touchées étaient partagées entre les faux employés, les patrons des entreprises en faillite et l'ex-collaborateur d'Unia. Les vrais employés recevaient aussi l'argent, mais certains aussi de manière illégale pour avoir gonflé leur salaire ou leurs heures de travail.

En tout, une vingtaine de chefs d'entreprise, quasiment tous originaires des Balkans, et quelque 300 employés auraient ainsi abusé du système. Un deuxième syndicaliste figurait aussi parmi les accusés, mais son décès en cours d'enquête a mis fin à l'action pénale.

Lancée en 2016, l'enquête du Ministère publique avait déjà abouti à plusieurs condamnations de «petites mains», souvent par des procédures simplifiées. Il restait à juger les principaux protagonistes, mais leur procès a tourné court lundi.

Peines réduites grâce à l'accord

Les accords avec le Ministère public se sont véritablement concrétisés la semaine dernière, même si des approches avaient déjà eu lieu auparavant, a expliqué Nicolas Cruchet, le procureur en charge de l'affaire, lundi en marge de l'audience. Selon lui, ces arrangements sont «dans l'intérêt de tout le monde». Chaque camp a dû faire «un pas vers l'autre». Le Ministère public a «lâché un peu de lest» sur certains points, tandis que les prévenus ont admis «in extremis» la plupart des faits, ce qui leur a valu des peines réduites, a-t-il relevé.

Pour justifier ce revirement, les accusés ont, eux, avancé «la fatigue» et l'envie de «passer à autre chose» après une très longue procédure. Sur la fraude à proprement parler, ils n'ont pas souhaité répondre à la Cour, notamment à la question de savoir qui l'avait initiée.

Par son ampleur, l'arnaque à la CCh a régulièrement défrayé la chronique ces dernières années dans le canton de Vaud. Aucune complicité n'avait été mise en évidence au sein de la caisse, mais un audit de la Cour des comptes avait révélé en 2018 «un manque de rigueur flagrant» lors de l'octroi d'indemnités ICI. Depuis, la caisse a pris plusieurs mesures pour éviter de tels abus.

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