Derrière Nathalie Schranz, présidente de la commune de Court (BE), de nombreuses voitures filent à toute vitesse. Cette localité de 1400 habitants du Jura bernois pourrait pourtant voir son développement freiné – et ce à cause du président américain Donald Trump et de ses droits de douane.
Court doit prochainement rénover une route, mais rien n’est sûr. En effet, une vingtaine d’entreprises sont implantées dans la commune, presque toutes exportatrices. Une baisse du chiffre d’affaires se traduirait par un manque à gagner pour la caisse communale, et Nathalie Schranz doit se préparer à des pertes.
Une incertitude qui pèse sur les communes
Les spéculations sur un éventuel accord douanier vont bon train dans les administrations communales suisses. Alors que les effets des droits de douane américains sur l’économie suisse commencent à se faire sentir, ils constituent déjà un problème concret pour les communes. L’automne marque le début de la saison budgétaire – et cette année, la grande question est: comment évolueront les recettes fiscales? Les communes ne peuvent que spéculer, dans l’attente d’un éventuel accord du Conseil fédéral avec Donald Trump.
Pour Court, une chose est sûre: prudence est de mise dans la planification. Bien que les conséquences se fassent sentir avec un certain retard, la commune préfère établir un budget pessimiste. «En tant que commune, les droits de douane nous concernent surtout via les impôts sur les entreprises», explique Nathalie Schranz. «Si l’argent rentre moins, nous devrons mettre certains projets en attente.»
Un investissement majeur reste la construction d’un nouveau gymnase. «Nous en avons absolument besoin», affirme Nathalie Schranz. Mais d’autres travaux, comme l’assainissement de certaines routes, pourraient être reportés. «Nous devons surveiller chaque franc et décider d’année en année ce qui peut entrer dans le budget.»
Une situation délicate à Bienne
A Bienne, le siège imposant de Swatch longe le canal de la Suze. La ville du Seeland, fortement liée à l’industrie horlogère et à l’exportation, est donc particulièrement touchée par l’incertitude. La planification du budget 2027 commence à la fin de l’année, mais beaucoup de choses pourraient évoluer, explique la maire Glenda Gonzalez Bassi. «Il ne nous reste qu’à attendre et espérer que la Confédération parvienne à négocier une réduction des droits de douane. Pour nous, en tant que ville, la situation est très pénible.»
Pour le moment, il s’agit surtout d’envoyer des signaux et de soutenir le canton. «Nous nous engageons politiquement pour que les entreprises puissent prolonger leurs droits au chômage partiel», indique Glenda Gonzalez Bassi. Il est également important d’accompagner les entreprises locales et régionales afin d’assurer la continuité de leurs activités. «Nous échangeons des informations et essayons d’apporter notre soutien là où c’est possible.»
Une passivité critiquée
Selon Henrik Schoop, directeur de l’Union du commerce et de l’industrie du canton de Berne, une planification budgétaire fiable pour les communes est presque impossible actuellement. Mais il critique surtout les gouvernements communaux: «Je ne sens pas assez d’efforts pour défendre l’industrie au niveau communal et cantonal», déplore-t-il. Jusqu’ici, seules des mesures à court terme ont été mises en place, comme des bons d’achat ou le chômage partiel. «Les grands thèmes à long terme, comme l’attractivité des sites, sont traités avec négligence.»
Pour Henrik Schoop, c’est le moment idéal pour que cantons et communes travaillent à retenir les entreprises en Suisse. «Bien sûr, ils ne peuvent pas compenser entièrement les droits de douane américains de 39%. Mais tous les leviers doivent être actionnés – formation, fiscalité, mobilité, aménagement du territoire.» Pour l’instant, il constate «une grande passivité» sur ces sujets.